Michael Tchokpodo | août 17, 2020
Nouvelle en bref
Par une journée nuageuse de mercredi à Dangbo, au Bénin, Véronique Ahissou craint que la pluie et la crise du coronavirus entravent les réunions de la coopérative d’épargne et de crédit de son village. La coopérative a déjà des difficultés et la majorité de ses membres ne peuvent plus payer la cotisation hebdomadaire ou se permettre de prendre des prêts. À cause de la pandémie, les femmes ne gagnent plus le revenu qui provenait principalement de la vente de denrées comme le maïs, le riz et les pâtes alimentaires. Cependant, ces coopératives demeurent importantes pour les femmes, surtout qu’elles sont un canal par lequel elles peuvent s’informer sur le coronavirus et s’entraider en cette période de pandémie.
Il est presque 11 h, ce mercredi en ce début du mois de juillet. Le ciel s’assombrit et il commence à pleuvoir. Véronique Ahissou dispose des tables, des bancs et des chaises en cercle sous un hangar de fortune, à l’extérieur de sa maison. Elle déclare : « Aujourd’hui n’étant pas un jour de marché, les femmes de notre groupement pourront se réunir. J’espère que la pluie ne va pas en rajouter au coronavirus pour empêcher le bon déroulement de la séance. »
Madame Ahissou, 50 ans, vit à Dangbo, un village situé à 50 kilomètres de Cotonou, la capitale économique du Bénin. Elle est la présidente de l’association d’épargne villageoise Gbénonkpô. C’est l’un des 2 000 groupements appuyés par l’ONG internationale CARE.
Depuis le début de la crise du coronavirus, seulement 10 des 16 membres du groupement ont pu se réunir. Les femmes de l’association n’arrivent plus à payer les tontines, ou les cotisations régulières de 200 FCFA (0,36 $ US) et le groupement n’accorde plus de prêt aux membres. De plus, les femmes peinent également à cotiser les 50 FCFA (0,09 $ US) destinés au fonds de solidarité.
Ces associations d’épargne villageoises fonctionnent comme un filet de sécurité sociale et économique. Les femmes organisent des tontines qu’elles prennent sous forme de prêts. Elles utilisent ces prêts pour financer de petites activités commerciales, y compris acheter du riz, des pâtes alimentaires, du maïs et d’autres produits qu’elles revendent. Grâce aux revenus obtenus, elles peuvent continuer à payer la tontine et subvenir aux besoins de leurs familles.
Les crédits de l’association sont remboursés dans un délai de trois mois, avec un intérêt mensuel de 5 %. L’intérêt permet de pérenniser le processus de prêt rotatif au profit de tous les membres. De plus, le fonds de solidarité permet à l’association de soutenir les membres en situation difficile.
Mais la pandémie du coronavirus a réduit la capacité des femmes à gagner un revenu. Madame Ahissou explique : « À cause du COVID-19, nos commerces ne s’écoulent plus comme avant. Nous avons alors diminué le montant des prêts qui est passé de 15 000 FCFA (27 $ US) à 5 000 FCFA (9 $). Chacune prend le montant qu’elle peut rembourser. Avant la crise, la plus forte somme prêtée s’élevait à 40 000 FCFA (72 $ US). »
Les fonds empruntés sont injectés dans du petit commerce, mais la mévente empêche les femmes de rembourser leurs prêts. Elles hésitent à prendre plus de crédits, même si elles ont besoin d’argent pour subvenir aux besoins de leurs familles et payer les tontines. La situation est précaire.
Emilienne Hounton est la secrétaire générale d’un autre groupement d’épargne appelé Mignonmidé. Elle déclare : « Le vendredi dernier, des émissaires de l’ONG CARE étaient venus nous questionner. Nous leur avons dit qu’avant le COVID-19, nous nous en sortions bien. » Mais elle reconnaît que tout est plus difficile actuellement et que les membres du groupement n’arrivent plus à payer les cotisations hebdomadaires.
CARE maintient le contact avec les groupes pour appuyer leurs activités, et les aider à prévenir la propagation du COVID-19. L’organisation leur a également fait don de matériels pour le jardinage et l’élevage.
Eudes Hougbenou travaille pour CARE Bénin-Togo. Elle déclare : « Les femmes et les enfants sont les personnes les plus touchées par cette pandémie. Elles sont plus aptes à sensibiliser les membres de leur famille et leurs paires sur les mesures barrières [préventives]. »
Elle ajoute : « Cette prise de décision est beaucoup plus ressentie au sein de leur ménage. Le couple doit s’entendre pour une meilleure gestion de la famille, à savoir le manger, l’éducation des enfants. »
Les masques ajustés, les sièges bien espacés, les femmes du groupement Mignomidé se sont également réuni ce mercredi à Dangbo. Elles se rappellent, à tour de rôle, les précautions à prendre pour protéger leurs familles et elles-mêmes du COVID-19 : « Nous devons rester à une distance d’un mètre les uns des autres, porter des cache-nez et nous laver régulièrement les mains à l’eau et au savon. » Ces rappels font régulièrement partie de leurs réunions hebdomadaires.
Elles sont également en train de démarrer une nouvelle entreprise de fabrication de dispositifs de lavage des mains artisanaux à moindre coût.
Face à l’ampleur du COVID-19, les groupements féminins villageois souhaitent bénéficier de microcrédits qui leur permettront d’investir dans leurs activités génératrices de revenus. Cela le permettra de résister aux répercussions de la crise.
La présente nouvelle a été produite grâce au soutien financier du gouvernement du Canada par l’entremise d’Affaires mondiales Canada.