Sougou Penda Ngane | mai 26, 2025
Nouvelle en bref
À l’aube, Seynabou Diatta et son groupement de femmes « Yoon Ndiofor », dans le delta Saloum, au Sénégal, sont occupés à ramasser des huîtres et à protéger leur écosystème le long de berges bordées de mangroves. Face aux menaces du développement industriel, le groupement mène la restauration des mangroves et des campagnes de sensibilisation depuis 2007, ce qui lui a permis de restaurer plus de 20 hectares et de reconstituer les populations de poissons. Leurs efforts ralentissent l’érosion, procurent de meilleurs moyens de subsistance et renforcent le leadership des femmes. Seynabou Diatta, la présidente du groupement, affirme que les mangroves sont vitales : « Les mangroves sont notre bouclier naturel. »
Il fait tranquillement jour sur le delta de Saloum, dans la région de Fatick, au Sénégal, à environ 150 kilomètres de Dakar. Le soleil se lève lentement, jetant une lueur dorée sur les eaux calmes. Le long des berges, des femmes travaillent déjà d’arrache-pied, ramassant des huîtres accrochées aux racines des palétuviers. Parmi elles se trouve Seynabou Diatta, 56 ans, la présidente du groupement des femmes GIE « Yoon Ndiofor », qui signifie « ensemble pour servir nos communautés, » et qui est basé dans le village de Nemebah. Ce groupement est formé de 58 femmes et de deux hommes, et est membre de la fédération « And Defar Nimbato », un réseau de 52 villages dans la municipalité de Toubacouta, ainsi que de la Fédération nationale des groupements d’intérêt économique de pêche du Sénégal. Madame Diatta déclare : « Les mangroves sont notre source de vie. Nous les protégeons comme des bébés. »
Face aux menaces grandissantes pour les mangroves et l’écosystème côtier, notamment celles provenant de l’exploitation industrielle du gaz et du pétrole, les femmes de la région ont pris des mesures pour protéger ces cadres vitaux et préserver les avantages qu’ils offrent. Depuis 2007, grâce au soutien de l’Institut de recherche pour le développement (IRD) et l’ONG Enda Graf Sahel, elles mènent des campagnes de reboisement des mangroves et d’ensemencement d’arches au sein des communautés de Dionewar, de Niodor, de Falia et de Simal. Ces initiatives communautaires réussissent à mobiliser des communautés entières autour de la cause de la protection de l’environnement. Pour renforcer leur impact et assurer la collaboration, les femmes ont créé une brigade visant à promouvoir un soutien mutuel et une action collective. Madame Diatta déclare : « Ici, les femmes sont unies. Lorsque certaines sont occupées, les autres prennent le relais. »
Outre le reboisement, les femmes sensibilisent également les communautés à l’importance de la protection des mangroves. Madame Diatta explique : « Nous disons aux responsables communautaires que c’est grâce aux mangroves que les poissons peuvent se reproduire. » Ces campagnes de sensibilisation permettent de mobiliser les jeunes, les pêcheurs et les anciens. La présidente du groupement ajoute que les discussions avec le chef de village de Nemebah ont permis d’adopter des règles communautaires pour la récolte et l’utilisation des ressources provenant des mangroves. Il existe des périodes précises pour la récolte et des périodes de repos biologique. Un comité mixte de surveillance, composé de femmes, d’hommes et de responsables de la direction des pêches, a été constitué, en vue de sanctionner la coupe illégale des palétuviers.
Fatou Ndoye, coordonnatrice du secteur agroalimentaire à Enda Graf Sahel, souligne le rôle crucial des mangroves pour la biodiversité et la résilience des communautés locales, car elles fournissent un habitat essentiel à la reproduction des poissons. Elle ajoute que les feuilles des palétuviers jouent un rôle important dans la baisse de la salinité des sols, ce qui rend le sol adapté pour le maraîchage. Selon Ndoye, non seulement les mangroves constituent un atout sur le plan écologique, mais elles sont également un pilier central pour l’organisation et le leadership des femmes du delta de Saloum.
La mobilisation des femmes produit déjà des résultats tangibles. Aux dires de madame Diatta, les campagnes de reboisement ont permis de restaurer plus de 20 hectares de mangroves, ouvrant la voie pour le retour d’espèces précédemment disparues, telles que le Thiof, un type de mérou très prisé. L’érosion côtière a ralenti, et les bolongs, les chenaux bordés de mangroves, fonctionnent plus efficacement. Les femmes récoltent maintenant les bénéfices des écosystèmes plus sains, et ont accès au poisson et à d’autres ressources naturelles.
Ils vendent des sous-produits, tels que le bois, le poisson, les crabes et les huîtres, ce qui leur permet d’avoir des revenus plus stables et de mieux subvenir aux besoins de leur famille. Elle ajoute que les palétuviers offrent plusieurs avantages : chaque partie, de la feuille à la racine, possède des vertus pour la santé. Les efforts de restauration ont permis de ralentir l’avancée de la mer et de réduire les inondations dans certaines zones. Sur le plan économique, les femmes bénéficient désormais de revenus plus stables grâce à une meilleure utilisation des produits de la mangrove. Leur statut au sein de la communauté s’est également renforcé grâce à leur rôle central dans la gestion des ressources naturelles. « Les mangroves sont notre bouclier naturel, » conclut Madame Diatta. En protégeant cet écosystème, les femmes du delta du Saloum protègent aussi leur avenir, leur culture et l’équilibre d’un territoire où l’eau, la terre et la vie sont intimement liées.