Nigéria : Une cour populaire en direct sur les ondes

| août 4, 2014

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L’émission Brekete Family Radio est un moyen idéal pour faire passer le temps si vous êtes coincé dans le trafic de pare-chocs contre pare-chocs à l’heure de pointe du matin à Abuja.

Ahmed Isa est l’animateur de  l’émission. Sa voix se déplace à travers les ondes accompagnée d’une salutation familière, Hembelembe, à laquelle son auditoire répond Olololoooo. Les auditeurs et les auditrices pris dans l’embouteillage ou dans le go-slow (circulation au ralenti) comme on dit au Nigéria murmurent la réponse sous leur souffle. Personne ne peut prédire ce qui se passera pendant l’émission.

Brekete Family Radio est un programme calqué sur un forum de plaintes du public ou une cour populaire. Les auditeurs et les auditrices appellent pour signaler des cas de fonctionnaires ou de particuliers évitant la peine ou la censure à la suite d’actes qu’ils ont commis. Un panel au sein du studio discute de la question et invite l’auditoire à offrir des conseils au plaignant.

Le programme quotidien d’une heure a permis à des Nigérians et à des Nigérianes qui, jusqu’à présent, n’avaient aucun espoir d’accéder à la justice. Brekete Family Radio est en train de devenir le dernier recours de monsieur, madame Tout-le-monde dans un pays où de nombreux établissements ne sont pas tenus responsables de leurs agissements.

Parfois, l’animateur du programme appelle un(e) fonctionnaire du gouvernement en direct en ondes et lui demande d’expliquer ses actes. Mettre les fonctionnaires dans l’embarras par l’entremise de ce genre d’enquête publique en ondes a permis d’atteindre des résultats significatifs.

Dernièrement, le panel a écouté l’histoire d’un homme qui a été licencié de son travail dans un organisme gouvernemental sans cause évidente. On lui devait encore de l’argent et il avait épuisé ses maigres économies en essayant d’obtenir un règlement équitable.

M. Isa a appelé le chef de l’organisme gouvernemental pour obtenir sa version des faits. Le fonctionnaire a répondu, mais a raccroché presque immédiatement après avoir répondu. Les tentatives de le rappeler ont été infructueuses. Le fonctionnaire en question ne semblait pas désireux de parler de ce sujet. Alors, M. Isa a dicté le numéro de téléphone du fonctionnaire en ondes et a invité les auditeurs et les auditrices à envoyer un texto au fonctionnaire et à l’appeler jusqu’à ce que le problème soit résolu.

On estime que 20 millions de personnes écoutent l’émission quotidiennement, soit plus d’un(e) Nigérian(e) sur dix. Le programme est inondé chaque jour de milliers de textos et de centaines d’appels téléphoniques. Des avocats bénévoles font de leur mieux pour aider tous ceux et celles qui ont un problème.

Le programme est devenu un incontournable pour de nombreux Nigérians et de nombreuses Nigérianes. Il s’agit d’une plateforme de collecte de l’opinion publique qui aide à redresser des situations, à faciliter l’arbitrage et même à financer un programme de bourses pour les personnes pauvres. L’émission a puisé profondément dans le besoin des Nigérians et des Nigérianes de transparence et de justice.

Le lendemain de son humiliation à la radio et pendant que le trafic du matin était à pare-chocs contre pare-chocs, le fonctionnaire a offert ses excuses en ondes à tous les Nigérians et à toutes les Nigérianes. Apparemment, son téléphone n’avait pas arrêté de sonner. Le bombardement de messages des auditeurs et des auditrices lui avait tordu le bras. Le problème du paiement en souffrance a été réglé en quelques semaines.

Pour lire l’article sur lequel repose cette histoire, visitez le http://www.trust.org/item/20140704110649-ra1xk/?source=jtBlogs (en anglais seulement).