Côte d’Ivoire : Des communautés s’organisent pour protéger l’écosystème en plantant des mangroves

| octobre 30, 2023

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Nouvelle en bref

Alphonse Akadié inspecte les premiers semis de palétuviers qu’il a plantés il y a quelques jours, car les orages et les vagues fortes pourraient les endommager. Sa coopérative, Scoop-Hozalem, regroupe les communautés locales de Lahou Pkanda, en Côte d’Ivoire, pour planter des palétuviers afin de restaurer l’écosystème côtier qui est en train de se détériorer à cause du changement climatique, de la déforestation et des mauvaises pratiques culturales. Il déclare : « Si on ne s’organise pas pour restaurer les forêts de mangroves, les eaux vont nous engloutir un jour. » Grâce à ses efforts visant à sensibiliser le public et à faire pression sur les autorités locales, la coopérative a obtenu une interdiction de coupe des palétuviers dans 30 villages et camps rattachés à Lahou Kpanda. Les discussions de groupe ont lieu lors de rencontres officielles ou après les travaux champêtres pour sensibiliser. La coopérative organise également des visites dans les villages qui ont déjà adopté de bonnes pratiques.

En ce début de matinée du mois de septembre, le ciel sombre annonce l’imminence d’une pluie à Lahou Pkanda, une commune du sud-est de la Côte d’Ivoire. Lahou Pkanda est une presqu’île longeant le golfe de Guinée, à environ 20 kilomètres de Grand-Lahou, dans la région des Lagunes. Vêtu d’un tricot orange et d’un jean délavé, Alphonse Akadié surveille ses premiers semis de palétuviers qu’il a plantés il y a quelques jours, car un orage et des vagues fortes pourraient les endommager.

Monsieur Akadié est le président de la coopérative Scoop-Hozalem depuis 2000. Scoop-Hozalem regroupe les communautés de Lahou Pkanda pour planter de mangroves afin de restaurer l’écosystème côtier qui se dégrade à cause du changement climatique, de la déforestation et des mauvaises pratiques culturales.

Monsieur Akadié soutient qu’il était initialement opposé à l’idée de la restauration des mangroves, car, à l’instar d’autres membres de la communauté, il ne comprenait pas leur importance. Mais, aujourd’hui, lui et les autres en sont de plus en plus conscients et plantent les mangroves. Il ajoute :« Si on ne s’organise pas pour restaurer les forêts de mangroves, les eaux vont nous engloutir un jour. »

Monsieur Akadié soutient que son initiative est partie d’un simple constat. Depuis plusieurs années, l’érosion côtière menace les villages de Lahou Kpanda. Les eaux de l’océan montent et les ressources halieutiques se raréfient à cause de la destruction des mangroves. Il a donc créé sa coopérative pour sensibiliser les populations sur l’intérêt de planter et de préserver les mangroves. Monsieur Akadié déclare : « Aujourd’hui, ils savent que les mangroves ont un lien avec la reproduction des poissons par exemple, donc on a décidé de surveiller le plan d’eau et de renforcer la mangrove. »

Grâce à ses efforts de sensibilisation des populations et de plaidoyer auprès des autorités locales, la coopérative a obtenu l’interdiction de couper de la mangrove dans les 30 villages et campements rattachés à Lahou Kpanda pour préserver l’écosystème. Des discussions de groupe sont organisées à l’occasion de rencontres formelles ou après les travaux champêtres pour faire de la sensibilisation. La coopérative organise également des visites dans les villages qui ont déjà adopté de bonnes pratiques. Monsieur Akadié estime que de plus en plus, les mentalités ont commencé à changer grâce à l’implication des leaders communautaires. Il explique : « Nous avons fait comprendre aux villageois, le lien entre les mangroves et la production de poissons pour les persuader de planter et de protéger la mangrove. »

L’action de Scoop-Hozalem a convaincu les pêcheurs qui apportent leur contribution à la sensibilisation pour la sauvegarde des mangroves à Lahou Kpanda. Michel Segui est le président de la société coopérative des artisans pêcheurs Walè. Walè signifie « Ensemble nous surmonterons les difficultés », en langue Avikam. La coopérative compte aujourd’hui 75 membres qui sensibilisent les communautés à préserver les mangroves. Monsieur Segui explique : « Si on retrouve quelqu’un avec du bois de mangrove, il paye une amende de 100 000 FCFA [environ 160 $ US] et on confisque son [bateau]. »

Les membres de la communauté observent un renouvellement des populations de poissons dans les villages de Brafèdon, Groguida et Likpilassié, qui ont bénéficié de la plantation de palétuviers. Les communautés ont constaté le retour des poissons. Ces changements ont convaincu les gens du village.

Serges Sougohi est le président de l’ONG Afrique Verte qui sensibilise la population sur l’importance des mangroves. Selon monsieur Sougohi, les facteurs humains jouent un rôle dans la destruction de la mangrove, avec de graves conséquences pour les êtres humains et l’écosystème. Il ajoute : « La destruction des forêts de mangroves pour le bois de chauffage, pour fumer du poisson et pour l’agriculture expose les retenues d’eau à la pression accrue. » Pour lutter contre la dégradation de l’écosystème côtier, la préfecture a signé un arrêté d’interdiction de la coupe des mangroves. Toutefois, monsieur Sougohi estime que malgré cet arrêté, des individus continuent à détruire les mangroves. La coupe régulière a fait perdre plus de 500 hectares de mangroves dans la localité.

Malgré ces difficultés monsieur, Akadié soutient que les initiatives locales de protection et de restauration de la mangrove ont produit de bons résultats. Scoop-Hozalem a restauré 12 hectares sur 15 envisagés dans son programme. Il conclut : « Si nous ne voulons pas disparaître, nous devons restaurer l’écosystème. »