George Kalungwe | avril 17, 2017
Assise à l’ombre de sa maison recouverte d’un toit de chaume, Achipera Nankambi se rappelle comment elle avait l’habitude d’écouter une émission radiophonique intitulée Dotolo wa Chinagwa pa Wailesi (Médecin du manioc à l’antenne) qui passait à la radio communautaire de Nkhotakota.
L’émission a démarré en septembre 2016, une période où beaucoup de producteurs et productrices avaient abandonné la culture du manioc à cause d’une maladie ayant rendu cette culture peu rentable.
Mme Nankambi est une cultivatrice de manioc, member de l’association paysanne Chitontho, dans le district de Nkhotakota, dans la région du centre du Malawi. Elle n’a jamais raté un épisode de l’émission radiophonique. Elle déclare : « L’émission était importante pour les agriculteurs et les agricultrices, … car une maladie étrange appelée mosaïque du manioc attaquait cette culture. »
Mme Nankambi cultive le manioc sur deux hectares de terre. En 2005, elle a perdu toute sa production lorsque la maladie de la mosaïque est apparue la première fois dans sa région. Au cours des années suivantes, ses récoltes sont restées faibles, car elle ne savait pas comment combattre la maladie, et elle n’avait accès à aucun(e) agent(e) de vulgarisation agricole.
La situation a changé en octobre 2016 après le lancement de l’émission Cassava Doctor on Air. L’émission était devenue sa première source d’information concernant cette maladie.
Cassava Doctor on Air était une initiative de Farm Radio Trust et de diverses autres organisations. L’émission portait sur la prévention de la maladie de la mosaïque et informait les agriculteurs et les agricultrices de l’importance de déterrer les plants infectés et de planter des boutures saines. Elle leur expliquait également où ils pouvaient se procurer des variétés exemptes de maladies et hâtives telles que le Sauti qui résiste à la maladie de la mosaïque.
Mme Nankambi se rappelle : « Nous avions l’habitude de nous asseoir en cercle autour de la radio que nous avait remis [Farm Radio Trust]. Les messages que nous entendions dans l’émission nous encourageaient à nous intéresser aux moyens de lutte contre la maladie. »
Mme Nankambi explique que grâce à l’émission radiophonique, elle récolte maintenant plus de manioc. Elle ajoute : « Avant, je subissais de grosses pertes parce qu’il m’arrivait de déterrer la moitié du champ en essayant de lutter contre la maladie. »
L’association paysanne Chitontho a également aidé les agriculteurs et les agricultrices à combattre la maladie en relatant leurs expériences à l’antenne. Les membres de l’association s’enregistraient eux-mêmes lorsqu’ils discutaient de ce qu’ils avaient entendu à l’émission et envoyaient la cassette à la station de radio. La station diffusait leurs voix durant les épisodes suivants.
Hassam Kalimanjira est un autre producteur de manioc à qui l’émission radiophonique a profité, même si ce n’était pas par le simple fait d’écouter. Les agriculteurs et les agricultrices appelaient ou envoyaient des messages SMS à la station de radio pour demander des informations. Par conséquent, la station a mobilisé des experts pour répondre aux questions des cultivateurs et des cultivatrices.
Mr. Kalimanjira déclare : « Ça nous a permis d’obtenir des informations immédiates sur la production de manioc. Lorsque nous observions quelque chose d’étrange dans nos champs, nous appelions ou [envoyions un SMS à] simplement la station. Cela poussait les conseillers agricoles à visiter nos champs et nous conseiller en conséquence. »
Edward Kuwacha Banda est le responsable de la radio communautaire de Nkhotakota. Il affirme que l’émission avait eu du succès, car les agriculteurs et les agricultrices étaient impliqués de différentes manières dans la réalisation. Il explique : « En plus de nous faire part de leurs impressions, les producteurs et les productrices contribuaient également à la conception des messages diffusés dans l’émission. »
Mr. Banda ajoute : « Au studio, nous avions un(e) agent(e) de vulgarisation agricole pour répondre aux questions des agriculteurs et des agricultrices par téléphone ou par [SMS]. Après chaque émission, on leur demandait d’appeler ou [de nous envoyer un message] pour nous dire ce qu’ils avaient appris. De cette façon, nous savions qu’ils nous écoutaient et suivaient réellement ce qui était diffusé. »
Stellia Mangochi est l’agente chargée de la protection des cultures du district de Nkhotakota et une des spécialistes impliqués dans le projet. Elle affirme qu’elle s’inquiète de l’arrêt de diffusion de l’émission. Elle explique : « Cette émission nous aidait vraiment. Nous avons peu d’agent(e)s de vulgarisation agricole … mais la radio touchait plusieurs personnes à la fois. »
Mme Nankambi soutient que, grâce à l’impact de l’émission radiophonique, la production de manioc dans sa région retrouve tout doucement sa gloire d’antan.
À ses dires, le problème des agriculteurs et les agricultrices actuellement c’est de trouver un marché pour leurs excédents de récoltes. Elle déclare : « J’ai un surplus du manioc que j’ai récolté l’an dernier. Nous vendons notre production à très bas prix et en très petites quantités. Nous vendons simplement pour avoir de l’argent pour subvenir à nos besoins quotidiens. »
Le présent article a été produit avec le soutien de CABI Plantwise par l’entremise de Farm Radio Trust.
Photo : Agriculteur du district de Nkhotakota, Malawi