Beth White | décembre 21, 2015
Zaina Issakungu est assise sur une chaise en plastique verte au fond de la petite salle de conférence dans la ville de Singida, au centre de la Tanzanie. L’agricultrice de 48 ans passe généralement ses journées dans le village éloigné de Msisi, où elle s’occupe de son champ de sorgho et de maïs. Mais, ce matin, un groupe de radiodiffuseuses, de radiodiffuseurs, de fonctionnaires et de spécialistes du développement sont venus entendre Mme Issakungu parler de violence conjugale.
Quelques oiseaux gazouillent dans les arbres situés à l’extérieur, sinon la salle est silencieuse et tous les yeux sont rivés sur Mme Issakungu pendant qu’elle raconte son histoire.
Mme Issakungu chérissait son mari, même s’il la battait chaque jour. À cause des raclées, elle était obligée de passer la nuit dehors la plupart du temps et demandait souvent de la nourriture à ses voisins pour ses six enfants.
Elle raconte : « En 2002, j’ai décidé de partir. Je n’avais aucun vêtement, et j’étais vraiment pauvre. »
Mme Issakungu a empaqueté quelques affaires dans un petit sac et a quitté la maison. Cette nuit, elle a dormi dans la rue avec son bébé. Elle s’est rendue à la police le lendemain. Son mari a été condamné à six mois de prison.
Il a épousé une autre femme dès sa libération. Cependant, six mois plus tard, il est tombé malade et sa nouvelle épouse l’a quitté. Mme Issakungu s’est occupée de lui jusqu’à sa mort.
Désormais, elle doit subvenir seule aux besoins de sa famille. Mais, au moins, aucun mari ne lui rend plus la vie difficile.
Felix Maigo est l’agent d’aide social du conseil de quartier de Singida. Il aide les femmes victimes de violence conjugale, en leur apportant un soutien psychologique et des conseils et en menant des actions en justice.
M. Maigo déclare : « Lorsque vous retracez la source de la violence envers les femmes, vous vous rendez compte que cela est lié au fait qu’elles ne sont pas indépendantes financièrement. » Il explique que selon les traditions locales, les femmes s’occupent de la majeure partie des activités agricoles, mais ne reçoivent pas leur juste part des bénéfices.
Il déclare : « Avant il y avait des travaux pour les hommes et des travaux pour les femmes … [Mais] nous avons commencé à enseigner aux gens que les hommes et les femmes sont égaux et que tous les membres de la société peuvent être exercés [la plupart] des métiers. »
M. Maigo croit que les renseignements agricoles permettront aux femmes d’être plus indépendantes financièrement. Il espère que l’inclusion des femmes dans les émissions agricoles diffusées par les radios communautaires aidera les femmes à connaître leurs droits et la façon dont elles peuvent participer aux activités génératrices de revenus.
Il ajoute : « Les hommes doivent [aussi] s’impliquer, car la violence envers les femmes n’est pas acceptée par la société et le gouvernement n’encourage pas la violence envers les femmes. »
Pili Athumani est une agricultrice qui participe à la rencontre. Elle parle de femmes maltraitées dans son village qui doivent voler de la nourriture pour subvenir aux besoins de leurs familles.
Sans complexe, Mme Athumani déclare : « Je n’ai pas peur [de m’exprimer]. Je veux que les hommes soient justes en matière d’agriculture, qu’ils partagent équitablement ce qu’ils produisent. »
Mme Issakungu compte sur son petit lopin de terre pour subvenir aux besoins de ses enfants. Jusqu’à présent, sa ferme lui a rapporté peu ou presque pas de bénéfices, et elle lutte pour payer les frais de scolarité. La saison dernière, elle a récolté seulement trois sacs de sorgho sur son quart d’hectare.
Toutefois, elle ne se décourage pas. Elle a appris beaucoup de choses grâce aux informations agricoles diffusées à la radio et elle croit que l’espoir est permis.
Elle veut que son expérience aide d’autres femmes, et elle les encourage à parler de leurs problèmes. Mme Issakungu déclare : « Une femme doit se faire entendre, car, avant tout, c’est son droit. [En faisant entendre] leurs voix,… les femmes [peuvent] trouver des solutions pour améliorer leurs conditions de vie. »
Cet article a été publié à l’origine le 24 août 2015.