Kenya : Les ‘Mama mbogas’ contribuent à la relance économique (New Humanitarian)

| août 31, 2020

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Nouvelle en bref

Les ventes de Saidi Mburi sont un bon baromètre de la santé économique de Kibera, le plus grand bidonville de Nairobi. Elles ont été exécrables. Tout le monde souffre à Gatwekera, un des 13 quartiers qui forment Kibera. Cependant, les difficultés des travailleurs(euses) du secteur formel diffèrent de celles de l’informel kényan. Monsieur Mburi a manifestement les mêmes luttes que tout le monde. Mais, à l’instar d’autres commerçant(e)s, il ne se résigne pas. Selon Kennedy Odede, le fondateur du mouvement communautaire Shining Hope for Communities : « Le secteur informel est le moteur de notre pays : les mama mbogas, ou marchandes ambulantes, contribuent à 80 % de l’économie. Elles vendent des tomates et vivent dans les quartiers pauvres. » La chercheuse Niti Bhan voit cette « économie indigène » comme la clé de la relance économique au Kenya.

Les ventes de Saidi Mburi constituent un bon baromètre de la santé économique de Kibera, le plus grand quartier défavorisé de Nairobi. Elles ont été désastreuses. Après des mois passés à vivre sous le couvre-feu, les restrictions et les mesures de distanciation sociale liés au COVID-19, déclare-t-il : « les gens n’ont juste pas d’argent. »

Sa boutique exiguë où ne tient qu’une seule personne a toujours fait crédit aux client(e)s réguliers, mais maintenant, il déclare : « les gens ne peuvent pas payer, et cela nuit également à mes affaires. » Les étagères sont vides à certains endroits, car son stock est juste composé de denrées de base, à savoir : le pain, le sucre, le lait et la farine de maïs. Tout le reste est un « luxe” que les gens ne peuvent plus se permettre.

Plus de 90 % des Kényan(e)s ont vu leurs revenus diminuer à cause du COVID-19, et près des trois quarts des familles ont dû puiser dans leurs économies, de l’argent réservé généralement pour les frais de scolarité, selon le Financial Sector Deepening Kenya ou FDS Kenya, une fiducie qui fait la promotion de l’inclusion financière.

L’allègement du confinement en juillet a entraîné une multiplication des cas de COVID-19, dont le nombre est passé de 7 800 infections enregistrées au début du mois à plus de 33 000 cas à la date du 26 août.

Cela nuit à tout le monde à Gatwekera, un des 13 quartiers de Kibera. Cependant, il faut faire une distinction entre la souffrance des employé(e)s de l’économie formelle et ceux et celles de l’informel, et cela pourrait jouer un rôle important dans la relance économique nationale.

À Gatwekera, les salarié(e)s de Gatwekera comme William Wajenge, un maçon licencié le mois dernier, ont été les plus touchées par le confinement et le ralentissement économique. Depuis mars, près d’un tiers des travailleurs(euses) à faible revenu ont perdu leurs emplois, selon la firme de recherches Trends and Insights for Africa.

Privé de son salaire, la famille de six personnes de monsieur Wajenge mange désormais deux repas par jour, et, parfois, déclare-t-il, c’est seulement le repas du midi. Sa femme lui donne un coup de main en faisant la lessive chez d’autres, mais cela arrive rarement. Kibera est la zone la plus fortement touchée par le COVID-19, et les gens hésitent à y recruter des travailleurs(euses).

La silhouette de Nairobi est impressionnante, mais l’économie kényane demeure en général informelle. De plus, en cette période de COVID, la souplesse et la résilience de ce caractère informel à, dans une certaine mesure, modérer la crise économique générée par le coronavirus.

Tout au long des ruelles boueuses de Gatwekera, les marchand(e)s se serrent la ceinture. Irene Achieng a un petit kiosque où elle vend des chips, du café et du thé, surtout aux conducteurs de taxi-moto qui attendent les client(e)s à l’extérieur. Autrefois, elle utilisait trois grands seaux de pommes de terre par jour, alors qu’elle n’en utilise qu’un maintenant.

Monsieur Mburi et son magasin ont manifestement les mêmes luttes que les autres. Cependant, à l’instar d’autres commerçant(e)s informels, il ne plie pas l’échine. Les commerçant(e)s ont réduit leurs stocks, leurs dépenses personnelles, et jonglent vraisemblablement avec deux ou trois chamas, des associations d’épargne et de finance, pour traverser cette période.

Kennedy Odede est le fondateur du mouvement communautaire Shininh Hope for Communities, présent dans 14 bidonvilles du Kenya. Il déclare : « Le secteur informel est le moteur de notre pays : les mama mbogas, ou marchandes ambulantes, contribuent à 80 % de l’économie. Elles vendent des tomates et vivent dans les bidonvilles. »

Pour la chercheuse Niti Bhan, cette « économie indigène » est la clé de la relance économique au Kenya. Elle met en évidence le flux de légumes frais parvenant chaque jour à Nairobi, sous le contrôle des marchand(e)s locaux, comme un exemple de sa capacité à s’adapter.

Elle affirme que les commerçant(e)s du marché de gros de Marikiti, à Nairobi, et qui sont en général des femmes, ont réduit leurs activités et enregistrent à peu près une baisse de 65 % de leur trésorerie comparativement à la période pré-COVID.

Elle croit qu’avec un plan d’investissement, le secteur informel peut se reconstruire beaucoup plus rapidement que les entreprises classiques traditionnelles, dépendantes de la santé financière mondiale.

Le célèbre économiste kényan David Ndii a demandé la création d’un « fonds de sécurité » pour permettre aux entreprises informelles et à leurs employé(e)s d’obtenir des prêts à taux réduit.

FDS Kenya, lui va plus loin, en demandant l’octroi d’un revenu minimum de base universel de 20 $ par mois à chaque adulte pendant trois mois au coût approximatif de 1,08 milliard.

La présente nouvelle est adaptée d’un article initialement publié par The New Humanitarian intitulé « A Kenyan COVID-19 notebook: The ‘mama mbogas’ and the path to recovery. » Pour lire l’intégralité de l’article, cliquez sur: https://www.thenewhumanitarian.org/news-feature/2020/08/06/Kenya-coronavirus-informal-economy-mama-mbogas.