Burkina Faso: La sélection des semences locales est une pratique ancestrale encore d’actualité (écrit par Adama Zongo pour Agro Radio Hebdo au Burkina Faso)

| février 28, 2011

Téléchargez cette nouvelle

Hadarou Déné est agriculteur. Il vit et travaille à Tanama V2, un village situé à cent quarante kilomètres de Ouagadougou, la capitale du Burkina Faso, un pays sahélien au cœur de l’Afrique de l’Ouest. M. Déné cultive principalement le maïs, le sorgho et le coton. Depuis cinq ans, le service d’encadrement agricole met à sa disposition des semences améliorées. « Ce sont les semences de maïs et de coton que nous recevons du service départemental de l’agriculture. Nous avons de bons rendements avec ces semences-là », dit-il.

De tous les temps, les semences ont été au cœur des préoccupations des agriculteurs. Elles représentent l’espoir de regarnir le grenier la saison suivante et d’assurer une certaine sécurité alimentaire. « Qu’allons-nous devenir demain? À quoi serviront nos greniers s’il n’y a pas de semences? », s’écrie M. Déné. 

Le service d’encadrement agricole ne distribue pas de semences de sorgho. Comme les autres paysans du village,  M. Déné utilise les semences traditionnelles. « Les semences de sorgho sont celles que nous avons héritées de nos parents. Chaque année, nous utilisons ces semences » déclare-t-il. Ce sont des semences locales que M. Déné prend le temps de sélectionner dans son champ, au moment de la récolte. « Avant de récolter le sorgho, je parcours mon champ et je choisis les gros épis qui sont bien mûrs et  bien secs. Je les coupe avec beaucoup de précaution pour ne pas perdre de grains », confie-t-il, l’air jovial.

Il fait ainsi, chaque année, une provision de semences qu’il garde dans le grenier. « Je les garde soigneusement dans le grenier, au-dessus des grains destinés à la consommation ». M. Déné est conscient que des parasites peuvent attaquer le grenier mais « ils ne pourront pas atteindre les semences qui y sont entreposées », fait-il remarquer. Cependant, le grenier n’est pas traité de sorte à être préservé des attaques de parasites. M. Déné est plutôt confiant. « C’est vrai que nous n’utilisons pas de produits antiparasites pour protéger nos récoltes. Des parasites peuvent y avoir accès. Mais ce n’est qu’une infime quantité de grains qu’ils détruiraient », s’empresse-t-il d’ajouter.

Quant à Salfo Dabré, un autre agriculteur du village, il fait le tri afin de récupérer les bons épis indemnes de contamination, après la récolte. Il en fait des gerbes qu’il suspend à une branche de l’arbre qui se dresse au milieu de sa cour. Depuis des années, il répète ce geste sans se soucier de perdre un jour ces semences qu’il a repérées parmi tant d’autres. « Je procède ainsi pour conserver mes semences. Elles n’ont jamais été détruites par les charançons et autres insectes nuisibles. Mes parents faisaient ainsi. Aujourd’hui, je fais comme eux », confie-t-il avec assurance.

Tout comme M. Déné, M. Dabré conserve ses récoltes dans des greniers. Mais M. Dabré semble redouter la construction d’un grenier. « Il faut du bois, de l’eau, de la terre pétrie, des briques en terre, de la paille et que sais-je encore pour construire un grenier. Que de matériaux à rassembler! », lâche-t-il. Les agriculteurs de Tanama V2 continuent d’utiliser les semences locales de sorgho.  Les méthodes de sélection et de conservation sont, certes, empiriques mais elles restent éprouvées. En attendant que la recherche propose de nouvelles variétés de sorgho aux habitants de Tanama V2, la pratique ancestrale continue son petit bonhomme de chemin dans le village.