3. République Démocratique du Congo: les hommes et les femmes Bushi délaissent l’agriculture (Syfia Grands Lacs)

| novembre 24, 2008

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Tout le long de la montagne Mitumba, dans le Sud-Kivu, en République Démocratique du Congo, les champs étaient jadis pleins des cultures vivrières. Les femmes et les hommes faisaient pousser des bananes, du maïs, du sorgho, du riz, des pois, du soja, de la patate douce et du taro – produisant suffisamment de nourriture pour leur famille et même de petits surplus qu’ils vendaient au marché.

Aujourd’hui, c’est un tout autre scénario. Le matin, dans un village du Sud-Kivu, sept hommes se réunissent aux alentours de 9 heures. Ils jouent à un jeu de billes appelé sombi et boivent du kasikisi, une bière de bananes locale. Vers la fin de la matinée, ils sont ivres.

De telles scènes sont fréquentes à travers la région de Bushi, dans le Sud-Kivu. À Mushekere, un village juste en dehors de Bukavu, il y a quelques 279 hommes mariés. Un seul de ces hommes travaille la terre aux côtés de son épouse. Dans le village voisin de Kanoshe, seuls trois hommes passent la majeure partie de la journée dans les champs avec leurs épouses.

Martin Nshagi est le chef du quartier de Kasha, à Bukavu. Il dit que les hommes ont abandonné leurs champs, découragés par les faibles profits qu’ils faisaient en tant qu’agriculteurs. La surexploitation et l’érosion ont réduit la fertilité des sols et les intrants agricoles sont difficiles à trouver. M. Nshagi dit que le résultat en est que de moins en moins de personnes font pousser suffisamment de nourriture pour nourrir leur famille.

Sur le marché, les prix des produits alimentaires ont augmenté. Les aliments de base comme le manioc, le maïs et les haricots sont importés d’autres régions du pays. Le sac de 1,3 kg de haricots, qui se vendait 800 CDF (environ 1,4 dollar américain ou 1,1 euro) en avril, coûte désormais 1300 CDF (environ 2,3 dollars américains ou 1,8 euros).

De plus en plus de femmes mettent également leurs outils agricoles de côté. Elles disent qu’elles ne peuvent pas travailler la terre toutes seules, et tendent à se tourner vers la pisciculture ou l’apiculture. Kasole Sifa s’est tournée vers l’apiculture. Elle dit que c’est beaucoup moins de travail que l’agriculture. Une fois que la ruche est construite, sa seule tâche est de creuser un peu autour de la ruche, de temps en temps, pour tenir les fourmis et autres insectes à l’écart. L’année dernière, la ruche de Mme Kasole a produit plus de 200 kilos de miel, ce qui lui a permis de gagner l’équivalent de 1000 dollars américains (environ 770 euros).

Dans les zones plus éloignées de la côte, la pisciculture est de plus en plus populaire. L’élevage de tilapia est une activité rentable. Les dirigeants locaux s’inquiètent, cependant que même des activités lucratives telles que l’apiculture et la pisciculture ne pourront remplacer la valeur de la production locale des cultures vivrières, qui sont nécessaires à la sécurité alimentaire locale. Certaines cultures qui exigent un travail intense, telles que celles de la patate douce et du manioc, ont presque disparu de la région.

Jean-Pierre Bahizire est président d’une association d’agriculture et d’apiculture à Mudaka. Il dit que les hommes doivent être encouragés à retourner à la terre pour éviter une catastrophe alimentaire.
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