Rwanda : Même avec l’assurance-maladie, plusieurs Rwandais n’arrivent pas à bénéficier de soins médicaux (Syfia Grands Lacs)

| juillet 16, 2012

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Au Rwanda, avoir une mutuelle de santé n’est pas une garantie que l’on sera soigné. Les Rwandais doivent pouvoir payer 10% du coût des soins. Ceux qui n’ont pas les moyens de se payer des soins modernes se tournent vers les médecins traditionnels ou l’auto-médication.

Tous les malades ne se permettent plus d’appeler le 912, le numéro gratuit du Service d’aide médicale d’urgence (SAMU). Ce service a été lancé en 2009 pour prendre rapidement en charge les personnes accidentées ou gravement malades. En effet, depuis début 2011, ceux qui sollicitent l’intervention du SAMU doivent d’abord prouver qu’ils sont capables de payer les frais de transport et les premiers soins.

Un malade ou son accompagnateur doit d’abord s’acquitter de 10% du coût du transport, soit 40 francs rwandais (Frw) par kilomètre, ainsi que du coût des soins donnés lors du trajet. Un villageois de Kabuga, une localité située à 20 kilomètres de Kigali, la capitale, raconte : « Quand j’ai appelé l’ambulance pour secourir mon fils qui venait de se brûler tout le corps, on m’a dit que je [devais] d’abord payer 2600 Frw (4,30 dollars américains), dont 800 Frw pour l’ambulance et le reste pour les premiers soins. » Ce villageois a choisi de ne pas se rendre à l’hôpital, sachant qu’il devrait payer presque la même somme afin que son fils fût soigné.

Une fois à l’hôpital, après consultation, le patient doit payer 10 pour cent de tout le matériel nécessaire aux examens, aux soins et même aux opérations : seringues, gants, compresses, désinfectants, sérum et même bistouri. Un garde-malade du centre hospitalier universitaire de Kigali affirme : « Même en cas d’opération, tout le matériel doit être fourni par le patient. Si celui-ci n’est pas en mesure de l’acheter, il ne peut pas avoir d’examens médicaux, encore moins de médicaments. L’infirmière explique que les malades sont obligés de faire des va-et-vient entre les guichets de la mutuelle et les pharmacies pour chercher les documents et les médicaments nécessaires.

Depuis mi-2011, les cotisations annuelles pour l’assurance maladie des villageois ont été revues à la hausse, passant de 1000 Frw par personne à 7000 Frw, 3000 Frw et 2000 Frw, suivant les catégories établies en fonction des revenus de chacun. Tout assuré doit en outre payer le ticket modérateur, soit 10% du coût total des prestations. Un infirmier de Bugesera, dans l’est du pays, constate : « Une famille de six personnes classée dans la deuxième catégorie doit s’acquitter annuellement de 18 000 Frw [30 dollars américains]. Il est quasiment impossible pour les villageois de payer, en plus, le ticket modérateur. » Mais il y a souvent des ruptures de stocks de médicaments dans les pharmacies publiques, obligeant les patients à prendre en charge ces coûts tous seuls.

Pour aller dans les hôpitaux, souvent en ville, les gens doivent payer le transport et le logement. Kantarama vit à Rwamagana, un village situé dans l’Est du pays. Lorsque son fils a eu un accident à l’œil, il a été transféré à Kabgayi, dans le sud du pays. Kantarama explique que parce qu’il ne connaissait personne dans cette région, il a dû vendre toute sa moisson de l’année pour payer le transport et l’hébergement.

En 2010, les hôpitaux ont perdu d’énormes sommes car de nombreuses personnes devaient recevoir des soins médicaux mais n’avaient pas les moyens de payer. Pour limiter ces pertes, les autorités ont décidé que tout service devrait être payé d’avance. Certains établissements vont même jusqu’à renvoyer les accidentés incapables de déposer une caution à l’arrivée. Un activiste des droits de la personne de Kigali explique que « cette obligation décourage les gens et les pousse à aller voir les médecins traditionnels ou à pratiquer l’auto-médication. » Il pense qu’il serait mieux d’augmenter les cotisations au lieu de taxer les villageois qui ont souvent des difficultés à avoir de l’argent liquide.