Éthiopie : Des agricultrices et des agriculteurs tirent profit d’une émission radiophonique interactive

| avril 20, 2015

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Shibrie Daddy descend un chemin étroit qui la mène de sa basse-cour bien entretenue vers ses planches d’oignons. Les minuscules pousses d’oignon forment un carré de gazon frais sur le chaume doré qui reste après qu’elle a récolté ses quatre hectares de teff et de blé.

Après avoir vérifié que les fossés d’irrigation sont en bon état, Mme Shibrie se rend sur un champ d’oignons plus grand où on y trouve également du chou pommé. Elle observe les légumes pendant quelques instants, puis choisit quelques pieds de chou qu’elle vendra au marché aujourd’hui.

Shibrie Daddy devant son champs d’oignons et de choux. Photo: Paddy Roberts

De retour chez elle, Mme Shibrie chasse deux chiens somnolant à l’ombre de sa véranda, puis récupère une radio de couleur jaune brillante sur une étagère dans sa maison. Aujourd’hui, elle doit enregistrer l’émission agricole Miso magona (Développement agricole). » Son groupe d’écoute composé uniquement de femmes se réunira demain matin à 7 h pour se mettre à jour par rapport aux dernières nouvelles agricoles et aux conseils nutritionnels diffusés par Legedadi, leur station de radio locale.

Mme Shibrie explique : « Nous discutons de la façon dont ce que nous avons appris a fonctionné dans nos champs et nous écoutons pour entendre nos voix. »

Dehors, un des chiens aboie d’une voie paresseuse, annonçant l’arrivée de Belay Tegene, l’agent de vulgarisation agricole local. Mme Shibrie lui offre une chaise, et lui verse à boire un verre de tella. Elle brasse elle-même la bière mousseuse avec des céréales et du houblon traditionnel. Son goût frais et de calcaire fait de cette bière le parfait rafraîchissement lorsqu’il fait chaud.

M. Belay est membre du réseau des agent(e)s de vulgarisation qui travaille avec l’équipe de réalisation de Miso magona. Il raconte : « Les agricultrices et les agriculteurs ont décidé de ce qui devait être abordé au cours de l’émission. La série a commencé par des informations sur les semis en ligne, et a expliqué comment différents pesticides conviennent à différentes cultures. Maintenant que la récolte des céréales est terminée, l’émission se concentre sur les cultures irriguées, dont la salade, les légumes verts et les oignons. »

Il existe dix groupes d’écoute dans la région voisine de Dukem, une petite ville située à environ 40 kilomètres à l’est d’Addis-Abeba. Les groupes sont composés soit uniquement d’hommes, soit uniquement de femmes. Ils ont été créés dans le cadre d’un projet financé par Irish Aid qui fait la promotion des meilleures pratiques agricoles et d’une meilleure alimentation.

Aregash Tadesse est membre du groupe d’écoute Odanabe, basé dans un village environnant. La mère de huit enfants soutient que les membres de son groupe écoutent beaucoup plus activement les émissions depuis qu’elles ont commencé à se réunir toutes les semaines. Elle déclare : « Nous partageons nos expériences en tant que groupe, non seulement en ce qui concerne l’agriculture, mais également en ce qui a trait aux travaux domestiques comme la cuisine et la garde des enfants. »

Wossenie Abebe est la présidente du groupe Odanabe. Elle se réjouit particulièrement de ce que l’émission lui apprend sur l’alimentation. Elle raconte : « J’avais l’habitude de cultiver des pois chiches, mais je ne savais pas qu’ils contenaient beaucoup de protéines. Désormais, je sais comment faire du pain. J’avais … l’habitude de les griller pour les consommer comme amuse-gueule, mais j’ai appris qu’ils sont meilleurs lorsqu’on les fait cuire dans une sauce que je mange avec mon injera [une sorte de crêpes faites à base de teff]. »

Plusieurs agricultrices et agriculteurs qui écoutent Miso magona ne font pas partie de groupes d’écoute, mais seuls les membres des groupes peuvent participer à l’émission et être interviewés pour que leurs voix soient diffusées.

Mme Wossenie raconte : « Nous organisons régulièrement des réunions durant lesquelles les membres des groupes se réunissent pour discuter de ce qu’ils ont entendu et ce qu’ils désirent entendre. Nous voulons que l’émission aborde la question des mauvaises herbes la prochaine fois, car plusieurs d’entre nous avons des problèmes avec les mauvaises herbes. »

Mme Shibrie a planté des céréales en rangs durant la dernière saison et sa récolte a été multipliée par presque six. Elle déclare : « J’aimerais gagner assez d’argent pour construire un magasin en ville. » Mais elle a une préoccupation. Avec le sourire, elle explique : « Nous écoutons les autres groupes à la radio, ce doit être notre tour la prochaine fois! »