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Congo : Des agriculteurs de Kifouma misent sur le manioc amer pour une meilleure production

Il fait très froid, mais Hermann Ntsassa brave la fraîcheur matinale pour se rendre dans son champ de manioc à Kifouma, un petit village du département du Niari, à la frontière entre Congo et l’Angola. Le chemin est étroit et il baisse de temps en temps les hautes herbes humides de ses mains nues pendant qu’il marche.

Une brume épaisse couvre le ciel. L’agriculteur de 23 ans sait que la saison pluvieuse va bientôt commencer.

Monsieur Ntsassa collecte quelques tubercules éparpillés et les ajoute à un tas. Sa sœur et lui commencent ensuite à éplucher les tubercules. Lorsqu’ils terminent le premier tas, ils récoltent plus, et commencent à éplucher le manioc qui sera transformé en foufou.

En Congo, le foufou c’est de la farine de manioc mélangée avec de l’eau, et bouillie par la suite, qu’on mange avec de la sauce. Une fois les tubercules déterrés, lavés et épluchés, ils sont coupés en morceaux et placés dans un sac qui est ensuite plongé dans de l’eau pendant au maximum quatre jours. Après avoir retiré et rincé les racines, celles-ci sont mises à sécher au soleil jusqu’à ce qu’elles deviennent dures. Alors, elles sont prêtes pour être vendues pour être transformées en farine.

Il y a vingt ans, la communauté décidait d’abandonner la culture du manioc doux. Ils se sont tournés vers une variété amère appelée Mandombé. Monsieur Ntsassa affirme que cette variété offre plusieurs avantages : « Nous avons constaté que les boutures amères sont plus rentables parce que ses boutures produisent plus. Ce qui nous permet de faire plus de foufou et donc de gagner plus d’argent pour améliorer nos conditions de vie. »

M. Ntsassa soutient que le Mandombé est tout aussi facile à éplucher que les variétés douces, car il produit de plus gros tubercules, ce qui lui fait gagner du temps à l’épluchage.

Il produit environ 25 à 30 sacs de farine de foufou par an, et vend le sac entre 17 000 et 20 000 francs CFA (10,50 $ et 12,40 $ US), ce qui lui fait un revenu annuel d’environ 600 000 francs (1 370 $ US).

Pauline Bayekoula est une agricultrice de 50 ans qui cultive du manioc sur une petite parcelle de 100 mètres carrés. La cultivatrice est tellement pressée de partager ses éloges sur le Mandombé qu’elle manque de heurter un tronc d’arbre qui sépare son champ du champ de monsieur Ntsassa.

Elle s’enthousiasme : « Le choix de la variété Mandombé est une aubaine pour nous. J’ai au total trois champs et je ne manque plus de rien. Je paie la scolarité de deux de mes enfants qui sont à l’université et des quatre autres qui sont au lycée et au collège rien qu’avec la vente du Mandombé. Je gagne de l’argent en peu de temps. »

Le Mandombé parvient à maturité en six mois. Mais au septième mois, il est prêt à être récolté pour la farine de foufou, dont la demande est forte sur le marché. Il faut 12 mois à la variété douce de manioc que la communauté cultivait autrefois pour parvenir à maturité.

Quand madame Bayekoula cultivait le manioc doux, la production était faible et lui procurait juste assez de quoi nourrir sa famille. Elle déclare : « La variété douce ne produisait pas beaucoup, et pour avoir cinq sacs, je devais vraiment beaucoup travailler et arracher beaucoup de tubercules …. Le travail était très pénible. Avec cinq sacs, les revenus étaient vraiment insignifiants… »

Mais, cette année, sa production a plus que doublé et ses revenus ont augmenté.

Fulbert N’Senda est agent de vulgarisation agricole local et chef de service au projet métayage bovin au ministère de l’Agriculture et de l’Élevage du Congo. Il déclare : « L’acide cyanhydrique, un poison contenu dans le Mandombé lui permet de repousser toute attaque possible d’insectes nuisibles. La variété est [également] plus résistante aux maladies et produit plus. Un tronc du Mandombé peut produire jusqu’à six gros tubercules. »

Les agriculteurs commencent à préparer le sol en juin. Monsieur Ntsassa déclare : « Je prépare le terrain en le dessouchant, puis je retourne le sol en incorporant des feuilles de lantana [à la terre]. Et j’attends ensuite jusqu’au mois d’octobre ou de novembre où les pluies sont denses pour planter mes boutures. »

Les trois ou quatre mois d’attente permettent aux feuilles de lantana de se décomposer dans le sol et de nourrir la terre. D’après monsieur N’senda, « Le lantana, une plante vivace dont les feuilles sont enfouies dans le sol avant le plantage, se présente sous diverses espèces. Dans la terre, elles se dégradent et contribuent à rendre le sol fertile pour bien accueillir les boutures de variétés amères de manioc [qui sont] prisées par les agriculteurs de Kifouma. »

Monsieur Ntsassa utilise une technique de plantation importante : l’espacement. Il déclare : « Je respecte la distance d’un mètre [entre les plantes] sur la [rangée] de ligne et un mètre entre les lignes, et les boutures à planter doivent avoir la longueur de 15 à 20 centimètres et six nœuds comme je l’ai entendu à la radio. »