Kenya : Les masaï s’adaptent aux changements climatiques par le biais de l’agriculture et non de l’élevage de vaches (par Sawa Pius, pour Agro Radio Hebdo)

| avril 14, 2014

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Emily Kokoyo a de bonnes raisons de sourire depuis qu’elle a commencé à pratiquer la polyculture. Sa famille avait l’habitude de ne compter que sur ​​l’élevage pour vivre. Maintenant, elle cultive aussi des plantes qui résistent à la sécheresse et mûrissent rapidement en plus de s’adapter à l’évolution du climat.

Mme Kokoyo vit à Kirkamat, un village à 100 kilomètres à l’ouest de Nairobi. Elle cultive des pommes de terre, des haricots et des légumes sur une parcelle de terre d’un peu moins d’un demi-hectare. Les cultures conviennent au climat actuel dans sa région où sévissent sécheresses graves, inondations, pluies irrégulières et érosion des sols.

La région semi-aride est occupée par environ 200 000 masaï. Il y a dix ans, le gouvernement kenyan a octroyé 2 850 kilomètres carrés de terres à des masaï. Les propriétaires étaient tenus de défricher la forêt pour construire des maisons et cultiver des plantes. Les arbres ont été transformés en charbon de bois et en charpente, laissant la terre dénudée. On pense que c’est ce qui a influencé les conditions météorologiques.

En 2011, le Centre de recherches pour le développement international (CRDI) et le Kenya Agricultural Research Institute (institut de recherche agricole du Kenya, également connu sous l’acronyme anglais KARI), ont entamé un projet de recherche d’une durée de trois ans et d’une valeur de 95 millions de shilling kenyans [1,1 million $ US]. Le projet vise à développer une méthode de prévision des conditions météorologiques des 80 prochaines années. Les informations météorologiques serviront à aider la communauté à s’adapter aux changements climatiques par le biais d’une combinaison de cultures agricoles et de l’élevage du bétail.

« Ça m’aide beaucoup, car ici au pays des masaï, les vaches appartiennent aux hommes. Depuis que le KARI nous a apporté ces types de cultures et nous a enseigné à cultiver, je suis maintenant en mesure de récolter assez de nourriture et d’en vendre une partie à mes voisins », de dire Mme Kokoyo.

Le projet comprenait la culture de variétés de plantes résistantes à la sécheresse comme des légumineuses, des pommes de terre, du sorgho, du maïs et des haricots dans des parcelles de démonstration. Les agricultrices et les agriculteurs avaient accès à des graines et à des formations sur la manière de les planter et de les cultiver. Le projet encourage également la plantation d’arbres pour restaurer le microclimat local.

Dr Michael Okoti est le coordonnateur national de la recherche sur l’environnement et les changements climatiques à KARI. Il affirme que le projet de recherche reposait sur des données historiques et actuelles pour prédire les conditions météorologiques. « Nous avons des modèles climatiques régionaux et nous pouvons les projeter vers l’avenir, soit les 80 prochaines années », ajoute-t-il.

Plus de 600 agricultrices et agriculteurs ont commencé à cultiver des plantes. Selon le Dr Okoti, l’objectif est d’atteindre 1 500 agricultrices et agriculteurs d’ici septembre 2014. Mais, aux dires du Dr Okoti, ça n’a pas été facile. Les politiques changent plus vite que la culture. Bien qu’il soit difficile pour les éleveurs de changer leurs pratiques anciennes, M. Okoti dit qu’il n’est plus pratique de posséder un grand troupeau de bétail, parce qu’il ne peut pas être déplacé aussi facilement que dans le passé.

La plupart des agricultrices et des agriculteurs sont satisfaits de ce qu’ils ont appris. Peter Ole Nembo a planté cinq types de légumineuses. Ils lui fournissent de la nourriture et lui permettent de fertiliser ses sols. Il cultive également une variété de cultures fourragères qui empêchent l’érosion des sols. Ses cultures s’étendent sur un hectare et encourage ses voisins à faire de même.

Samuel Ole Seme a alloué deux hectares à l’agriculture. Il nourrit ses cinq vaches laitières de pâturages de qualité. « J’ai maintenant des vaches laitières exotiques qui me donnent vingt litres de lait le matin et dix litres en soirée. Et ça, ce n’est qu’une vache! », dit-il.

M. Seme a également un troupeau mixte de vaches Sahiwal autochtones et améliorées qu’il élève à des fins de consommation de viande. Il vend la viande pour payer les droits de scolarité de ses enfants.

À mesure qu’ils apprennent à combiner leurs méthodes traditionnelles et les nouvelles pratiques, les masaï locaux peuvent maintenant s’attendre à un avenir plus sûr.