Ghana : Dix mille reines mères reprennent le pouvoir et opèrent un changement (Trust)

| janvier 18, 2016

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Au Ghana, près de 10 000 reines mères récupèrent leur pouvoir ancestral et opèrent un changement social et économique au profit des femmes et des enfants du pays.

Au Ghana, chaque ville et village a une « famille royale », dont les membres descendent de la première famille qui s’y est installée. Choisies parmi ces familles, les reines mères sont les gardiennes des traditions culturelles, et sont principalement chargées de s’occuper des femmes et des enfants de leurs communautés. Il s’agit d’une tradition exceptionnelle méconnue. Comme l’explique une reine mère : « On nous appelle reines mères, car en tant que reines, nous sommes les partenaires des chefs, et en tant que mères, nous prenons soin de toute la communauté. »

La tradition des reines mères a perduré pendant des siècles au sud du Ghana et dans d’autres pays africains, de même que la chefferie, un modèle de gouvernance qui existait avant l’avènement de la colonisation. Les reines mères étaient respectées et puissantes. Cependant, les colons ont contourné les femmes leaders pour négocier uniquement avec les chefs. C’est ainsi que les femmes ont perdu de leur influence. Après les indépendances, en 1957, les nouvelles autorités ont exclu les reines mères des institutions représentant les régions, et leurs rôles ont pris une forme plus cérémoniale. Les chefs, quant à eux, ont continué d’exercer une grande influence sur le plan social, politique et économique.

Toutefois, les reines mères ont récemment commencé à réclamer une modernisation de leur rôle traditionnel. Elles acquièrent un nouveau savoir et forment des réseaux avec leurs collègues d’autres pays africains. Ensemble, elles jouent un rôle de plus en plus important dans la lutte que mène le continent pour l’éducation des filles et contre les mutilations génitales féminines, le mariage précoce, la pauvreté et d’autres problèmes.

On surnomme les reines mères Pognamine dans la Région du Haut Ghana occidental, une immense région rurale pauvre, dotée de très peu d’infrastructures, et où la terre appartient aux hommes qui prennent toutes les décisions.

Dogkudome Tegzuylle I est sage-femme dans la ville de Lawra, et elle est la Pognaa (reine mère) de Lyssah, un village de 1 200 habitant(e)s. Elle déclare : « Notre principal problème, c’est la pauvreté, surtout chez les femmes. Nos hommes sont difficiles. Ils ne soutiennent pas leurs femmes. »

La situation est la même dans d’autres communautés. Maabuara Sandua I est la Pognaa de Nanyaare, une communauté voisine. Elle explique : « Regardez autour de vous, les femmes forment la grande majorité des habitant(e)s de nos villages. Plusieurs de nos hommes meurent jeunes parce qu’ils boivent et ne prennent pas soin d’eux-mêmes, laissant ainsi des veuves derrière eux. D’autres laissent leurs femmes et leurs enfants se débrouiller seuls. »

Pour aider les femmes à subvenir à leurs propres besoins, les reines mères ont mis sur pied de petits projets d’activités génératrices de revenus grâce aux ressources naturelles dont disposent leurs communautés, telles que le beurre de karité. Elles ont créé des groupements de fabrication de savon, d’apicultrices et de coiffeuses, ainsi que des coopératives informelles de crédit, dénommées susus.

Anita Sutha est une jeune enseignante au collège. Elle déclare : « La pognaa a créé la susu, car nous ne pouvons pas attendre l’aide des bailleurs de fonds ou de l’État. Elle a payé pour que je puisse me rendre au Canada pour suivre des cours sur le leadership, la communication et l’évaluation de l’impact de la santé. En retour, je forme désormais d’autres femmes. »

Elle soutient que, même si les femmes avaient l’habitude de dépendre de leurs maris pour tous leurs besoins, maintenant, elles peuvent gagner leur vie et avoir de l’argent pour leurs enfants et elles-mêmes. Elle ajoute : « Avant, on n’associait pas les femmes aux prises de décisions. Maintenant, on les écoute. »

Tegzuylle I est décidée à impliquer les hommes dans la vie communautaire. Elle déclare : « J’ai dit que tout le monde devait venir aux rencontres et y participer, aussi bien les femmes, les hommes, les enfants, et ils commencent à venir. Nous commençons à voir tout doucement un changement : les gens comprennent que les hommes et les femmes peuvent interagir et échanger les idées. La situation s’améliore tout doucement. »

Chaque reine mère a sa propre vision et ses priorités pour sa communauté. Il y a des émissions sur le changement climatique, l’éducation des filles, les grossesses chez les adolescentes, l’assainissement, le VIH, la formation de revenu, etc.

Tegzuylle I balaie d’un geste de la main son village et les champs qui l’entourent. « J’ai grandi ici, » dit-elle. « Je connais la plupart des femmes et je connais leurs problèmes. Je veux faire une différence. Je veux être un vrai leader. »

Pour lire l’intégralité de l’article duquel provient cette histoire intitulée « Les formidables reines mères du Ghana : 10 000 femmes extraordinaires reprennent leur pouvoir et opèrent un changement », cliquez sur : http://www.trust.org/item/20151218102419-eo2kt/?source=reBlogs