Ouganda : Les agriculteurs craignent de tout perdre à cause d’un projet de raffinerie (New Vision, Ouganda)

| juin 4, 2012

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Flavia Katusabe dépend de la terre de ses parents pour nourrir son mari et leurs sept enfants. Elle est née il y a 21 ans dans le village de Kitegwa, à Hoima, dans l’ouest de l’Ouganda. Mais la motivation qu’elle avait pour commencer un nouveau jardin et cultiver davantage de nourriture s’est estompée lorsqu’elle a entendu des rumeurs selon lesquelles sa terre aurait été donnée à une entreprise d’industrie pétrolière.

Mme Katusabe dit : « Pourquoi gaspiller mon énergie, tout en sachant que la terre ne m’appartiendra plus ? Je ne sais pas quand et s’ils vont même nous dédommager parce que j’ai entendu qu’il s’agit d’un projet du gouvernement pour l’industrie [du] pétrole. »

Bientôt, Mme Katusabe et d’autres personnes de la région devront remettre leurs terres au gouvernement afin qu’il installe une raffinerie de pétrole. Le projet couvrira 2900 hectares de terres, et comprendra un aéroport, des raffineries et des bâtiments de logement pour le personnel des raffineries. Le terrain sur lequel vit Mme Katusabe est jugé approprié parce que, selon l’étude de faisabilité, cet espace était « peu peuplé ». On prétend que cela facilite le processus de réinstallation et d’indemnisation.

Le gouvernement estime que 14 villages seront affectés, ce qui inclut près de 40 000 ménages. Mais le projet affecte déjà les communautés. Fred Kasangaki est un chef du sous-comté local. Il voit des jeunes garçons et des hommes boire de l’alcool tous les matins. Il dit : « Ils ne font que boire. Ils ont abandonné l’agriculture. Le danger est [que] les pénuries alimentaires et la faim viennent sérieusement nous frapper. » Il n’y a eu aucune consultation avec la communauté. La confusion et l’anxiété règnent. Peu d’informations ont été rendues publiques. Oscar Beddi est un chef de village local. Il dit : « La raffinerie est un bon projet, mais les gens doivent être informés et sensibilisés. » Il croit que la question de l’indemnisation doit être réglée avec soin, car elle génère des attentes. Il poursuit : « Il est dommage que nous ne soyons pas tenus au courant à propos de l’ensemble du processus. Aucune entente n’a été conclue. Cela a fait naître des craintes. »

James Isingoma est un résident du village de Kitegwa. Il craint de ne pas être indemnisé parce qu’il n’a pas de titre foncier pour sa terre. Il dit : « Lorsque j’essaie d’entamer le processus d’obtention du titre foncier, je n’y arrive pas. Le conseil d’administration des terres ne traite plus les nouvelles demandes de titres fonciers. On nous garde dans l’ignorance. »

Fred Kabagambe-Kaliisa est le secrétaire permanent du Ministère de l’énergie et de l’exploitation minière. Il a déclaré : « Tout d’abord, nous faisons la démarcation des terres en nous basant sur une enquête. Ensuite, nous allons énumérer les personnes qui seront touchées par le projet. »

Mais avant que des décisions puissent être prises sur la compensation ou la réinstallation, plusieurs conditions doivent être évaluées ou établies, y compris la propriété foncière, les propriétés et la perte d’activités économiques. M. Kabagambe-Kaliisa ajoute : « Mais maintenant, qu’est-ce qui les empêche de faire des cultures saisonnières comme les haricots, le maïs et d’autres cultures à maturation rapide ? »

Les femmes comme Mme Katusabe ont demandé que les ménages dirigés par des femmes et des enfants, des personnes âgées ou des handicapés bénéficient de dispositions spéciales. Elle dit : « Je demande que le gouvernement trouve des terres et construise une maison permanente avec des tôles, nous donnent des titres fonciers et nous connecte aux systèmes de distribution d’eau et d’électricité. »

Elle ajoute : « De cette façon, je pourrai assurer ma sécurité et l’avenir des enfants. Sinon, mon mari va gaspiller tout l’argent dans l’achat l’alcool. J’ai besoin de terres pour continuer à cultiver ma nourriture. »