Rwanda: La pêche est aussi un métier de femme (Syfia Grands Lacs)

| juillet 4, 2011

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Une femme qui pagaie et qui pêche ne suscite plus l’étonnement dans l’est du Rwanda. Image inhabituelle sur le lac  Rwakibare: des femmes équipées de gilets de sauvetage oranges pagaient avec vigueur, assises avec des hommes dans des pirogues. Une petite révolution bien acceptée par les hommes.
Les pêcheuses sont heureuses d’exercer une profession qui était auparavant réservée aux hommes. Une femme dit: « Nous commençons à 7 heures du matin et partons vers midi. Après, nous prenons soin des autres activités comme la culture des champs et les travaux ménagers. »

Le lac Rwakibare est un petit lac situé dans le district de Kayonza, dans l’Est du Rwanda, près de la frontière tanzanienne. La plupart des gens qui vivent près du lac viennent d’ailleurs, y compris les anciens réfugiés rwandais qui étaient en Tanzanie ou en Ouganda. Les Rwandais du nord du pays viennent là, en quête de terres. À leur arrivée, certains commencent à cultiver des terres et à élever du bétail. D’autres nouveaux arrivants optent pour la pêche. Et certains sont des femmes.

Fortunée Nyiransabimana est une pêcheuse. Elle dit: « Avant, nous ne pouvions pas nous imaginer qu’une femme puisse faire la pêche. Mais en 2005, nous avons osé [l’essayer]. » Elle ajoute qu’elles n’avaient pas l’intention de rivaliser avec leurs maris, mais de contribuer au développement de leurs foyers. Cependant, ce ne sont pas toutes les femmes qui veulent faire de la pirogue. Une femme de 50 ans déclare: « À mon âge… j’ai préféré vendre du poisson. »

Claudine Mukeshimana, une autre pêcheuse, raconte fièrement son histoire, son gilet de sauvetage sur le dos: « Avant, mon mari pêchait, et moi je restais cultiver. J’avais le complexe d’être une charge pour lui. Alors, je lui ai demandé de m’apprendre son métier. Et voilà que je suis parmi les meilleurs. » Elle dit que les femmes qualifiées sont aussi bonnes que les hommes: « Il y en a qui pêchent plus de poissons que les hommes et peuvent gagner 30 000 francs rwandais (soit 50 dollars américains) par mois, tout en allant aussi travailler dans leurs champs dans l’après-midi. »

Les hommes ne s’y opposent pas. Ildefonso Mugemana remarque: «S’il existe des femmes commerçantes ou entrepreneurs, pourquoi ne pourraient-elles pas aussi faire la pêche? »

Quiconque pêche dans le lac ou vend des poissons a un permis et est membre d’une coopérative. Le président de la coopérative déclare: « Nous avons actuellement plus de 260 membres, dont plus de cinquante femmes. » Tous les membres de la coopérative ont accepté d’autoriser les femmes à s’inscrire. Le président dit: « Pourquoi les femmes devraient-elles compter sur leurs maris pour s’occuper de tout? D’ailleurs, la politique gouvernementale actuelle exige que les femmes soient impliquées dans tous les secteurs, et cela inclut la pêche. »

Les pêcheurs payent une assurance annuelle de 12 000 francs rwandais (soit 20 dollars américains) pour s’assurer contre les accidents. Le président de la coopérative dit: « Il y a trois pêcheurs qui ont peri dans l’eau. Deux d’entre eux ont déjà reçu un million de [francs rwandais] en indemnités. »

Les efforts des femmes sont récompensés. Fortunée dit: « Chaque fois que je vendais des poissons, j’épargnais. Je me suis retrouvée avec des économies de 350 000 francs rwandais (environ 585 dollars US). Avec cet argent, j’ai acheté un champ. » Elle se prépare même à acheter une nouvelle moto.