Burkina Faso : La communication comme clé de sensibilisation aux grossesses précoces

    | août 19, 2019

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    Au Lycée provincial Lompolo Koné de Banfora, dans la région des Cascades, au sud-ouest du Burkina Faso, on assiste à un éveil à l’enjeu des grossesses précoces. Les parents et les éducateurs sont sur le qui-vive face à ce phénomène croissant.

    Adjara Yao était une de ces nouvelles mamans. Elle est en classe de 6e au Lycée provincial Lompolo Koné de Banfora. Elle a 16 ans et a un bébé de trois mois. Titulaire d’un Certificat d’études primaires élémentaires (CEPE), elle a réussi son concours d’entrée en sixième, quatre mois après le décès de sa mère. Elle dit : « J’étais heureuse d’être au lycée et tout se passait bien avec l’apprentissage de ma nouvelle langue, l’anglais. »

    Puis, elle rencontra le père de son enfant sur la route de l’école – un élève en classe de seconde. Après un seul rapport sexuel, Adjara vit sa vie basculer. Elle échoua à l’école et ses relations avec son père se dégradèrent.

    Deux mois après l’interruption de ses règles, Adjara se rendit au centre de santé où on lui confirma ses soupçons. Elle informa aussitôt son copain. Cette nouvelle rebute le géniteur, comme le relate la jeune mère : « Il a catégoriquement refusé de reconnaître sa responsabilité en me disant d’aller chercher le père de mon enfant ailleurs, prétextant qu’il avait utilisé un préservatif. Il reconnaîtra plus tard, sous la menace de mon père qui m’obligea à aller vivre avec lui. »

    Dans cette région, quand les jeunes filles deviennent enceintes, les conséquences sont multiples pour elles : la déscolarisation, l’exclusion des événements familiaux et sociaux, les reproches et les critiques, et parfois même le suicide. Souvent, elles subissent des moqueries et les avortements clandestins sont risqués. Les paternités contestées et les enfants abandonnés compliquent encore plus les choses.

    Quelques organisations de la société civile burkinabé travaillent à réduire le taux de grossesses précoces. Le Réseau Africain Jeunesse Santé et Développement est un réseau qui fait la promotion de la santé et du développement des jeunes. Il initie des jeunes aux concepts clés de la santé sexuelle et reproductive, et ses 30 clubs organisent des causeries éducatives dans certains établissements scolaires.

    Avec leurs pairs éducateurs, les jeunes abordent des thèmes tels que le VIH et le sida, les grossesses précoces, le tabagisme, l’alcoolisme, la gestion des menstrues et le civisme

    Le soutien des parents et des éducateurs est important pour le succès, ce qui explique pourquoi le réseau a développé le concept des « champions ». Madame Haoua Zabré est la coordonnatrice régionale du réseau et elle décrit les qualités importantes d’un champion : « Le champion se définit par sa disponibilité, son engagement à écouter, orienter, sensibiliser, et soutenir les adolescents et les jeunes. C’est quelqu’un à qui ceux-ci peuvent se confier facilement, pour avoir une réponse aux questions qu’ils se posent sur leur sexualité et tout autre problème lié à leur âge. C’est un parent modèle. » Les champions suivent également des formations pour renforcer leurs compétences.

    Mariam Bamba en est une parfaite illustration. Elle est censeure au Lycée provincial Lompolo Koné de Banfora. Pour elle, la solution au taux élevé de grossesses précoces ne réside pas seulement dans la sensibilisation des enfants. Elle explique sa stratégie : « De nos jours, les enfants ont besoin qu’on leur explique le comment et le pourquoi des choses et non se limiter seulement aux interdits. De ce fait, en plus des campagnes de sensibilisation, il faut impliquer les parents dans l’éducation sexuelle des enfants. »

    Ainsi, cet organisme de santé burkinabé compte sur l’accompagnement des parents. Selon madame Bamba, parler de sexualité avec les enfants ne doit plus être un tabou, car leur vie et leur avenir en dépendent.

    Grâce à son aptitude à garder le secret et son esprit d’ouverture, elle est proche des jeunes. Elle déclare : « Je ne les juge jamais pour avoir de rapports sexuels, mais je les mets en garde de prendre des mesures de protection, au cas où ils ne peuvent s’abstenir afin d’éviter non seulement des grossesses, mais également des maladies ou des infections. »

    Ces champions et ces clubs contribuent au dialogue visant à combler l’absence de cours sur l’éducation sexuelle dans le programme éducatif, l’insuffisance de séances de sensibilisation, et la non-implication des parents dans ce sujet. Avec un peu de chance, les discussions engendreront un changement chez les jeunes adolescentes qui ne subiront plus probablement les multiples conséquences de devenir enceintes.

    Cette nouvelle a été produite avec l’appui du gouvernement du Canada dans le cadre du projet « Promouvoir les droits de la santé sexuelle et reproductive, et la nutrition chez les adolescents au Burkina Faso (ADOSANTE). » Le projet ADOSANTE est piloté par un consortium formé par Helen Keller International, Marie Stopes-Burkina Faso (MS/BF), Radios Rurales Internationales, le Centre d’information de Conseils et de Documentation sur le Sida et la Tuberculose (CICDoc) et le Réseau Afrique Jeunesse Santé et Développement (RAJS).