Mali : Un couple prend des décisions sur le consentement sexuel et les contraceptifs

| mars 3, 2023

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Nouvelle en bref

Oumou Coulibaly est mariée avec son mari depuis deux ans. Cependant, à l’instar de plusieurs jeunes couples, le sien a actuellement des disputes par rapport au consentement aux relations sexuelles et à la contraception. Madame Coulibaly déclare : « Mon mari ne me demande jamais mon consentement lorsqu’il veut avoir des relations sexuelles avec moi. Même quand je refuse, il me force à le faire. » Le principe du consentement aux relations sexuelles exige que chaque personne impliquée dans un acte sexuel donne effectivement son consentement. Une relation sexuelle sans consentement est considérée comme un viol ou une agression sexuelle. Comme elle espérait trouver une entente avec son mari, madame Coulibaly n’a pas porté plainte auprès des autorités, car la communauté aurait désapprouvé cela. Un leader communautaire est plutôt en train de faire la médiation au sein du couple. La contraception est l’autre point de discorde entre monsieur et madame Coulibaly, qui affirme que son mari est contre ça, car il pense que cela conduit à l’infidélité. En dépit de leurs désaccords, madame Coulibaly a espoir que sa situation matrimoniale peut s’améliorer. Elle conseille aux autres femmes de ne pas se taire concernant le consentement aux relations sexuelles ou les moyens de contraception, et de profiter de chaque occasion pour apporter un changement dans leur vie et leurs relations.

C’est le milieu du mois de Ramadan à Markala, une localité située à 35 kilomètres de Ségou, au Mali. Cette région abrite une forte communauté musulmane et les préparatifs pour l’Aïd battent leur plein. Mais Oumou Coulibaly, une jeune fille mariée de 18 ans, n’est pas à la maison avec son mari. Elle passe le mois saint chez son père à cause des désaccords avec son mari concernant le consentement aux rapports sexuels et aux moyens de contraception.

Au Mali, les questions de consentement sexuel et de planification familiale sont des sujets tabous.

Madame Coulibaly explique : « Chez nous, l’éducation traditionnelle et religieuse nous apprend qu’une femme mariée ne doit pas s’opposer aux désirs sexuels de son mari. Elle doit tout accepter de l’homme pour avoir des enfants bénis. »

Elle soutient que ces pratiques sont ancrées dans la manière de pensée de la société malienne, notamment chez les hommes.

Madame Coulibaly s’est mariée avec son mari il y a deux ans. Cependant, à l’instar de plusieurs jeunes couples de la région, ils ont un différend pour des raisons de consentement sexuel et de contraception.

Elle raconte : « Mon mari ne demande jamais mon accord quand il souhaite avoir des relations sexuelles avec moi. Malgré mon opposition il m’oblige à le faire. »

Le principe de consentement sexuel exige que toute personne engagée dans une relation sexuelle doive effectivement donner son consentement. Cela signifie également que la personne peut retirer son consentement à tout moment. Des relations sexuelles sans consentement sont considérées comme un viol ou une agression sexuelle.

Las des relations non consensuelles répétées, madame Coulibaly a décidé de retourner chez son père en attendant un éventuel règlement du conflit qui l’oppose à son conjoint. Dans l’espoir qu’elle trouverait un accord avec son mari, madame Coulibaly n’a pas porté plainte auprès des autorités. Elle note que sa famille et son entourage se sont opposé au fait qu’elle intente une procédure judiciaire.

Madame Coulibaly affirme que le fait d’engager une procédure judiciaire contre son mari serait mal vu par la communauté, qui considèrerait cela comme quelque chose d’indigne ou qui pourrait mener à un divorce. D’ailleurs, les problèmes entre conjoints se règlent très souvent à l’amiable par l’intermédiaire de leaders communautaires appelés « griots » qui agissent à titre de médiateurs pour aider les couples à résoudre leurs problèmes à la maison.

Outre les actes sexuels, le consentement sexuel concerne d’autres formes de pratiques sexuelles, y compris la pornographie qui consiste à prendre des photos ou faire des vidéos sexuelles.

