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Zimbabwe : Les filles en difficulté face à l’augmentation des mariages d’enfants en raison du COVID-19 (Gender Links)

Grace Ndlovu, 14 ans, gagnait sa vie en vendant des fruits sauvages et des chenilles du mopane aux automobilistes. Mais elle rêvait de devenir une scientifique, et d’étudier la chimie pour fabriquer des médicaments et des remèdes pour soigner les gens et ravitailler les cliniques en manque de fournitures.

Elle savait qu’elle ne pourrait pas réaliser son rêve, car ses frais de scolarité étaient payés par une organisation locale, et son professeur(e) lui avait dit qu’elle pouvait devenir tout ce qu’elle voulait.

Elle a ressenti sa plus grande joie lorsqu’elle a réussi à ses examens de fin de cycle du primaire et a été acceptée par le Lycée Whitewater du district de Matobo, dans le Matebeleland Sud. Un uniforme et des fournitures ont été fournis et l’organisation a payé ses frais. Son enseignant(e) du primaire lui a fait ses adieux et lui a souhaité bonne chance. Même sa mère était contente. Elle eut la chance de porter de nouvelles chaussures d’école pour la première fois quand elle démarra son premier trimestre au secondaire.

Mais la joie de madame Ndlovu fut de courte durée. Un confinement national exigé par la pandémie du COVID-19 obligea les écoles à fermer avant même qu’elle puisse passer ses premiers examens du secondaire.

Le COVID-19 a compromis la vie de plusieurs enfants et leurs familles, avec le confinement qui a entraîné la fermeture de toutes les écoles, affectant ainsi le quotidien et les systèmes d’aide aux enfants. En plus, les mesures qui ne tiennent pas compte des besoins sexospécifiques et des vulnérabilités des jeunes femmes et des filles peuvent accroître le risque d’exploitation sexuelle à leur niveau, y compris le mariage des enfants.

En attendant la fin du confinement, il était prévu que madame Ndlovu soit mariée à un responsable d’une église local, de même qu’une autre fille de la localité. Une dot a été payée et son père en difficulté était ravi d’avoir une bouche en moins à nourrir.

Cependant, des chefs traditionnels vigilants de la communauté sont venus au secours des filles et leurs mariages ont été interrompus.

Aujourd’hui, madame Ndlovu a une seconde chance de faire une carrière en chimie. Pour l’instant, elle écoute à la radio des cours organisés par l’UNICEF avec ses jeunes frères et les aide à faire leurs devoirs.

Mais ce ne sont pas toutes les épouses-enfants qui sont chanceuses comme elle. Plusieurs jeunes filles ont dû interrompre leurs études à cause de la pandémie actuelle, alors que l’école est un lieu de refuge pour plusieurs jeunes.

De plus, la pauvreté s’est aggravée et certaines familles choisissent de marier leurs filles pour les sauver de la faim et d’autres déboires économiques causés par la pandémie.

Les spécialistes et les défenseur(e)s des droits des enfants affirment que la pandémie pourrait infléchir certains gains enregistrés par le maintien des filles à l’école et l’assurance qu’elles sont protégées des vices sociaux tels que le mariage des enfants. Le Zimbabwe a interdit les mariages d’enfants en 2016.

Priscilla Misihairambwi Mushonga est une défenseure des droits des petites filles et la responsable du portefeuille parlementaire de l’éducation. Selon elle, la pandémie du COVID-19 a entraîné l’augmentation du taux du mariage des enfants, car beaucoup plus de filles sont données en mariage, même si peu de mariages sont signalés. Elle ajoute que les grossesses précoces ont augmenté également.

Elle explique : « Lorsque les écoles sont ouvertes, les écoliers sont proches de leurs enseignants qui, non seulement leur enseignent les calculs, l’histoire et d’autres matières, mais leur donnent également des conseils et la bonne éducation sexuelle. »

Elle s’inquiète du fait que les épouses-filles sont privées de leur avenir, et déclare : « Les enseignants et le reste de la communauté scolaire sont loin de savoir si un membre de leur classe manque à l’appel pour pouvoir faire des enquêtes. Par conséquent, les mariages d’enfants surviendront en toute quiétude et tranquillement. »

Le confinement empêche beaucoup de ménages ruraux d’avoir des moyens de subsistance, et plusieurs ont peu à manger. Par conséquent, le lobola, ou dot, est tentant, car cela réduit le nombre de bouches à nourrir par une famille. À l’instar de la famille de Ndlovu, de nombreuses personnes choisissent de donner leurs filles, quel que soit l’avenir brillant qu’elles pourraient avoir.

Nomzano Sibindi est coordonnatrice du développement des femmes dans le district de Matobo. Elle invite le gouvernement à appliquer des mesures de riposte sensibles au genre et investir plus de ressources dans la santé sexuelle et de la reproduction, qui dit elle est souvent négligée pendant les pandémies.

Un rapport de l’UNICEF publié en avril a prévu que la pandémie pourrait entraîner 13 millions de mariages d’enfants supplémentaires dans le monde au cours de la prochaine décennie.

La présente nouvelle est adaptée de l’article « Girls vulnerable as COVID-19 drives child marriage » initialement écrit par Andile Tshuma et publié par Gender Links. Pour lire l’intégralité de l’article, cliquez sur : https://genderlinks.org.za/news/girls-future-at-stake-as-covid-19-drought-drive-child-marriages/ [1].

Photo: Une école au Malawi qui a participé au projet Radios Rurales Internationales, 2014. Credit: Farm Radio International