Par une matinée fraîche de samedi, Henry Chaperewera Banda, 62 ans, se rend à vélo à la forêt de Chamadzi, à Kambewa, un village de l’Autorité traditionnelle de Masumbankhunda, à 60 kilomètres de la capitale Lilongwe, pour y rencontrer des collègues afin de parler d’apiculture.
Monsieur Banda pratique l’apiculture pour que sa famille ait du miel leur consommation personnelle et pour en vendre pour subvenir à leurs besoins quotidiens. Il déclare : « Le miel est riche en sucre, vitamines et minéraux, ainsi que des composés de plantes favorables à la santé, appelés polyphénols. »
Les 45 ruches éparpillées dans la forêt de 22,8 hectares ont été récemment installées lorsqu’une initiative de reforestation fut lancée à la suite d’une importante diminution des arbres ayant entraîné une perte de la biodiversité, y compris les abeilles et les oiseaux. La forêt compte deux sections : 13,8 hectares reboisés entre 2002 et 2009, et neuf hectares d’arbres régénérés naturellement.
Des projets de reboisement communautaires ont permis de restaurer le couvert forestier de la région, prévenir l’érosion des sols et faire revivre les habitats naturels des abeilles et des oiseaux.
Les ruches appartiennent à au moins 120 personnes vivant aux alentours de la forêt de Chamadzi, soit une ruche pour trois ou quatre personnes. Ils partagent les recettes des ventes de miel.
Monsieur Banda vend son miel par l’entremise du Groupement des producteurs de miel de Chamadzi, une coopérative de 120 membres originaires de différents villages riverains de la forêt. Le groupement compte 50 femmes et 26 jeunes. Il déclare : « Nous vendons notre miel par l’entremise du Groupement des producteurs de miel de Chamadzi, car il est difficile de trouver individuellement des marchés pour nos produits. Parfois, nous trouvons une clientèle, mais elle ne propose pas de bons prix. »
Les membres du groupement partagent leurs connaissances et leur savoir-faire sur la protection des ruches et veille au succès de ses activités. Après avoir vendu le miel, monsieur Banda et les membres du groupement paient les frais de scolarité d’élèves orphelins et utilisent le reste de l’argent pour acheter des produits de première nécessité et des engrais pour la production agricole.
Cependant, monsieur Banda est préoccupé par le nombre insuffisant de ruches qui a pour conséquence la faiblesse de la production de miel. Ils s’attendaient à récolter 700 litres par an, deux fois par ans en juin et en décembre. En 2023, le Groupement des producteurs de miel a vendu 639 litres de miel qui lui ont rapporté 3,7 millions de kwacha malawites (2 122 $ US), et dans la première moitié de 2024, ils ont récolté 443 litres qu’ils doivent toujours commercialiser.
Le manque de marché approprié et structuré pour le miel est un problème. Autrefois, il leur arrivait de vendre le kilogramme de miel à environ 892 kwacha (près de 0,50 $ US), mais maintenant le prix est meilleur, soit 6 000 kwacha (environ 3,45 $ US) le kilogramme.
À l’échelle nationale, il existe plus de 130 groupements apicoles regroupant plus de 20 000 agriculteurs, dont beaucoup sont des femmes, selon l’Association des apiculteurs du Malawi. L’association affirme travailler à l’utilisation de sachets emballés pour toucher une clientèle plus nombreuse. Actuellement, la grande partie du miel est conditionnée dans des bouteilles et l’activité cible la classe moyenne et supérieure.
Madame Ediza Gezemani, qui s’est lancée dans l’apiculture en 2022, en profite considérablement, et utilise ses revenus pour payer les frais de scolarité de ses enfants et acheter des engrais pour la culture du maïs.
Elle déclare : « Mes amies et mes proches m’ont découragée au début, mais ma vie a changé depuis que j’ai adopté l’apiculture. Je porte une combinaison apicole et je vais contrôler le miel dans la forêt, vérifier qu’il est prêt et éviter les piqûres d’abeilles. »
Madame Gezemani souligne également les avantages de la reforestation, y compris l’accès au bois de chauffe pour la cuisine et aux réserves d’eau stables pour les besoins élémentaires.
Madame Gezemani a expliqué que la difficulté d’accès aux postes de responsabilité dans le groupement constitue l’un de leurs problèmes, car les hommes occupent tous les postes.
Elle ajoute : « Nous étions même écartées lorsqu’il fallait aller dans les forêts pour surveiller l’évolution des ruches et vérifier s’il y avait plus de miel. Cependant, tranquillement, les femmes progressent. Nous pouvons maintenant porter des combinaisons apicoles et entrer dans les forêts pour surveiller l’évolution nous-mêmes. »
Madame Lileni Batiwelo, une autre femme de la communauté, raconte une histoire similaire. « Avant l’apiculture, je peinais à subvenir à mes besoins élémentaires. Aujourd’hui, je peux subvenir aux besoins de ma famille en lui fournissant de la nourriture, du savon, des frais de scolarité et des engrais. »
Avant, sa famille avait de la difficulté à gérer son budget mensuel, et c’est son mari qui prenait toutes les décisions pour la famille. Mais, désormais, elle subvient aux besoins de la famille, et elle participe également aux prises de décisions.
Elle déclare : « Maintenant, mon mari et moi nous nous asseyons ensemble pour consolider notre budget à partir de ce qu’on gagne, car nous comprenons nos responsabilités en ce qui a trait à la satisfaction des besoins élémentaires de la famille. Mais avant que nous nous lancions dans l’apiculture, c’est mon mari qui prenait les décisions seul. »
Le responsable du groupement du village de Kambewa affirme que les activités apicoles sont possibles grâce aux initiatives de reboisement qui ont été réalisées entre 2002 et 2009. Un comité supervise les activités forestières pour assurer la protection des arbres et empêcher le déboisement.
Monsieur Banda conclut : « Unissons-nous pour préserver l’environnement en plantant des arbres dans les régions où nous en abattons, afin que les autres puissent en bénéficier. De cette façon, nous pouvons restaurer la biodiversité, notamment les abeilles qui profitent à plusieurs dans notre communauté. »

Photo : M. Banda et son groupe, qui vendaient tous du miel récolté. Prise au Malawi, 2024.