Résumé d’une discussion au Mali : Questions de sécurité et radiodiffusion

| février 6, 2023

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Les crises sécuritaires constituent un sérieux défi pour les journalistes, y compris les radiodiffuseur.euse.s. Dans ce contexte, le partage d’informations clés sur la paix et la sécurité publique représente une opportunité importante, mais comporte également de nombreux risques.

Plusieurs régions du Mali connaissent l’insécurité. Ainsi, pour renforcer les capacités de nos partenaires radiodiffuseur.euse.s, Radios Rurales Internationales a invité Mamoudou Bocoum, journaliste et directeur de Radio Kaourale à Mopti, à rejoindre le groupe WhatsApp de RRI pour les partenaires radiodiffuseur.euses.s au Mali, qui rassemble 198 membres. La discussion a eu lieu du 10 au 14 octobre 2022. Monsieur Bocoum est également formateur de RRI, spécialiste du journalisme sensible aux conflits et correspondant de Voix de l’Amérique dans le centre du Mali. La discussion a été modérée par Abdoulrazack Mamoudou, formateur en métiers radiophoniques et responsable du réseautage.

La discussion a porté sur quatre thèmes principaux :

  • Quelles sont les conditions de sécurité dans votre région?
  • Comment pensez-vous que vous devriez vous comporter en tant que radiodiffuseur.euse pendant une crise de sécurité?
  • Quels termes devons-nous utiliser pour parler de la crise dans le contexte actuel de notre pays, en particulier dans les zones où l’insécurité est plus importante?
  • Les hommes et les femmes doivent-ils se comporter différemment lorsqu’ils font des reportages dans une zone où leur sécurité n’est pas garantie?

Plusieurs participant.e.s ont apporté de bonnes contributions. Voici quelques-unes des plus pertinentes.

Aliou Touré de Radio Santoro a déclaré : « Nous devons être impartiaux dans le traitement de l’information et essayer de faire baisser la tension dans les conflits communautaires. Mais dans le cas des terroristes, il faut appeler la population à être vigilante et surtout à collaborer avec nos forces de sécurité. »

Oumou Keita, de Radio Mandé, a déclaré : « On peut bien faire son travail et rester en sécurité si on respecte certaines conditions : savoir parler, savoir quand se déplacer et comment s’habiller. »

Sur le sujet du traitement des informations fiables mais dont la source n’est pas vérifiable, presque tous les participant.e.s ont choisi de laisser tomber ce type d’informations.

La discussion a également été l’occasion pour les participant.e.s de partager des astuces et des conseils pour faire en sorte que le travail puisse continuer pendant les crises de sécurité. Les radiodiffuseur.euse.s ont notamment conseillé d’humaniser les conflits, de donner la parole à chacun, d’éviter les sujets sensibles et la stigmatisation.

Pendant ces cinq jours de discussion, la personne ressource, monsieur Bocoum, a partagé son point de vue sur le rôle du journalisme dans les conflits. Il a dit que la mission des journalistes professionnels n’est pas de réduire les conflits, mais de diffuser des informations précises et impartiales. Cependant, un bon journalisme peut souvent conduire à la réduction des conflits.

Monsieur Bocoum a déclaré que la pratique quotidienne du bon journalisme contient intrinsèquement plusieurs éléments de résolution des conflits. Il en a énuméré plusieurs, notamment les suivants.

  • Consolider la confiance mutuelle : Le manque de confiance est l’un des principaux facteurs qui contribuent à l’éclatement des conflits. Les médias peuvent réduire la suspicion en enquêtant sur les sujets brûlants et en les révélant au grand jour. Un bon journalisme peut également présenter des informations montrant qu’une solution est possible en donnant des exemples d’autres endroits et en expliquant les efforts locaux pour parvenir à la réconciliation.
  • Identifier les intérêts sous-jacents : Dans un conflit, les deux parties doivent comprendre les intérêts primaires de l’autre. Pour ce faire, le bon reportage pose des questions difficiles visant à exposer le contenu réel des discours des dirigeant.e.s. Le bon reportage va également au-delà des intérêts des dirigeant.e.s et s’intéresse aux intérêts de groupes plus larges.
  • Trouver des solutions : Dans un conflit, les deux parties doivent finalement présenter des propositions spécifiques pour répondre à leurs griefs. Dans leur travail quotidien, les bons reporters demandent à chaque partie de présenter ses solutions idéales. Le bon journalisme suit un processus constant de recherche de solutions.
  • Encouragez un équilibre des rapports de force : Les groupes en conflit doivent croire que leurs intérêts seront pris en compte s’ils rencontrent l’autre partie pour des négociations. Le bon journalisme encourage les négociations en fournissant des informations impartiales et équilibrées, et en prenant en compte les intérêts des deux parties.

Nous espérons que la discussion a été bien appréciée par les participant.e.s.

Fatoumata Niaré de Radio Ciwara a dit : « J’ai vraiment apprécié la discussion sur le thème des questions de sécurité liées à notre travail radiophonique. Nous avons beaucoup appris les uns des autres. Un grand merci à Radios Rurales Internationales. En conclusion de cette discussion, nous rappelons que les journalistes restent des êtres humains, qu’ils ont le droit à la vie. Ils doivent donc préserver leur vie avant tout. Et un bon journaliste est celui qui traite l’information avec justesse, sans prendre position, sans plaider pour tel ou tel individu ou groupe au détriment de l’autre, malgré les circonstances. Le journaliste travaille pour tout le monde. Le journaliste doit être une personne de paix, de cohésion sociale et non de guerre, [pas quelqu’un] qui incite à la haine. »