Madame Coulibaly soutient que le consentement sexuel manque également dans ce domaine. Malgré son refus, son mari lui demande de prendre des photos de ses parties intimes. Elle déclare : « Il me force de faire… Il trouve du plaisir dans ça. »

Idrissa Goro est juriste et coordonnateur du Centre pour la Promotion des Droits Humains de Ségou. À ses dires, la question du consentement sexuel est assez délicate au Mali.

Monsieur Goro explique que beaucoup de gens au Mali croient que des personnes mariées n’ont pas besoin d’un consentement avant de pouvoir avoir des relations sexuelles, même si le consentement sexuel est reconnu par les accords nationaux, régionaux et internationaux sur les droits de la personne dont le Mali est signataire.

Monsieur Goro déclare simplement : « Il est nécessaire d’obtenir un consentement avant toute relation sexuelle. »

En outre, il existe des lois qui imposent le consentement sexuel au Mali. Une des lois stipule que des relations sexuelles non consensuelles sont considérées comme un viol. L’absence de consentement sexuel durant des relations sexuelles est passible de cinq à vingt ans de prison et d’une amende de 250 000 à 800 000 FCFA (398 $ à 1 272 $ US).

La contraception est un autre point de discorde entre monsieur et madame Coulibaly. Selon madame Coulibaly, après la naissance de son premier enfant, elle utilisait la contraception pour éviter une grossesse non désirée.

Elle explique : « J’utilisais un contraceptif appelé “Jadelle”, car mon premier bébé n’avait même pas un an. Mon mari n’aimait pas ça. »

Elle déclare que son mari et sa belle-mère croyaient que la contraception amenait les femmes à être infidèles, car cela signifie qu’elles pourraient avoir des relations avec leurs amants sans craindre de tomber enceintes.

Hadizatou Coulibaly est chargée de communication dans une organisation locale appelée Actions de soutien au développement des activités des populations. Dans le cadre de son travail, madame Coulibaly organise des campagnes de sensibilisation pour combattre les mythes et les fausses idées sur la contraception.

Selon madame Coulibaly, ces mythes et ces fausses idées sont souvent de simples prétextes que les gens qui ne veulent pas pratiquer la planification familiale.

Elle explique : « Nous entendons souvent que la contraception fait juste la promotion de la débauche. Nous expliquons lors de nos sensibilisations que cela est faux. La contraception met plutôt à la disposition des couples, des méthodes pour se protéger contre les grossesses non désirées. »

Madame Coulibaly soutient que sa structure fait également des séances de démonstrations du port de préservatif. Ces séances contribuent également à combattre le mythe selon que les préservatifs causent des maladies.

Malgré ces efforts, le consentement sexuel et la contraception demeurent une source de conflit chez beaucoup de couples au Mali.

Madame Coulibaly déclare : « Après les discussions [avec le médiateur], j’espère que mon mari a appris sa leçon et sera plus ouvert aux discussions concernant la planification familiale, mais qu’il accordera également de l’importance à mon point de vue dans les situations qui me concerne. »

Madame Coulibaly conseille aux autres femmes de ne pas garder le silence concernant le consentement ou les moyens de contraception, et de saisir chaque occasion pour améliorer leurs conditions de vie et leurs relations.

Cette ressource a été produite grâce à l’initiative « HÉRÈ – Bien-être des femmes au Mali » qui vise à améliorer le bien-être des femmes et filles en matière de santé sexuelle et reproductive et à renforcer la prévention et la réponse aux violences basées sur le genre dans les régions de Sikasso, Ségou, Mopti et le district de Bamako au Mali. Le projet est mis en œuvre par le Consortium HÉRÈ – MSI Mali, en partenariat avec Radios Rurales Internationales (RRI) et Women in Law and Development in Africa (WiLDAF) grâce au financement de Affaires Mondiales Canada.

Photo : Oumou Coulibaly avec son mari et leur enfant. Crédit : Dioro Cissé.

Cette Nouvelle a été publiée à l’origine en juillet 2022.