Zimbabwe : Création d’une association paysanne pour soutenir les éleveurs de crocodiles

| novembre 14, 2016

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Des dizaines de crocodiles sont vautrés, la gueule grande ouverte sur une surface en béton près d’étangs d’eau froide. Les gros reptiles sont enfermés et rassemblés en fonction de leur âge et leur race. Il n’est pas donné à tous, et surtout pas aux âmes sensibles, de pouvoir élever avec succès des crocodiles, et cela nécessite une bonne assise financière.

Au Zimbabwe, l’élevage de crocodiles a longtemps été la chasse gardée des éleveurs blancs. Les éleveurs locaux s’en étaient abstenus par manque d’intérêt et de connaissances techniques. Élever des crocodiles est un tabou dans certaines cultures du pays et, comme l’animal tue et dévore les êtres humains, il est souvent associé à la sorcellerie.

Malgré tous ces obstacles, Tawanda Ndaruza élève des crocodiles. Avec d’autres éleveurs de crocodiles chevronnés et débutants, des aquaculteurs, des financiers et des marchands, ils ont formé l’association Croc n’Reptile Farming pour permettre aux membres de partager leurs expériences et promouvoir l’élevage de crocodiles au Zimbabwe.

croco

Il affirme que l’association a été créée en vue d’aider les éleveurs à surmonter les obstacles qu’ils rencontrent au niveau de la commercialisation. De nombreux éleveurs manquent souvent d’argent pour acheter les aliments des crocodiles.

L’association a entamé les démarches pour se faire enregistrer en tant que coopérative en vue de faciliter la commercialisation et l’obtention des fonds. Toutefois, elle fait plus qu’apporter une aide au niveau de la commercialisation. M. Ndaruza déclare : « Cette association offre une assistance à toutes les étapes de l’élevage de crocodiles. »

Tawanda Tsanga élève des crocodiles et calibre des peaux. Il est également membre de l’association, et il insiste sur le besoin de former des coopératives pour permettre aux éleveurs de partager les coûts, les responsabilités et les expériences. Il déclare : « Les coopératives comportent des avantages supplémentaires. Elles permettent de faire des démarches auprès des banques pour demander du financement, car tous les membres sont responsables et ont l’obligation de rendre des comptes pour les fonds qui leur sont accordés. »

M. Tsanga explique que pour élever des crocodiles, les éleveurs ont deux options. Ils peuvent, soit demander un permis pour récolter les œufs de crocodiles et fouiller les berges où ces bêtes se reproduisent, soit, s’ils ont de l’argent, acheter des œufs chez d’autres éleveurs, ou à la direction des parcs nationaux qui vend les œufs à 6 $US l’unité. À ses dires, les éleveurs utilisent des incubateurs pour faire éclore les œufs, même si certains éclosent naturellement.

M. Ndaruza affirme que pour élever des crocodiles il faut de l’eau en permanence dans les barrages, les lacs, les rivières pérennes ou d’autres cours d’eau, et qu’il fasse toujours chaud. Il peut s’avérer difficile de mettre sur pied une entreprise d’élevage de crocodiles si les conditions ne sont pas réunies. Il ajoute : « [Ce] n’est pas étonnant qu’on trouve beaucoup de fermes d’élevage de crocodiles près des chutes Victoria, à Kariba, Binga, Mwenezi et Chirundu. Ce sont des régions chaudes où il y a de l’eau. »

L’alimentation pose également problème, car la grande partie des aliments sont importés d’Afrique du Sud. Selon M. Tsanga, les crocodiles doivent être continuellement nourris et surveillés si on veut obtenir des peaux de bonne qualité. Il déclare : « J’ai calibré les peaux de crocodiles pour les clients mexicains, européens, asiatiques et africains…. Vous ne pouvez pas abattre les crocodiles si la qualité de leur peau et leur taille ne correspondent pas aux spécifications du client. »

Il explique que les éleveurs qui nourrissent leurs crocodiles avec des aliments de mauvaise qualité doivent les garder plus longtemps pour s’assurer qu’ils ont la bonne taille et que leur peau est de bonne qualité. Il ajoute : « Les élever plus longtemps signifie que vous devrez trouver plus d’aliments pour eux, ce qui augmentera vos coûts de production. »

La viande de crocodile peut rapporter beaucoup d’argent. Jacob Musasa, un autre membre de l’association, vend la viande de crocodile à Harare, la capitale zimbabwéenne. M. Musasa achète le kilo de viande de crocodile à 1,50 $US chez les éleveurs de crocodiles, et le revend entre 2,75 $US et 3 $US.

Il explique : « J’ai exercé cette activité pendant trois mois, mais les bénéfices sont incroyables. Je suis spécialisé dans la vente de viande de gibier, mais c’est la viande de crocodile qui me rapporte le plus de bénéfices, environ 150 %. »

M. Tsanga est heureux de voir les éleveurs zimbabwéens produire des peaux de crocodile de haute qualité et de noter une augmentation du nombre d’éleveurs de crocodiles. Il déclare : « Le présent est radieux pour ceux qui élèvent des crocodiles, et je reste certain que l’avenir sera plus radieux. »