Congo Brazzaville : Sur une île de pêcheurs, un agriculteur gagne plus que la plupart des autres (par Privat Tiburce Martin MASSANGA pour Agro Radio Hebdo)

| août 24, 2014

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Il est 10 heures du matin. Sur l’île aux raphias, une île dans le majestueux fleuve Congo, un village de pêcheurs est en pleine animation.

Au bout de l’étendu se trouve un espace de sable fin et blanc, de la verdure reluisante et la silhouette d’un homme criant presque dans son téléphone : «  Allo ! Oui c’est moi-même Célestin au téléphone ! Oui j’ai des planches de tomate, de piment et de gombo qui seront prêtes pour la récolte dans deux jours ! Pour combien ?  Et vous arrivez quand ? ».

L’homme s’entretenant au téléphone, c’est Célestin Botando. À la fois pêcheur et maraîcher, le père de sept enfants vient de renseigner des clients sur les produits de maraîchage disponibles sur ses deux hectares de terre.

Originaire de la République Démocratique du Congo (RDC), M. Botando est le seul agriculteur au milieu d’une communauté de pêcheurs.

Ces cultures de tomate, de gombo et de piment, des plantes à croissance et à production rapides, sont très prisées sur le marché de Brazzaville.

Il dit : «  J’ai choisi ces cultures pour des raisons à la fois temporelles et spatiales. » M. Botando n’a que quelques mois pour travailler dans cet espace agraire.En saison sèche, les eaux du fleuve se retirent et il bénéficie d’une grande étendue de terre. Quand les pluies reprennent, l’île s’inonde dans sa grande partie.

Il explique: « Donc je ne peux pratiquer le maraîchage que de mai à fin septembre. Mais c’est suffisant pour que j’en tire un certain profit ».

Maraîcher le jour et pêcheur la nuit, c’est le mode et le rythme de travail qu’a choisis, depuis deux ans, M. Botando. Il a choisi se mode de vie afin de maintenir le niveau de ses revenus habituels pour toujours être en mesure de payer la scolarité de ses enfants et répondre aux besoins de toute sa famille à Kinshasa.

Auparavant, chaque année, à l’arrivée de la saison sèche, Célestin Botando éprouvait des difficultés pour joindre les deux bouts à cause des faibles prises de poissons dans son activité de pêche. Le maraîchage lui permet aujourd’hui d’équilibrer ses revenus  en compensant la baisse des recettes relatives à la pêche.

Il s’estime heureux d’avoir trouvé une activité alternative durant la saison sèche.Il peut vendre le panier de gombo à 10 000 francs CFA (environ 20 $US) et en cultive assez pour vendre au moins 15 paniers par semaine.

Bonaventure Okombi  est le chef du hameau. Il témoigne : «  [M. Botando] a l’avantage de ne pas défricher. Il fait ses champs sur une terre que le fleuve lui aura laissée. Nous sommes fiers de son initiative. Peut-être que ça va inspirer d’autres pêcheurs pour mieux s’occuper en cette période de l’année ».

Sa belle nièce, Bibi Ilunga l’aide depuis le début de cette campagne maraîchère. Elle dit : «  Nous avons juste des problèmes d’arrosage. Il nous aurait fallu des motopompes pour bien travailler. Mais, hélas ! Vous imaginez comment on arrose toutes ces cultures, matin et soir, à la main en parcourant une certaine distance pour prendre de l’eau au fleuve. »

Mme Ilunga regrette juste le fait que sur cette île, c’est une activité périodique. Elle aurait préféré que cela continue toute l’année.

Les revenus additionnels venant du maraichage ont permis à M. Botando de mettre en place une boutique pour permettre aux autres habitants de l’île de s’approvisionner en pétrole lampant, en savon, en boite de conserve et autres produits manufacturés. Sa seule inquiétude est la vague d’expulsions du Congo Brazzaville des citoyens originaires de la RDC. Avec un large sourir, il dit:« Si cette opération ne nous fait pas partir d’ici, je crois que l’année prochaine j’aurai des champs plus étendus que ceux-ci ».