Mali: S’unir pour mieux produire la fumure (écrit par Innoussa Maïga, pour Agro Radio Hebdo au Mali)

| janvier 24, 2011

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Adama Sanogo est un paysan qui vit à Namposséla, à 440 km au sud de Bamako, la capitale du Mali. En ce début de saison sèche, la trentaine de concessions de Namposséla est balayée par les rafales de l’harmattan. En l’absence d’une végétation touffue, le vent ne rencontre aucun obstacle.

Cette année pourtant, les récoltes ont été bonnes pour M. Sanogo. Ses greniers sont pleins de maïs, de sorgho et de petit mil. Cela, il le doit à la fumure organique. Depuis 6 ans, M. Sanogo produit de la fumure organique. La production de la fumure n’est pas nouvelle dans le hameau. Cependant, l’organisation du travail est inédite!

Une trentaine de paysans se sont regroupés pour s’entraider à tour de rôle. Ce travail en commun minimise la pénibilité de la tâche. Avant, les paysans devaient creuser leurs propres fosses, les remplir, tourner et arroser leur contenu. En plus d’être fatiguant, ce travail prenait beaucoup de temps. Actuellement, seul l’arrosage est la responsabilité du propriétaire de la fosse. Les autres tâches se font en commun.

Aujourd’hui le groupe se rend chez Khalifa Dembélé, un paysan qui veut creuser une nouvelle fosse pour le prochain hivernage. Les membres du groupe délimitent ensemble l’emplacement de la fosse, non loin d’un puits, de sorte à faciliter l’arrosage. Les coups de pioche pleuvent. Les hommes se relaient sans que l’ardeur ne faiblisse. Après trois heures de travail, la fosse est à moitié creusée.

Les producteurs la rempliront toutes les deux semaines avec des résidus. Dans 4 mois, la fumure sera à point. M. Dembélé et ses amis pourront l’apporter au champ à l’aide de charrettes. Cette solidarité est salutaire pour les paysans. M. Dembélé témoigne: « Avec l’érosion des sols, nous sommes obligés de produire de la fumure organique. Mais une seule personne ne peut en produire en quantité. Il nous faut travailler ensemble comme nous le faisons. »

L’ancienne méthode de production a quelque peu varié. Les dimensions de la fosse ont été augmentées. La longueur est passé de 4 à 10 mètres. La profondeur est maintenant de 1,5 mètre. La largeur atteint 5 mètres. Des piquets de bois sont plantés à un mètre l’un de l’autre dans la fosse. Ils sont utilisés pour remuer régulièrement la fumure, afin de permettre une bonne aération.

M. Sanogo explique le reste du processus de production: « Nous remplissons la fosse progressivement, à des intervalles de deux semaines, avec des résidus de cultures. Nous tassons chaque nouvel apport de résidus avec nos pieds. Nous y ajoutons également des ordures ménagères. Nous procédons ainsi jusqu’à remplir la fosse. J’arrose la fosse chaque semaine pour faciliter la décomposition ». Les producteurs versent aussi des déjections animales dans la fosse.

Grâce à ce travail solidaire, la production de la fumure a nettement augmenté, dans la région. Cette année, la seule fosse de M. Sanogo a donné 8 tonnes de fumure. Elle lui a permis « d’enfumer » 3 hectares sur les 12 qu’il possède. Certains paysans ont produit jusqu’à 10 tonnes.

Les sols de Namposséla avaient besoin de cet apport en fumure. La région est une ancienne zone cotonnière. La culture intensive et les intempéries ont lessivé les champs. Dans les années 90, les rendements avaient baissé considérablement. Ils oscillaient entre 2 et 3 tonnes par hectare pour le maïs et le mil. Cette année, M. Sanogo a récolté 7 tonnes de maïs par hectare.

Avec de tels rendements, à Namposséla, le dicton « l’union fait la force », n’est pas une formule vide de sens.