Mark Ndipita | mai 23, 2016
Par une matinée venteuse et très fraîche, Rosina Magalasi se lève tôt pour préparer de la bouillie pour son mari et son petit-fils. Elle jette un coup d’œil dans le panier de farine de maïs et réalise immédiatement qu’il lui faudra plus de farine pour le dîner et le souper de sa famille. Elle abandonne l’idée de préparer la bouillie, s’empare d’une manchette, et se précipite vers le champ d’à côté pour cueillir des épis du maïs.
Elle va les égrener rapidement, les fera sécher au soleil et écrasera les graines pour assurer les trois repas de sa famille ce jour-là.
Mme Magalasi et sa famille vivent dans une maison d’une pièce à Mlubwira, un village situé à environ 45 kilomètres, au nord-ouest de Lilongwe, la capitale du Malawi. Elle affirme que sa plus grande crainte c’est que la pénurie de vivres soit pire que celle de l’année dernière.
Elle a déjà commencé à égrener et faire sécher le maïs récolté cette année pour nourrir sa famille, bien que les épis ne soient pas suffisamment mûrs pour la récolte et le moulin. Au Malawi, les agriculteurs et les agricultrices conservent normalement leur maïs pendant des mois, durant lesquels les épis ont le temps de sécher parfaitement. Toutefois, Mme Magalasi et d’autres agriculteurs et agricultrices font sécher et moudre leur maïs afin de pouvoir le consommer plus tôt.
Mme Magalasi affirme que cela fait longtemps que sa famille s’essouffle à cultiver le maïs, la denrée de base du pays. L’an dernier, elle a eu une faible récolte en raison des précipitations irrégulières et des périodes sèches qui ont frappé durement sa région. Elle explique : « En 2015, ma maisonnée n’avait plus de quoi manger en septembre déjà. Le problème est que ma famille vit de l’agriculture. Avec les effets du changement climatique, nos récoltes de maïs ont diminué ces dernières années. »
L’année dernière, Mme Magalasi a récolté six sacs de maïs sur son champ d’une acre et demie. Elle déclare : « Cette année sera difficile, car ma famille s’attend à moissonner moins de cinq sacs de maïs étant donné que nous avons commencé à faire sécher du maïs [pour notre consommation] en avril cette année. »
Lenia Mankhambila est une autre agricultrice du village de Mlubwira qui fait sécher du maïs pour être sûre que sa famille aura du nsima (repas à base de maïs) à manger chaque jour. Elle dit que vu que tout le monde récolte en même temps actuellement, elle peut acheter un sac de maïs de 50 kilogrammes à 8 $US. Cependant, le coût augmente considérablement en dehors de la période de récolte.
Jeni Maxwell est également originaire du village de Mlubwira, et elle n’échappe pas à la menace de la faim. Elle déclare : « Je n’ai d’autre choix que de récolter, d’égrener et de faire sécher le maïs disponible dans mon champ. Au moins, pour l’instant, ma famille peut manger des repas complets chaque jour. Entre décembre dernier et février de cette année, la nourriture se faisait rare et il nous arrivait de sauter des repas à cause de la flambée du prix du maïs. »
Mme Maxwell soutient qu’en raison des mauvaises pluies d’autres agriculteurs et agricultrices de son village ont très peu de denrées à récolter. Elle déclare : « Je pressens que d’ici août prochain, ma famille et plusieurs autres familles d’ici n’auront plus de maïs. »
Cela pourrait priver sa famille de son aliment de base jusqu’en mai ou juin prochain, lorsque le maïs sera à nouveau prêt pour la récolte.
Mme Magalasi affirme qu’il arrivait parfois que les membres de sa famille aillent se coucher sans manger lorsque leur réserve de maïs était quasiment épuisée. Elle craint que la même situation se reproduise cette année. Elle déclare : « Le problème est que mon mari et moi sommes très âgés, si bien que nous sommes incapables de mener d’autres activités génératrices de revenus pour avoir de quoi acheter du maïs. Nous dépendons de notre fille qui réside en Afrique du Sud et qui nous envoie de l’argent, mais elle ne nous en envoie pas régulièrement. »
Mme Magalasi implore le gouvernement et les organisations internationales de leur apporter une aide alimentaire cette année avant que le pire ne survienne, et pour éviter de revivre l’expérience de l’année dernière. Elle déclare : « Le gouvernement et les organismes de secours doivent se préparer pour aider des gens comme moi qui éprouvent toujours des difficultés quand survient la faim. Le fait que nous ayons déjà commencé à récolter, égrener et faire sécher le peu de maïs que nous avons pour notre consommation signifie que nous aurons moins de maïs à conserver, et que nous n’échapperons pas à la faim. »