Malawi : Des maraîchers délaissent les pesticides chimiques au profit de pesticides d’origine végétale

| juin 11, 2018

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Mary Mdima s’apprête à préparer la sauce pour le repas du midi. Elle prend une petite bassine et ouvre la porte du potager situé derrière sa maison, où elle cultive des légumes sur lesquels elle pulvérise uniquement des pesticides à base de plantes. Elle cueille rapidement quelques tomates et quelques gombos et se dirige directement vers sa cuisine en toit de paille.

Madame Mdima vit dans le village de Chalula, à Lilongwe, la capitale malawite. Elle raconte que les fausse-teignes des crucifères et les pucerons rongeaient autrefois les tiges et les feuilles de ses plantes. Ces insectes nuisibles transmettaient également des maladies qui racornissaient et jaunissaient les feuilles. Certaines plantes mouraient, tandis que d’autres produisaient des légumes maigres. Elle ne parvenait pas à produire suffisamment pour nourrir sa famille et couvrir leurs dépenses.

Toutefois, madame Mdima ne s’inquiète plus des ravageurs des potagers, car elle utilise des arbustes et d’autres plantes pour éloigner les ravageurs de son jardin. Elle a entendu parler de pesticides à base de plantes en 2014 auprès d’une organisation non gouvernementale dénommée The Face-to-Face Project.

Elle explique : « L’utilisation de pesticides chimiques… est coûteuse et on ne peut pas les utiliser de façon durable. Dans le passé, j’avais arrêté de cultiver des légumes parce que les produits chimiques coûtaient cher. »

Madame Mdima est heureuse de pouvoir cultiver des légumes sans pesticides chimiques. Elle déclare : « Je cultive différents des légumes tels que le chou, les oignons, le gombo, les tomates, le colza et la moutarde. J’arrive à le faire, car j’emploie différentes plantes pour lutter contre les ravageurs, et je n’utilise pas les pesticides chimiques coûteux du marché. »

Madame Mdima explique qu’elle utilise des feuilles de piment, d’oignon, de neem et de plantes locales telles que le delia (tournesol mexicain), le chanzi, le futsa et le mpungabwl (basilic local) pour lutter contre les organismes nuisibles dans son potager. Elle explique : « Je mets les feuilles de ces plantes dans un mortier et je les pile. Je transferts le mélange dans un seau et j’ajoute de l’eau et je mélange jusqu’à ce l’eau devienne verte. Je laisse le mélange reposer pendant une heure avant de commencer à le pulvériser sur mes légumes. »

Elle affirme que les pesticides à base de plantes sont efficaces : « Les ravageurs meurent. Certains n’arrivent pas à manger les légumes, tandis que d’autres s’enfuient chaque fois que je pulvérise le mélange sur les légumes. C’est un moyen abordable pour lutter contre les ravageurs, car j’utilise des variétés de [plantes] locales. »

Madalitso Zulu est la coordonnatrice du projet Face-to-Face. Elle soutient que l’utilisation de plantes pour lutter contre les ravageurs est simple. Les feuilles des plantes comme l’oignon et le piment qui sont amers et sentent fort rebutent les organismes nuisibles.

Madame Zulu explique : « Ce qui arrive, c’est que certains ravageurs fuient l’odeur forte tandis que d’autres qui mangent [généralement] les légumes n’y parviennent pas à cause du goût amer du mélange que les agriculteurs pulvérisent sur les légumes. »

Palamila Lufeyo cultive de la moutarde, du chou, des tomates et d’autres légumes dans le village voisin de Tchingira. Il a cessé de pulvériser les pesticides chimiques provenant des magasins à cause de leurs effets secondaires.

Monsieur Lufeyo explique : « Les pesticides ont des effets néfastes parce qu’ils sont dangereux. Quand nous consommons des légumes sur lesquels des pesticides chimiques viennent d’être pulvérisés, nous avons des maux de ventre. Pour éviter les maladies, j’ai commencé à utiliser différentes plantes comme moyens traditionnels de lutte contre les ravageurs dans mon potager. »

Les agriculteurs et les agricultrices peuvent minimiser les effets secondaires des pesticides chimiques en suivant les instructions figurant sur les étiquettes des pesticides authentiques. L’étiquette indique à l’agriculteur ou à l’agricultrice le moment idéal pour appliquer le pesticide, et le temps d’attente à observer entre la dernière application du produit chimique et la consommation des légumes. Les paysans et les paysannes peuvent également consulter un(e) agent(e) de vulgarisation.

Violeti Godwe est une veuve du village voisin de Dima. Elle affirme ne pas avoir les moyens de débourser 3 000 kwacha malawites (4,10 $ US) pour acheter une bouteille de pesticide chimique pour combattre les fausse-teignes des crucifères et les pucerons dans son jardin potager.

Elle ajoute qu’après le décès de son mari, les choses n’ont pas été faciles. Elle était incapable de cultiver assez de légumes pour nourrir sa famille parce qu’elle était incapable de maîtriser les ravageurs. Mais, déclare-t-elle : « Après avoir appris à utiliser différentes plantes pour combattre les insectes nuisibles aux légumes, j’ai recommencé à cultiver différents légumes pour ne plus avoir de problèmes de nourriture chez moi. »

Madame Mdima avait l’habitude de troquer du maïs contre des légumes pour préparer ses repas, mais maintenant la situation s’est améliorée, car elle a des légumes en abondance dans son potager.

Elle ajoute : « Je vends quelques légumes à d’autres personnes qui n’ont pas de jardins, et j’utilise l’argent pour acheter des provisions telles que le savon et le sucre. Tout cela a été possible parce que j’utilise des [plantes] comme un moyen abordable de lutter contre les ravageurs dans mon jardin. Je conseille désormais aux agriculteurs de ma région de commencer à cultiver des légumes suivant cette technique. »

Photo: Mary Mdima