RDC : La culture intercalaire génère de meilleures récoltes pour les agriculteurs de Goma

| août 13, 2018

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L’air sérieux de Charline N’simire laisse paraître encore plus les légères rides sur le visage de cette agricultrice de 60 ans. Les mains aux hanches, elle s’inquiète au sujet de la saison des pluies qui s’approche, car il sera temps de semer.

Madame N’simire cultive depuis 20 ans. Son champ de 750 mètres carrés est situé à Mugunga, à l’ouest de Goma, une ville située à l’est de la République démocratique du Congo.

Elle déclare : « Bientôt, les pluies fortes vont commencer. J’hésite un peu sur ce qu’il faut semer durant cette saison agricole. Je ne sais pas si c’est une bonne idée de répéter ce que j’ai cultivé ces trois dernières années. »

Depuis trois ans, elle cultive le maïs en association avec le haricot, une technique que la plupart des gens ne connaissent pas selon elle. Ses récoltes lui ont rapporté un bon revenu, et c’est une réussite qu’elle aimerait voir se répéter. Mais elle s’inquiète d’avoir une mauvaise récolte si elle continue de cultiver la même denrée une année après l’autre.

Cette année, madame N’simire a finalement décidé de cultiver à nouveau le maïs en association avec le haricot. Pour le maïs, elle a choisi une semence hybride appelée M’banjoek, une variété locale qui résiste aux maladies fongiques et bactériennes. Avant de semer, elle trempe les semences dans l’eau pendant 12 heures pour stimuler la germination.

Pour le haricot, elle utilise une variété hybride connue sous le nom de Kijamberé qui résiste aux organismes nuisibles tels que les mites et aux maladies comme l’anthracnose.
Elle sèmera d’abord le maïs et ensuite le haricot trois semaines plus tard, en respectant le calendrier agricole.

Lorsque les pousses de maïs émergent, il est facile pour elle de voir où elle doit semer le haricot. En ne semant pas les deux cultures le même jour, elle évite ainsi de semer les deux cultures trop près l’une de l’autre. Elle sème le maïs en laissant 75 centimètres entre les rangées de maïs, et 25 à 35 centimètres entre les rangées de maïs et de haricot. Elle dépose cinq graines de haricot dans chaque trou avec un espace de 15 à 25 centimètres entre les trous.

Le rapprochement des plantes accroît la concurrence entre les plantes pour les ressources à mesure qu’elles croissent, ce qui rend chacune d’elle moins vigoureuse.

Madame N’simire affirme que semer le haricot après le maïs protège également les plants de haricot. Elle explique : « À Goma, mi-février est le début de la campagne agricole, les pluies sont vraiment abondantes. » En semant le haricot plus tard, elle évite les pluies fortes qui peuvent occasionner des maladies comme les tâches angulaires sur les feuilles ou même la putréfaction.

La culture intercalaire de plantes telles que le maïs et le haricot est une pratique importante en matière d’agriculture de conservation et elle offre plusieurs avantages. En plus de contribuer à la lutte contre les ravageurs, les maladies et les mauvaises herbes, la culture intercalaire avec des légumineuses telle que le haricot peut accroître la fertilité du sol.

Pour empêcher les mauvaises herbes d’envahir et d’étouffer les plantes, madame N’simire sarcle régulièrement son champ.

Ses récoltes de maïs augmentent chaque année depuis 2016, et sont passées de cinq sacs de 40 kilogrammes à six sacs de 55 kilogrammes. Elle vend la moitié de sa récolte et conserve le reste pour sa consommation familiale. Le maïs rapporte 1 275 000 francs congolais (790 $ US) à madame N’simire chaque année.

Jeanine Malekani est une veuve de 35 ans qui hésitait à pratiquer la culture intercalaire sur son champ de 600 mètres carrés, bien qu’elle ait fini par en faire l’essai.

Elle déclare : « Au tout début, je ne voulais le faire parce que j’avais peur des pertes. Je n’avais pas [assez de moyens financiers] et j’avais juste cette parcelle. Je me disais que si ça ne marche pas je perdrais tout, et qu’il ne m’en resterait même pas assez pour les semences. »

Muhindo Mali-Ya-Bwana est ingénieur phytopathologue au collectif ALAPHIK, une association d’agronomes et de phytopathologues. Il est basé dans la cité de Sake, dans la province du Nord-Kivu, et il appuie des agriculteurs et des agricultrices comme madame Malekani et madame N’simire à mesure qu’elles changent leurs pratiques agricoles. Il les conseille avant les semis et pendant la phase de croissance du maïs et du haricot, et il leur montre comment sélectionner les bonnes semences.

Il déclare : « Il est important de tamiser les semences pour séparer les mauvaises graines des bonnes et ensuite les tremper. Les graines qui ne flottent pas doivent être jetées. Puis les bonnes doivent être étalées au soleil pendant deux heures avant le semis. »

Beaucoup d’agriculteurs et d’agricultrices de Goma pratiquent de plus en plus la culture intercalaire, une technique qui leur permet parfois de doubler leur production et de gagner plus à la fin de la campagne agricole.

La présente nouvelle a été produite avec l’appui de la Banque canadienne de grains dans le cadre du projet « Conservation Agriculture for building resilience, a climat smart agriculture approach. » Ce travail est financé par le gouvernement du Canada, par l’entremise d’Affaires mondiales Canada, www.international.gc.ca.