République Démocratique du Congo: Une victime d’accaparement de terre recouvre ses droits grâce à sa participation à la journée mondiale de la femme rurale

| octobre 12, 2015

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Esperance M’Murhi  s’est mariée à un marchand ambulant à l’âge de 17. Mais son mari était souvent absent pendant plusieurs semaines voire des mois pour ses affaires.

Il y a huit ans, son mari est parti dans le site minier de la province du Maniema dans l’est de la République Démocratique du Congo. Quand la famille du mari n’avait plus de nouvelles du mari après huit mois,  les beaux-frères d’Espérance l’ont alors dépossédé de la terre qu’elle cultivait pour survenir à ses besoins. Dans un premier temps, elle se laisse faire car elle ne sait pas quoi faire.

Puis, lors de la commémoration de la journée mondiale de la femme rurale en 2012, Esperance apprend qu’elle a des droits fonciers.

Avec pour thème central la femme rurale et le foncier, l’événement a été l’occasion pour Esperance de comprendre que non seulement elle avait droit au champ que lui ont ravi ses beaux-frères, mais surtout qu’elle était capable de les revendiquer en commençant par saisir le comite du village de son cas. Elle décide de porter plainte auprès du conseil du village.

Alors qu’elle a décide de porter plainte contre ses beaux-frères, c’est son père biologique qui essaye de l’en dissuader. Espérance se rappelle : « Mon père m’a vivement conseillée de retirer la plainte contre mes beaux-frères sous prétexte que cela risque de jeter un discrédit sur toute sa famille avec comme conséquence pour mes petites sœurs de manquer des fiancées dans le futur. Mais son argument ne m’a pas convaincue et j’ai poursuivi ma lutte à son grand mécontentement ».

Le chef de village a pris l’engagement de recevoir et de remettre dans leurs droits, toutes les femmes victimes d’expropriation illégale de leurs champs. Esperance obtient gain de cause et sa terre lui est restituée.

La belle famille d’Esperance met de fortes pressions pour qu’elle leur redonne la terre. Elle dit : « Ma belle-mère et ses deux garçons me qualifiaient  de sorcière. Ils ont propagé partout dans le village que ce sont mes gri-gri qui sont à l’origine de la disparition de mon mari » Elle murmure: « Ils m’appellent maintenant kasahene ashubala oku bihebe ( la chèvre qui urine sur les boucs ) ».

Oscar Balagizi est le plus jeune des beaux-frères d’Esperance.  Le visage plein fureur, il dit : « Cette sorcière  a utilisé ses gris-gris pour étourdir notre frère afin de s’approprier de ses champs. Nous les lui avons ravis pour qu’elle nous remettre notre frère qu’elle tient toujours en otage »

Esperance n’est pas la seule femme de son village à être déposséder de sa terre. Mapendo Mwa Mudekereza est une voisine veuve depuis cinq ans. Sa belle-famille lui a pris deux des quatre champs de son défunt mari. Lorsque celle-ci a décidé de porter plainte, ses beaux-frères ont convoqué une réunion dans laquelle ils ont décidé unanimement de lui restituer ses champs. La famille voulait éviter l’humiliation vécue la belle-famille d’Esperance.

Le courage d’Espérance est loin d’être commun parmi les femmes et filles qui sont victimes de retrait abusif de terres. Plusieurs refusent encore de porter plainte, par crainte de représailles. D’autres se résignent, ne contestant pas le fait que la coutume donne plus d’importance aux revendications des hommes qu’aux droits des femmes.

Même si Esperance a repris sa terre avec dignité, elle vit en conflit permanant avec ses beaux-frères qui lui en veulent toujours pour avoir porter plainte. Récemment, elle a évité de justesse un conflit avec M. Oscar  Balagizi en disant  « Si tu oses me battre, je ferai rapport au conseil du village pour que chacun de nous réponde de son acte ». Suite à ces mots, M. Balagizi cesse ses menaces.