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Sénégal : Des agriculteurs fabriquent des pesticides naturels à base de plantes locales

Penda Traoré est une agricultrice de Dianabo, un village situé à sept kilomètres de Kolda, au Sénégal.

Madame Traoré a bénéficié d’une formation sur la fabrication et l’utilisation des pesticides biologiques en 2013.Pour protéger ses oignons, ses poivrons, ses piments, ses choux et son gombo, elle applique un mélange naturel sur le sol avant de démarrer la plantation. Elle mélange notamment une plante locale appelée mankanasso en mandingue ou Icacina senegalensis avec de la cendre et l’écorce de caïlcédrat, appelé également Khaya senegalensis.

L’agriculture est la principale activité génératrice de revenus à Kolda, une zone située dans la région agricole de la Casamance, au sud-ouest du Sénégal. C’est la région la plus arrosée du pays, avec une pluviométrie annuelle de 1 000 millimètres.

Malgré la bonne pluviométrie de la région, les termites, les nématodes, les sauterelles et d’autres organismes nuisibles infestent parfois le sol ou les champs et détruisent les cultures et les plantes. Pour y faire face, certains agriculteurs(rices) de Kolda fabriquent des pesticides biologiques. Ces pesticides sont accessibles et abordables pour les agriculteurs(rices), et moins nocifs que les pesticides chimiques pour la santé humaine et l’environnement.

Madame Traoré fait également partie d’un groupement de femmes de son village. En 2014, son groupement a effectué une visite chez les agriculteurs(rices) de Thiès, à 70 kilomètres de Dakar pour que les groupements puissent apprendre les uns des autres. La visite portait sur les pratiques agricoles biologiques, le compostage et les pesticides organiques.

Madame Traoré explique les techniques qu’elle a appris pendant son séjour à Thiès. Pour traiter une planche de 10 mètres carrés, elle laboure bien la terre à cultiver. Ensuite, elle rassemble deux kilogrammes de feuilles fraîches de mankanasso ou un kilogramme de feuilles séchées de mankanasso pilé, et saupoudre cette superficie avec cela. Les feuilles sont séchées à l’ombre pour conserver toutes leurs vertus.

Elle pile aussi 500 g de feuilles fraîches de caïlcédrat, quelques poignées de feuilles de neem et quelques feuilles d’arbre à soie également appelé pomme de Sodome. Elle déverse le tout sur le champ et l’étale, puis ajoute une couche de cendre. Elle remue la terre avec un râteau, afin qu’elle absorbe le mélange. Enfin, elle arrose bien l’endroit pendant cinq à huit jours avant de planter. Madame Traoré explique : « Cela tue les termites et les nématodes. »

Le mélange de mankanasso permet de combattre les organismes nuisibles du sol. Mais les agriculteurs(rices) de Kolda utilisent plusieurs autres pesticides biologiques pour protéger leurs plantes. Parmi eux, il y a une solution à base de neem.

Souleymane Diao est agriculteur depuis 20 ans. Il chante les louanges du neem qu’il qualifie d’insecticide 100 % naturel : « Toutes les parties du neem peuvent être utilisées. ».

D’après les expert(e)s, ce sont les graines du neem qui ont la plus grande teneur en ingrédients actifs qui combattent les organismes nuisibles, notamment l’azadirachtine qui agit contre plus de 200 insectes.

Cependant, monsieur Diao fait son mélange à partir des feuilles de neem. Pour traiter un champ de 2 500 mètres carrés, soit environ un quart d’hectare, il écrase bien 10 kilogrammes de feuilles de neem, les met dans un grand récipient et y ajoute 40 litres d’eau. Il ferme hermétiquement le récipient et laisse les feuilles macérer pendant trois à quatre jours. Puis, il enlève les feuilles et filtre le mélange, auquel il ajoute, soit de la poudre de piment sec, soit du lait. Pour appliquer la solution, monsieur Diao utilise un vaporisateur ou un arrosoir.

Monsieur Diao explique : « Pour cinq litres, je mets le contenu d’une boite d’allumettes de piment. Cela sert de répulsif aux ravageurs. Si c’est le lait, je mets un demi-litre pour cinq litres. Le lait n’est pas un poison, mais il permet à la solution de se fixer sur les plantes. »

L’avantage des feuilles de neem c’est que contrairement aux graines qui ne sont disponibles de façon saisonnière, les feuilles sont disponibles toute l’année et s’obtiennent gratuitement.

Monsieur Diao traite son champ le soir après l’arrosage, car l’efficacité de la solution diminue avec l’exposition à la lumière du soleil. Dans les zones fortement infestées, il est conseillé d’appliquer la solution deux fois par semaine. Autrement, on peut se contenter d’une application tous les sept à dix jours. La bouillie de neem étant très amère, il est recommandé d’arrêter le traitement trois ou quatre jours avant la récolte.

Ces pesticides biologiques sont facilement accessibles et moins chers pour les agriculteurs(rices) de Kolda, ce qui fait d’eux une méthode très prisée pour lutter contre les organismes nuisibles.

La présente nouvelle a été produite avec le soutien de la Coopération belge pour le développement, Enabel, et le programme Wehubit.