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Burkina Faso : Les crises boutent les enfants hors de l’école et les exposent à des dangers (The New Humanitarian)

L’an dernier, lorsque Martine, 13 ans, quitta son village au nord du Burkina Faso pour une localité plus sûre, elle espérait reprendre ses études interrompues par la violence extrémiste. Mais seule et sans ses parents, elle se retrouva rapidement confrontée à de nouveaux dangers. En décembre, un homme ayant trois fois son âge l’a kidnappée lors d’un mariage et l’a violée.

Elle déclare : « Si j’étais à la maison, mes parents ne m’auraient jamais autorisée à aller seule au mariage et cela ne se serait jamais produit. » Le nom de famille de Martine n’est pas divulgué pour protéger son identité.

Avec la montée de la violence extrémiste au Burkina Faso, les enfants vivent particulièrement des situations difficiles. Sur presque un million de Burkinabé actuellement déplacés à travers le pays, près de la moitié ont moins de 18 ans. Plusieurs ont été forcés à quitter l’école à cause des attaques et des menaces des groupes extrémistes.

Les groupes de défense des droits de la personne et les autorités locales soutiennent que la situation est particulièrement dramatique pour les enfants comme Martine, dont les parents les ont envoyés vers les localités où il est plus sécuritaire d’aller à l’école, mais qui, en l’absence d’une surveillance parentale, se retrouvent victimes d’exploitation et de violence, y compris la violence sexuelle, le mariage des enfants et le travail des enfants.

Les risques sont aggravés par la fermeture des écoles à l’échelle nationale, imposée en mars en raison de la pandémie du coronavirus. Les écoles resteront fermées jusqu’en septembre.

Le ministère de l’Éducation a commencé à diffuser des cours du primaire et du secondaire à la télévision et la radio pour accompagner les enfants. Cependant, les cours à distance ne peuvent pas remplacer l’apprentissage en personne, selon le gouvernement et les groupes d’aide humanitaire, et ils offrent peu de solutions aux autres dangers qui guettent les enfants.

Les groupes d’entraide affirment qu’ à cause du manque de financements et de programmes, ils ont de la difficulté à chiffrer le nombre exact d’enfants vulnérables.

Anne Vincent est la représentante du Fonds des Nations Unies pour l’enfance, UNICEF, au Burkina Faso. Elle déclare : « L’épidémie du COVID-19 empire la situation déjà critique de l’éducation des enfants pris au piège dans une crise humanitaire sans précédent. »

Selon l’UNICEF, de récentes attaques ont entraîné cette année une multiplication par dix du nombre d’enfants en besoin de protection, qui ont atteint 368 000. Human Rights Watch a enregistré plus de 120 attaques et menaces perpétrées contre des enseignant(e)s, des élèves et des écoles de 2017 à 2020 dans ce que l’organisation appelle une « guerre contre l’éducation » par les groupes islamistes qui s’opposent aux programmes séculaires et aux institutions gouvernementales du Burkina Faso.

Pour pouvoir être plus en sécurité pour étudier et être à l’abri des extrémistes, des milliers d’enfants ont été envoyés des petits villages ruraux vers des centres urbains plus peuplés. La Boucle du Mouhoun est une région agricole au nord-ouest du Burkina Faso où la violence se propage actuellement. Plusieurs enfants déplacés vivent dans des concessions bondées de personnes. Pendant la journée, ils traînent dans les rues poussiéreuses et mendient avec des boîtes vides pour avoir de l’argent.

Lassina Sougue pilote les actions humanitaires du gouvernement dans le Sourou, une province de la Boucle du Mouhoun. Il affirme que les cas de violence sexuelle sont de plus en plus signalés depuis que les attaques ont conduit des milliers d’enfants vers les localités plus grandes l’an dernier.

Marie Yelkouni est la coordonnatrice d’un groupe d’associations qui luttent pour les droits des femmes dans la province du Kossi, toujours dans la région de la Boucle du Mouhoun. À ses dires, la fermeture des écoles instaurée pour éviter la propagation du COVID-19 a poussé beaucoup d’enfants vers les petits boulots. Elle ajoute que les parents avaient l’habitude d’apporter de la nourriture et de l’argent à leurs enfants qui étudient en ville, mais qu’ils ne peuvent plus s’y rendre à cause du risque de violence présent sur les routes. Cela oblige de nombreux enfants à travailler pour moins d’un dollar par jour, en faisant la lessive, en vendant des marchandises ou en travaillant dur dans les petites mines artisanales.

Seydou Koussoube à 17 ans. Il a déménagé à Tougan, dans la province du Sourou, en septembre, une année après que son école a été fermée à cause des menaces des extrémistes. Il déclare : « Avant, nos parents nous aidaient, mais, maintenant, nous devons aller chercher l’eau, cuisiner et tout faire nous-mêmes. »

L’UNICEF soutient que ses programmes se poursuivent pendant la crise du COVID-19. Les activités éducatives se déroulent en plus petits groupes et une consultation individuelle est offerte aux survivants d’exploitation et de violence sexuelles. Mais les exigences de la distanciation physique relatives au COVID-19 créent des défis supplémentaires pour plusieurs organisations.

Pour faire face au COVID-19, le gouvernement a lancé un plan de 15 millions de dollars en avril, en vue d’enseigner les enfants par des émissions télévisées et des cours en ligne. Des millions de masques, de pains de savon et de bouteilles de désinfectants sont en préparation pour la réouverture des écoles en septembre.

Les autorités locales ont affirmé qu’elles espéraient que le démarrage du prochain trimestre permettrait de faire sortir les enfants non accompagnés et d’autres mineur(e)s de la rue, même si elles reconnaissent que les difficultés qu’ils vivent pourraient durer tant que la violence subsistera.

La présente nouvelle est adaptée d’un article initialement écrit par Sam Mednick pour The New Humanitarian, intitulé « In Burkina Faso, violence and COVID-19 push children out of school and into harm’s way. »Consultez l’intégralité de l’article au : https://www.thenewhumanitarian.org/news-feature/2020/07/07/Burkina-Faso-children-coronavirus-jihadists-Sahel [1].