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RDC: Des agriculteurs testent trois méthodes pour lutter contre la légionnaire d’automne

Sous un soleil de plomb en après-midi, Nzuri Shabani et ses deux filles se promènent dans le champ de maïs de madame Shabani. Les feuilles sont vertes et en santé, ce qui la remplit de joie.

Elle s’arrête parfois et touche délicatement certains plants. Ses yeux sont remplis d’espoir. Elle a fait d’importants progrès ces dernières années.

Madame Shabani a 49 ans et elle cultive du maïs sur une parcelle de 800 mètres carrés dans le territoire de Rutshuru, à 70 kilomètres au nord-est de Goma, dans l’est de la République démocratique du Congo.

En décembre 2016, la légionnaire d’automne a attaqué plusieurs champs du territoire. Les plants de maïs de madame Shabani ont été détruits.

Elle déclare : « Le calvaire avait débuté dans la deuxième saison de l’année 2016-2017. Pendant cette période, j’ai vu les feuilles de mes plants de maïs changer de couleur et devenir jaunes et bizarres. D’autres feuilles étaient déchirées. C’était le cas pour la quasi-totalité de tous les plants de mon champ… Tout cet effort pour rien. »

Madame Shabani a perdu une bonne partie de ses récoltes, passant de neuf sacs de 50 kilogrammes de maïs à quatre sacs. Ses revenus ont diminué et la scolarité de ses deux filles était compromise.

Une de ses filles, Zawadi Rugendabanga, déclare : « C’est maman qui paie nos études grâce aux récoltes du champ de maïs. Mais quand le mtekunya [« légionnaire d’automne » en swahili] est arrivé, ça n’a pas été facile et elle disait à ma sœur et à moi que si la situation empirait, elle serait obligée de nous faire arrêter les études. J’avais peur pour notre avenir. »

La légionnaire d’automne a continué à ravager les cultures. Les agriculteurs et les agricultrices n’avaient aucune solution, car ils ignoraient presque tout de cet insecte nuisible originaire des Amériques et qui est apparu en Afrique il y a juste deux ans.

Jean Mugiraneza, 36 ans, cultive du maïs sur une parcelle de 630 mètres carrés, à environ un kilomètre de l’exploitation de madame Shabani, à Rutshuru. Il a lui aussi assisté impuissant à l’invasion de son champ par la légionnaire d’automne. Il déclare : « On voyait les feuilles de nos plants être déchirées de jour en jour, mais que pouvions-nous faire? Nous n’avions aucune idée et nous espérions que les chenilles disparaîtraient d’elles-mêmes.… Mais au contraire on voyait que la situation empirait. »

Sa production de maïs est passée de six sacs de 50 kilogrammes à quatre.

Cornelius Sylla Visseso est ingénieur agronome et coordonnateur d’une association d’ingénieurs agronomes à Kivu, à l’est de la RDC. Pendant longtemps, il a eu connaissance de la détresse et des appels à l’aide des agriculteurs et des agricultrices de la région. Avec ses collègues, il a fait des recherches et a trouvé trois méthodes qu’il préconise pour lutter contre la légionnaire d’automne.

La première consiste à bien préparer le sol, en le labourant minutieusement et en profondeur pour détruire les nymphes de légionnaire d’automne. Cette méthode doit être appliquée avant l’ensemencement des champs déjà attaqués par la légionnaire d’automne.

La deuxième méthode consiste à utiliser des insecticides qui tuent les larves présentes sur les cultures. Les produits pulvérisés doivent atteindre les nœuds des feuilles où se cachent les chenilles. Le nœud est la partie située entre la feuille et la tige de la plante.

Cependant, peu d’agriculteurs et d’agricultrices de la région utilisent cette méthode parce qu’ils n’ont pas les moyens d’acheter des insecticides.

Madame Shabani a choisi plutôt la troisième option, à savoir : surveiller son champ pour détecter la présence du ravageur, et vérifier si les plants ont subi des dégâts. Cette méthode consiste à faire le tour de la parcelle pour repérer les cultures touchées, les arracher et les brûler loin du champ. C’était difficile, mais elle a pu le faire grâce à l’aide de ses proches et d’autres voisins agriculteurs et agricultrices qui l’ont aidée pendant un mois.

Elle affirme que cette méthode a été très efficace, car la légionnaire d’automne n’attaque plus ses plants de maïs et elle espère avoir une meilleure récolte cette année.

Selon monsieur Visseso, l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture a approuvé ces trois méthodes comme des moyens de lutte contre la légionnaire d’automne. Cet expert ajoute qu’elles sont toutes efficaces.

Connue sous le nom scientifique Spodoptera frugiperda, la légionnaire d’automne a causé un nombre considérable de dégâts durant la deuxième saison de l’année 2016-2017. Certains agriculteurs et agricultrices congolais ont perdu deux tiers de leurs cultures. Ce ravageur se nourrit principalement de maïs, mais elle peut également se nourrir d’une douzaine d’autres plantes, dont les céréales, la canne à sucre, les arachides, le soja et le coton.

Photo: Légionnaire d’automne sur un épi de maïs en Tanzanie