Gathoni Mwangi est une veuve de 78 ans originaire du village de Ngamba, dans le centre du Kenya. Mme Mwangi n’oubliera jamais 2010, l’année où une sécheresse a sévi et où les deux saisons des pluies n’ont apporté que peu de précipitations.
Le maïs de Mme Mwangi a dépéri, la laissant pratiquement incapable de nourrir ses cinq petits-enfants orphelins. Ses deux vaches ont eu à peine assez de fourrage pour produire du lait pour les enfants, et il n’y a pas eu de surplus à vendre et pas d’argent pour acheter à manger.
C’est une soi-disant « plante orpheline » qui a sauvé sa famille. Les « plantes orphelines » sont des plantes qui font l’objet de peu de recherche scientifique et bénéficient de peu de financement, malgré leur importance pour la sécurité alimentaire. Dans le cas de Mme Mwangi, quelques ignames avaient survécu après les récoltes des années précédentes. Elles avaient été complètement oubliées; personne n’avait pris la peine de récolter les tubercules.
Mme Mwangi se souvient: « Je ramassais deux (ignames) chaque jour et je les faisais bouillir et rôtir avant de servir le repas aux enfants, et pas un seul jour nous ne sommes (allés) nous coucher affamés. »
Une nouvelle institution de recherche vise maintenant à améliorer le profil et la production de plantes négligées mais nutritives. L’African Plant Breeding Academy a ouvert ses portes à Nairobi, en décembre. Elle formera des scientifiques et des techniciens en matière de croisement de plantes et d’arbres qui n’ont jusque là reçu que peu d’attention, à cause de leur faible valeur économique sur le marché global.
Le rôle de cette académie est d’aider à réduire la famine et à améliorer la sécurité alimentaire en Afrique, en développant des variétés de plantes à haut rendement sur lesquelles les communautés comptaient autrefois, mais qui ont été négligées au profit d’aliments de base tels que le maïs, le riz et le blé.
Tony Simons est le directeur général du World Agroforestry Centre. Il dit que l’Académie sera un endroit consacré à la recherche et au développement de cultures alimentaires de meilleure valeur nutritionnelle et résistant mieux aux organismes nuisibles, aux maladies et au climat changeant.
Daniel M’reli est un expert agricole qui travaille en tant que consultant privé. Il dit que les plantes orphelines d’Afrique contiennent des minéraux et des nutriments qui sont rares dans les cultures conventionnelles. De plus, elles peuvent généralement tolérer des conditions climatiques difficiles, tout en subissant rarement l’effet de maladies ou d’attaques d’organismes nuisibles.
M. M’reli pense que les agriculteurs africains devront réapprendre à comprendre que ces cultures ne sont pas de la « nourriture de pauvre ».
Mme Mwangi se réjouit de la création de l’Académie. Elle dit qu’elle sera la première à adopter toute plante améliorée rendue disponible. Elle espère que l’Académie fournira des fanes de patates douces traditionnelles à planter durant la petite saison des pluies, de septembre à décembre.
Mme Mwangi dit: « Les tubercules me permettront de nourrir les enfants en temps de pénurie alimentaire, et je pourrai aussi facilement nourrir mes animaux avec les fanes, afin d’éviter le genre de problèmes que j’ai connus durant l’année 2010. »