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Tanzanie : Leçons apprises des séquelles de la maladie de la mosaïque du manioc

Après avoir passé 40 ans à cultiver du manioc, Rajabu Ritaku se souviendra toujours de la maladie qui a obligé certains agriculteurs et agricultrices à abandonner cette culture.

M Ritaku a toujours vécu à Mlandizi, une commune de la région côtière tanzanienne, où le manioc pousse bien. Le manioc, appelé muhogo en swahili, est l’aliment de base de 1,1 million de personnes vivant dans cette région. Cependant, au milieu des années 90, les producteurs et les productrices de manioc de cette localité ont été victimes d’une maladie envahissante qui a totalement détruit ce tubercule. Il s’agit de la maladie de la mosaïque du manioc.

M Ritaku affirme que la maladie avait été particulièrement éprouvante, car les producteurs et les productrices ignoraient ce qui tuait leurs plantes. Il déclare : « Au départ, j’ai mis ça sur le compte des retards de récolte. Il m’arrivait parfois de penser que mes cultures avaient été envoutées, ou maudites par des magiciens.

Il ajoute : « Nous pensions que la longue sécheresse, les récoltes tardives ou les effets du changement climatique sur le sol en étaient la cause. On croyait que les nouvelles conditions climatiques réchauffaient le sol et apportaient des produits chimiques ou des parasites qui tuaient le manioc. »

Les cultures et les moyens de subsistance des agriculteurs et des agricultrices en ont souffert parce que ces derniers manquaient d’informations, auxquelles ils n’eurent accès qu’après avoir participé à des programmes de formation une année après que la maladie a détruit leurs champs de manioc. M. Ritaku est actuellement membre de l’Association paysanne Mshikamano, une des associations qui exploitent une parcelle de démonstration de manioc, à environ 80 kilomètres de Dar es Salaam.

Halima Kitunda préside une autre association paysanne dénommée Umoja, et dont les membres travaillent sur une parcelle de démonstration de manioc dans la municipalité de Mlandizi. Elle soutient qu’ils avaient fini par savoir ce qui tuait leur manioc. Mais, elle déclare : « Lorsque nous avons entendu d’autres collègues affirmer que la maladie de la mosaïque du manioc était une maladie grave qui tuait le manioc, on ne nous a pas expliqué comment il fallait la combattre. »

Les producteurs et les productrices ne savaient pas comment détecter les symptômes ou comment empêcher la maladie de se propager. Cela a provoqué des conflits entre les cultivateurs et les vendeurs de manioc. Plusieurs agriculteurs et agricultrices vendaient aux commerçant(e)s la récolte de tout un champ, et avaient leurs propres calendriers de récolte. De nombreux commerçant(e)s ignoraient l’existence de la maladie de la mosaïque du manioc jusqu’à ce qu’ils aient récolté et vu les tubercules en décomposition. Ils étaient choqués de voir des racines qui pourrissaient, sentir une odeur nauséabonde, et découvrir un regroupement de mouches. Il leur était impossible de vendre ces produits agricoles infectés.

Mme Kitunda affirme avoir subi des pertes financières considérables, à l’instar de plusieurs collègues. Toutefois, un autre agriculteur, Mwanahamis Kidamane, lui a porté rapidement secours. Les deux agriculteurs ont nourri leurs familles avec leur récolte et ont pu obtenir un petit revenu avec lequel ils ont payé des fournitures scolaires et des médicaments.

Les producteurs et les productrices de la région côtière ont été informés sur la maladie de la mosaïque du manioc en 2000, mais la Tanzanie en avait déjà souffert pendant des années. Filbert Nyinondi est le coordonnateur national du Forum ouvert sur la biotechnologie agricole. Il explique que les formations ont démarré seulement après que des pénuries alimentaires inquiétantes ont été signalées.

Il déclare : « Le problème était extrêmement grave, d’où la nécessité de mener des actions de grande portée, car la [situation dans la] région du manioc ceinturant la côte, ainsi que le pourtour du bassin du lac Victoria était horrible et [ils] avaient des niveaux de pénuries alimentaires inquiétants. »

Neema Sonje est l’agent de vulgarisation agricole qui supervise et forme les producteurs et les productrices de manioc des associations Mshikamano et Umoja. Ceux-ci reçoivent des messages textes contenant des renseignements sur les moyens de lutte contre les maladies, ainsi que d’autres bonnes méthodes de production du manioc.

Aujourd’hui, les agriculteurs et les agricultrices maîtrisent la maladie de la mosaïque du manioc. Ils utilisent des semences de meilleure qualité et plantent leurs nouvelles cultures à une bonne distance des champs infectés. Ils espèrent également ne plus jamais avoir une telle épidémie.

This story was created with the support of CABI Plantwise through Farm Radio Trust.