Nelly Bassily | décembre 3, 2012
Comme d’habitude, le mois de novembre à Margo, à 220 km au nord d’Ouagadougou, était consacré aux récoltes. Cette année, elles étaient bonnes. Au royaume du sorgho, les tiges ployaient sous le poids des épis.
Pamaneboumbou Belem est un paysan heureux. Au moment de l’interview, M. Belem disait avec enthousiasme : « Je prévois récolter au moins 16 sacs de sorgho. » L’hivernage dernier, il n’avait récolté que trois sacs. Cela n’était pas suffisant pour nourrir sa grande famille. La récolte de sorgho n’a duré que deux mois.
Alidou Sawadogo est le voisin de M. Belem. Il était aussi satisfait de la saison: « Je crois que cette année ma famille sera à l’abri de la faim. Ma production de mil et de haricot n’a pas été aussi abondante depuis près d’une décennie. »
Cette année, M. Belem et les paysans de la région doivent leurs bonnes récoltes à deux principales raisons. La pluviométrie exceptionnelle combinée à l’application des techniques culturales en milieu aride a éliminé le spectre de la famine dans le village.
Innocent Rouamba travaille à la Direction Régionale de l’Agriculture du Nord. Il dit que pour l’instant, ils ne disposent d’aucunes statistiques mais il est optimiste que la campagne sera une véritable réussite.
Alors qu’ils ne peuvent pas miser sur une pluviométrie exceptionnelle à chaque année, les agriculteurs dans cette région aride ont appris à gérer les pluies qu’ils reçoivent. Pendant plusieurs décennies, ils ont été accompagnés par une fédération nationale de regroupements villageois.
Durant cette période, les agriculteurs ont maîtrisé les techniques de production telles que le zaï et les cordons pierreux. Ces deux techniques permettent une meilleure rétention des eaux de ruissellement. Le zaï est une technique consistant à creuser des poquets aménagés dans lesquels une semence est placée. Avec la technique des cordons pierreux, les agriculteurs délimitent le pourtour de leur champ avec des pierres, le long de la pente descendante d’une colline. Elles constituent ainsi une barrière qui retient les eaux de ruissellement dans le champ.
M. Belem confirme que grâce à ces techniques, le sol devient plus facile à travailler. Avant, le sol de son champ était tellement durci que rien n’y poussait. Maintenant, il peut même produire du maïs qui ne réussit que sur des terres humides.
Cependant, la bonne saison n’efface pas dans les mémoires des producteurs l’éprouvante année vécue. M. Sawadogo, la soixante révolu, se souvient de la saison passé avec amertume : « La saison agricole passée fut un désastre ! Nous n’avons pratiquement rien récolté ». Il dit que certaines personnes de son âge furent obligées de reprendre l’orpaillage malgré les risques d’éboulement.
Mais, cette saison agricole amène avec elle de l’espoir. Devant la famine, les fils de M. Sawadogo avaient migré vers la ville d’Ouahigouya, à 40 kilomètre de Margo, en quête d’une meilleure vie. Mais, la promesse de bonnes récoltes a fait en sorte que les fils de M. Sawadogo sont retournés au village auprès de leur père.
M. Belem dit qu’il doit tout aux techniques de production sur terre aride. Il conclut que si lui et d’autres agriculteurs n’avaient pas connu ces techniques, plus personne ne vivrait encore dans la région.