Mali : Des leaders religieux sensibilisent sur le partage des travaux domestiques

| février 16, 2024

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Nouvelle en bref

À M’peba, au Mali, l’imam Oumar Kodio et le pasteur Jean Marie Traoré défient les opinions et les rôles traditionnels dévolus aux hommes et aux femmes, en vue de promouvoir l’égalité des genres. Dans ses prêches, l’imam Kodio encourage les hommes musulmans à participer aux tâches ménagères, citant le Coran afin de souligner l’importance d’aider les épouses dans les tâches ménagères. Il veut corriger les idées fausses qui imposent aux femmes la responsabilité exclusive des tâches ménagères, limitant ainsi leurs opportunités. De même, le pasteur Traoré enseigne à ses fidèles chrétiens que les hommes et les femmes doivent de soutenir dans tous les aspects de la vie, et ce, conformément aux enseignements du Christ concernant le soutien mutuel. Au Mali, l’éducation traditionnelle ou l’éducation religieuse incomprise confine souvent les femmes aux travaux domestiques tels que la cuisine, le fait de s’occuper des enfants, des beaux-parents et de l’époux, ainsi que d’autres tâches domestiques. Toutefois, les choses commencent à changer à mesure qu’un plus grand nombre de responsables religieux et communautaires encouragent les maris et les femmes à se soutenir mutuellement.

Il est 13 h 30 en ce vendredi du mois de décembre, dans le village de M’peba situé à une dizaine de kilomètres de la ville Ségou, au Mali. Comme d’habitude, l’imam Oumar Kodio, vêtu en blanc, dirige la séance de prêche dans la mosquée du quartier. Il parle de l’épanouissement de la famille et du rôle de chaque fidèle dans les travaux domestiques selon les prescriptions coraniques. Il déclare : « En tant que musulman, rien n’interdit au mari d’aider sa femme dans les travaux domestiques. Le bon fidèle est celui qui reconnait la valeur de sa femme. »

L’imam Kodio profite des prêches du vendredi pour sensibiliser les fidèles musulmans sur les fausses idées reçues et la mauvaise interprétation des écrits religieux, ainsi que les croyances locales concernant le rôle de ménagère des femmes dans les foyers. L’imam Kodio estime que ces idées maintiennent les femmes dans une position marginale.

Au Mali, l’éducation traditionnelle ou religieuse mal comprise a réduit les femmes souvent aux travaux domestiques comme s’occuper de la cuisine, des enfants, des beaux-parents, du mari et des autres tâches ménagères. Sans aide, ces occupations prennent tout le temps des femmes, les empêchant ainsi d’exercer une activité génératrice de revenus et limitent leur éducation et leurs autres types d’implication dans la communauté. Pendant ce temps, la plupart des hommes se limitent aux activités rémunérées. L’imam Kodio explique : « Notre religion enseigne l’amour et l’entraide. Les conjoints doivent s’aider dans la réalisation des activités domestiques pour la bonne marche du foyer. »

Jean Marie Traoré est le pasteur de l’église protestante de M’peba. Il affirme que dans les croyances chrétiennes, la femme et l’homme doivent se compléter et se soutenir mutuellement dans toute situation notamment en famille. Il déclare : « Nous devons aimer nos femmes comme le christ a aimé l’Église et les soutenir dans le quotidien du foyer. » Il apprend à ses fidèles que la Bible enseigne l’amour, l’égalité et le soutien mutuel dans les couples.

L’imam Kodio soutient que l’islam recommande aussi la communication et l’entraide dans le foyer pour l’épanouissement de la famille. Il ajoute : « Il faut aider nos épouses pour qu’elles s’épanouissent, mais dans la crainte de Dieu. Elles ont aussi les mêmes droits que hommes. » Il croit que les enseignements coraniques sur les rôles des conjoints doivent évoluer avec la société. Il déclare : « La vie d’aujourd’hui et celle du temps du prophète ne sont pas pareilles. La vie est dure et il faut vivre avec son temps en adoptant des pratiques de son temps. » Selon l’imam Kodio, les fidèles musulmans doivent aider leurs femmes dans les travaux domestiques pour alléger leur fardeau. Il soutient ses dires avec des passages de la vie du prophète favorable au partage des tâches du foyer. Il déclare : « Les livres saints enseignent que le prophète soutenait ses femmes à la maison, nous devons aussi suivre cet exemple en répartissant les travaux domestiques. »

Lamine Haidara est le président du club des maris du village de M’peba que le Fonds des Nations Unies pour la population a créé pour sensibiliser sur le partage du travail domestique. Il déclare : « Je suis satisfait des prêches. Aujourd’hui, j’aide ma femme à faire le ménage ou à s’occuper des enfants. »

Pour l’imam Kodio, le changement des mentalités exige une éducation. À ses dires, il faut inculquer aux jeunes que les activités domestiques ne sont pas exclusivement réservées aux femmes. Il ajoute : « Dans les familles, c’est la jeune fille qui aide sa maman à préparer. Il faut apprendre aussi aux garçons qu’ils doivent aider à faire les travaux ménagers. L’islam n’interdit pas cela. »

Le pasteur Traoré affirme que la sensibilisation et surtout par le biais des enseignements des leaders religieux peut éclairer les communautés sur le partage des travaux domestiques dans le foyer. Il déclare : « Un homme qui n’aide pas sa femme dans les travaux domestiques adopte un comportement contraire au dessein de Dieu. Car la paresse est un péché. »

L’imam Kodio est satisfait de l’impact positif de ses prêches sur le changement des mentalités des hommes vis-à-vis des travaux domestiques. Il conclut : « Nous devons voir nos femmes et nos filles comme des alliées, des complices et non des sujets que nous possédons. Nous devons partager avec les travaux domestiques elles si nous voulons une famille épanouie. »

La présente nouvelle a été produite dans le cadre du projet « UCARE – Soins non rémunérés en Afrique subsaharienne » qui vise à renforcer l’égalité des genres et le pouvoir des femmes par un engagement pour un partage plus juste et équitable des soins non rémunérés et des travaux domestiques au sein des ménages et des familles en Afrique subsaharienne. Ce projet est réalisé en partenariat avec Radios Rurales Internationales (RRI), ONU Femmes et le Réseau de développement et de communication des femmes africaines (FEMNET) grâce au financement d’Affaires mondiales Canada.

Photo : Imam Oumar Kodio au milieu d’une séance de prédication au Mali