Afrique de l’Ouest : Les femmes ont plus à craindre de leurs propres maris que d’hommes en armes (IRIN)

| juillet 16, 2012

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Un récent rapport de l’International Rescue Committee (IRC) dit que dans les pays d’Afrique de l’Ouest accablés par des conflits, les maris constituent souvent une plus grande menace dans la vie de leurs femmes que les assaillants armés.

Même dans les pays plus stables, il demeure difficile d’éradiquer la violence faite aux femmes.

Mariam Kamara est une agente de mobilisation au bureau sous-régional de l’ONU en Afrique de l’Ouest. Elle dit : « La violence domestique, c’est comme le diabète. C’est une maladie qui tue et cause du tort, mais qui n’a pas été très bien documentée. »

Le rapport de 2012 a trouvé que les femmes subissent des cruautés à une « fréquence choquante » en Côte d’Ivoire, au Libéria, et en Sierra Leone, tous ces pays ayant subi des conflits.

Le rapport dit que « bien que la préoccupation principale de la communauté humanitaire ait souvent été les groupes armés, la menace primaire pour les femmes d’Afrique de l’Ouest n’est pas les hommes en armes ou les étrangers, c’est leurs propres maris ».

Ces trois pays d’Afrique de l’Ouest se remettent de conflits qui ont tué des milliers de gens, déplacé des centaines de milliers d’autres personnes, et ont donné lieu à une anarchie généralisée. La violence faite aux femmes empire en temps de guerre et persiste souvent après la fin d’un conflit.

En Côte d’Ivoire, les rapports de cas de violence faite aux femmes a augmenté de 40 pour cent durant les troubles de 2010 qui ont suivi les élections présidentielles dont les résultats avaient été contestés.

L’auteur du rapport, Elisabeth Roesch, dit que la violence domestique n’est pas unique à une région ou à un pays particuliers, et ses causes sont variées et complexes. Elle poursuit :  « Tout autour du monde, les femmes font face à des violences infligées par leurs partenaires parce qu’elles ont un statut inférieur, et parce qu’elles font l’objet d’une discrimination généralisée qui fait partie intégrante de la loi, de la société et de certaines cultures. »

Le Sénégal a adopté une loi contre la violence domestique en 1999, mais seulement une poignée de contrevenants ont été traduits en justice. Les experts disent que cela est dû à la difficulté d’obtenir des preuves, aux coûts des rapports médicaux, et aux préjugés à l’égard des femmes qui font que ces dernières se retiennent de rapporter des abus.

Benjamin Ndeye est un médiateur sénégalais impliqué dans la résolution de conflits. Il dit : « Dans la société sénégalaise, il est très important pour une femme d’être mariée. Si une femme traîne son mari devant les tribunaux, on dira que ce n’est pas une bonne femme. » Les femmes ont souvent affaire à des juges qui favorisent l’unité familiale. M. Ndeye dit qu’il n’a jamais vu de mari violent recevoir une sentence de plus de deux mois.
Elisabeth Sidibè est bénévole au Comité pour Combattre la Violence faite aux Femmes et aux Enfants, au Sénégal. Elle dit que les choses se sont améliorées ces dernières années : « Les policiers ont fait beaucoup de progrès -ils ont maintenant tendance à référer les femmes aux ONGs. »
Fatou Bintou Thioune est la coordinatrice du Comité. Elle dit : « Nous ne pouvons pas dire que le problème n’est plus un tabou… de plus en plus de femmes osent chercher de l’aide. »

Certaines ONGs ont fait passer la lutte contre la violence domestique à l’étape supérieure en diffusant des discussions à la radio et à la télé, et en organisant des débats publics et des formations relatives aux questions légales. L’Association des Femmes Juristes Sénégalaises offre de l’assistance légale aux femmes et a créé un service d’assistance téléphonique pour leur permettre de rapporter les actes de violence domestique.

Mais il y a eu moins de progrès en Sierra Leone, au Libéria ou en Côte d’Ivoire. Le rapport de l’IRC a mentionné une femme qui s’est plainte de la complaisance de policiers envers la violence domestique. Cette femme a dit : « Certains officiers de police ont dit : « C’est à cause de tes sales manières que ton mari te frappe. » »

Fanta Coulibaly dirige la Commission Nationale contre la Violence Domestique faite aux Femmes et aux Enfants, en Côte d’Ivoire. Elle dit que les abus domestiques persistent, bien qu’il existe une loi contre ceux-ci. Elle déclare : « La loi seule ne suffit pas. Il faut que la communauté toute entière s’implique dans cette problématique. »