Nelly Bassily | mars 3, 2014
Revenant de la brousse avec un sac rempli de fourrage à son dos, Halimatou Ibrahim rentre dans son enclos, pour nourrir sa dizaine de chèvres. Les bêlements de chèvre commencent aussi tôt qu’elle dépose un tas d’herbes sèches au milieu de l’enclos. Elle remplit d’eau le vase servant d’abreuvoir aux animaux et elle referme l’enclos. Ces gestes, Mme Ibrahim les répètent à tous les jours depuis près de deux ans.
Cette mère de six enfants habite le village de Guidan Roumdji, dans le sud du Niger. En 2011, elle et une cinquantaine d’autres femmes, ont reçu quatre chèvres et un bouc géniteur dans le cadre d’une opération de distribution gratuite de chèvres au profit des femmes issues de ménages vulnérables. Le gouvernement a donné les animaux à ces femmes afin de les aider à générer leur propre revenu.
Mme Ibrahim raconte : « Cette activité a changé ma vie et celle de ma famille. L’année dernière au mois de mai avant le début de la campagne agricole, j’avais vendu huit chèvres ». Sur le marché, chaque chèvre est vendue à entre 20 000 et 25 000 francs CFA (entre 40 à 50 dollars américains). Mme Ibrahim a utilisé l’argent issu de cette vente pour acheter du mil et du maïs, ce qui a permis à sa famille de traverser la période de soudure.
Par le passé, Mme Ibrahim ne pratiquait aucune activité régénératrice de revenus. Elle dépendait entièrement de son mari. Mais depuis qu’elle détient des chèvres, elle a acquis une indépendance financière.
Après l’achat de nourriture, le reste de l’argent lui permet de faire face aux petites dépenses quotidiennes. Elle achète des huiles pour la cuisine, du sel, du savon, du lait caillé et même des habits pour elle et pour ses enfants, sans attendre que son mari lui vienne en aide. « L’année passée, j’ai même payé un matelas à ma nièce qui s’est mariée », confie-t-elle fièrement.
Plusieurs femmes au Niger ont reçu des chèvres gratuitement pour faire le petit élevage. Le gouvernement a distribué des chèvres dans huit régions du pays. Dans chaque village, le choix des femmes bénéficiaires se fait à la place publique en présence du chef du village et des agents de l’État chargé de l’opération.
Dans chaque village où cette opération a eu lieu, des comités de suivi composés des villageoises et des techniciens de l’élevage ont été mis en place pour veiller à ce que ces chèvres soient bien élevées. Le comité identifie aussi prochain groupes de femmes qui doivent bénéficier du projet.
Maman Sani est membre du comité. Elle explique : « Des noms de femmes sont proposés et [les membres du comité] valide [celles qui recevront des chèvres] en fonction de la vulnérabilité du ménage d’où elles sont issus ».
Tiémogo Seyni est agent d’élevage à Niamey. Il dit que cette initiative a beaucoup contribué à lutter contre la pauvreté chez les femmes rurales au Niger. Il explique : « La chèvre est une espèce animale qui peut mettre bas deux fois par an. Et l’argent provenant de la vente des petits contribue à la sécurité alimentaire des familles ».
La priorité pour Mme Ibrahim est d’acheter des céréales pour sa famille car la campagne agricole de 2013 a été déficitaire au Niger. Elle compte vendre sept chèvres avant le début de la saison agricole.