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Malawi : Une clinique aide les filles et les jeunes femmes à accéder aux services de santé sexuelle et reproductive

C’est un jeudi après-midi et des nuages engloutissent le soleil, faisant ainsi baisser la température dans la municipalité de Kawale, à Lilongwe, la capitale du Malawi. Chimwemwe Makhumula se promène tranquillement dans la clinique Banja la Mtsogolo et s’assoit sur une chaise en bois dans l’aire d’attente.

L’étudiante universitaire de 26 ans semble épuisée. Depuis le matin, elle vend des saucissons et du beurre d’arachide et récupère l’argent chez sa clientèle.

Madame Makhumula déclare : « Je suis venue chercher des services sur la santé sexuelle et reproductive. J’attends que les médecins reviennent de leur déjeuner. Même si je suis fatiguée, je ne peux pas repartir chez moi pour revenir un autre jour, car j’habite à environ 10 kilomètres de la clinique. »

Madame Makhumula fait partie des nombreuses jeunes femmes qui viennent en cachette à la clinique pour acheter des contraceptifs. Elle les utilise pour éviter les grossesses non désirées, étant donné qu’elle est étudiante et n’est pas encore mariée.

Elle explique : « Je ne peux pas dire à ma mère ou même à mes amies que je vais à la clinique pour demander des services de santé reproductive. Je viens ici, car c’est un espace sûr où je peux m’exprimer librement et obtenir le soutien dont j’ai besoin. »

Pour éviter la réprobation de la société, madame Makhumula ne mentionne à personne qu’elle utilise des contraceptifs. Elle raconte que, dans sa communauté, il y a des préjugés envers les personnes non mariées qui sont actifs sexuellement.

Par exemple, lorsqu’une de ses amies s’est fait avorter, elle a reçu beaucoup de commentaires négatifs de la part des membres de la communauté par rapport au fait que les gens vont secrètement à la clinique pour se faire avorter.

Madame Makhumula explique : « Quand mon amie s’est fait secrètement avorter, les gens de la région l’ont insultée. Ils l’ont traitée de prostitué et lui ont dit beaucoup de mauvaises choses. Elle n’a pas supporté cette discrimination et a déménagé dans une autre région. »

Selon madame Makhumula, la religion est un autre facteur qui l’empêche de parler librement des contraceptifs et des services de santé sexuelle et reproductive.

Elle déclare : « Je suis chrétienne et il est très difficile d’en discuter avec des membres de la même église, car ils pourraient critiquer ma vie spirituelle. »

Madame Makhumula soutient qu’il est vraiment nécessaire des créé des cadres pour des discussions ouvertes, afin que les adolescentes et les jeunes femmes puissent discuter ensemble de la santé sexuelle et reproductive et prendre des décisions éclairées. À ses dires, cela pourrait contribuer à briser le silence entourant les services de santé sexuelle et reproductive chez les filles et les femmes, et à réduire progressivement la stigmatisation rattachée à ces services.

Elle ajoute : « Les jeunes femmes et les filles ont honte et craignent de parler des questions de santé reproductive avec leurs amis et leurs proches. Mais, pour moi, c’est mon corps et j’ai besoin de le contrôler et d’en prendre soin. »

Idah Savala est la spécialiste en santé sexuelle et reproductive de la clinique Banja la Mtsogolo, une structure chef de file au Malawi qui travaille à améliorer la qualité et l’accessibilité des services de santé sexuelle et reproductive pour les jeunes. Madame Savala soutient que les grossesses précoces sont une des causes majeures du décrochage scolaire chez les filles de 13 à 18 ans au Malawi.

Elle ajoute : « Souvent, l’utilisation des contraceptifs est associée à une vie immorale. Ces jugements non fondés réduisent au silence les jeunes femmes et les empêchent d’accéder aux contraceptifs. »

Selon madame Savala, le manque de sensibilisation et d’éducation sur la sexualité et les services de santé sexuelle et reproductive empire le problème.

Elle explique les conséquences de ce manque de sensibilisation : « Plusieurs jeunes luttent avec les conséquences de grossesses indésirables et d’infections sexuellement transmissibles, y compris le VIH et le sida. »

Madame Savala ajoute : « Les adolescentes et les jeunes femmes sont exposées à l’exploitation sexuelle et à la violence fondée sur le genre. Mais plusieurs souffrent en silence pour éviter la honte à cause des comportements négatifs de la société, des stéréotypes de genre et enseignements religieux. »

À ses dires, il est nécessaire de renforcer la sensibilisation et les connaissances concernant l’utilisation des contraceptions pour combattre les idées fausses dans la société.

Elle explique : « Cela pourrait aider beaucoup de jeunes femmes et de filles à adopter l’utilisation des contraceptifs. Ça peut être une solution pour briser le silence, [et] améliorer la connaissance de soi et l’ouverture aux pratiques relatives à la contraception. »

Madame Makhumula affirme qu’elle continuera d’aller à la clinique Banja la Mtsogolo, car elle y reçoit un soutien et des renseignements exacts sur l’utilisation des contraceptifs.

Elle déclare : « Avant, j’avais honte de m’exprimer, surtout lorsque je rencontrais des médecins hommes ou une de mes connaissances. Je ne voulais pas parler aux gens que je connais, pour éviter que d’autres personnes soient au courant de mes informations. Mais je me sens libre de discuter des contraceptifs avec le personnel de la clinique. »

Le nom de Chimwemwe Makhumula a été changé dans cette nouvelle pour protéger sa vie privée.

La présente nouvelle a été produite grâce au soutien financier du gouvernement du Canada fourni par l’entremise d’Affaires mondiales Canada dans le cadre du projet The Innovations in Health, Rights and Development, ou iHEARD. Ce projet est dirigé par un consortium formé de Radios Rurales Internationales, CODE et Marie Stopes International (MSI) et mis en œuvre au Malawi par Farm Radio Trust, Women and Children First, Girl Effect et Viamo.

Photo : Un emballage ouvert de pilules contraceptives orales. Crédit : Bryancalabro via Creative Commons.