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Burkina Faso : Issouf Ouédraogo, un exemple de masculinité positive

Il est huit heures du matin à Dano, dans la région du sud-ouest du Burkina, à près de 280 kilomètres de Ouagadougou, la capitale. Dans la cour du centre médical urbain de Dano, les femmes forment de petits groupes autour des sages-femmes. Aujourd’hui, comme tous les lundis, c’est un jour de vaccination pour les bébés et la cour grouille de mamans. Certaines sont venues pour les pesées mensuelles de leurs nouveau-nés, d’autres sont là pour leur consultation prénatale.

Comme partout à ailleurs dans les zones rurales et semi-rurales du Burkina Faso, les croyances traditionnelles exercent une grande influence dans la vie quotidienne des familles. Une de ses croyances veut le fait que les travaux ménagers et l’entretien des enfants relèvent du rôle des femmes. Cependant, un homme s’est engagé pour l’épanouissement de sa famille. Et il le démontre en aidant sa femme dans les différentes tâches souvent laissées à la charge des femmes.

Aujourd’hui, cet homme attire l’attention des femmes dans le centre de santé de Dano. Il s’agit d’Issouf Ouédraogo, un jeune entrepreneur. Il vient d’arriver au centre, élégamment habillé, il en sort avec son bébé de huit mois dans un sac en kangourou accroché sur sa poitrine. Il est venu pour la pesée mensuelle de son enfant et est l’un des rares hommes au milieu de ces femmes aujourd’hui.

Quelques femmes lui jettent des regards curieux. Elles sont peu habituées à voir un homme effectuer ce genre de tâches. 

Une jeune dame du nom d’Aminata Sawadogo est également là aujourd’hui. Elle regarde monsieur Ouédraogo avec admiration.

Elle déclare : « Cela m’aurait fait plaisir de voir mon mari aussi m’accompagner ainsi. C’est un signe que la femme ne doit pas être seule durant ces moments difficiles de l’accouchement et des premiers moments de vie du bébé. »

Abibou Drabo est une autre jeune maman qui est aussi là. Elle estime que madame Ouédraogo est très chanceuse. Le mari de madame Drabo n’aurait jamais amené leur enfant au centre de santé à cause du regard de l’entourage.

Elle raconte que certaines personnes désavouent les hommes qui pratiquent certaines tâches qu’elles disent dévolues à la femme. Selon les croyances locales, puiser de l’eau pour son épouse, porter le bébé au dos, aller faire le marché pour le ménage sont, par exemple, des tâches pour les femmes. Pour les hommes, ces travaux sont sans honneur pour eux.  

Mais d’autres, comme monsieur Ouédraogo, sont en désaccord avec cela. Sa vision sur le rôle de l’homme dans la famille et le couple est plus large. Il reconnait les croyances de sa communauté, mais n’y adhère pas. Il pense que les hommes jouent un rôle important dans le développement et l’épanouissement de leur famille. C’est pour cela qu’il veut contribuer au changement de mentalité des gens de sa communauté.

Monsieur Ouédraogo demande : « Si le couple se met à deux pour avoir un enfant pourquoi en confier la garde uniquement à une partie? »

Pour lui, le fait qu’un mari aide son épouse ne comporte que des avantages, et il invite les autres à considérer leurs femmes comme leurs sœurs ou leurs mères. Qui ne voudrait pas apporter une aide à sa mère ou à sa sœur?

Jeanne Somda est sage-femme au centre médical urbain de Dano depuis plus d’une quinzaine d’années, et elle a assisté à l’accouchement de l’épouse de monsieur Ouédraogo. Elle se souvient qu’elle croyait que les gestes de monsieur Ouédraogo étaient passagers, comme tous ces hommes qui accompagnent leurs épouses pour l’accouchement. Maintenant qu’il continue d’être un mari et un père présent, elle le félicite.

Elle déclare : « J’ai vraiment apprécié l’action de monsieur Ouédraogo et j’encourage les autres hommes à lui emboîter le pas. »

Pour madame Somda, monsieur Ouédraogo est un modèle de mari à l’écoute de son épouse et de sa famille et qui prend soin de son bébé. Elle note qu’il est présent pour les consultations, et qu’il essaie d’améliorer l’alimentation du jeune enfant. Le bénéfice, c’est une famille épanouie avec un bébé en bonne santé.

André Bayala est sociologue. Pour lui, le changement de comportement et des croyances traditionnelles est un travail de longue haleine. Monsieur Bayala admet que le changement positif viendra, grâce à des gens comme monsieur Ouédraogo, mais que cela prendra du temps.

Malgré le changement qui s’opère lentement, monsieur Ouédraogo ne se décourage pas. Grâce au soutien de la sage-femme madame Somda, il espère créer un club pour amener les hommes à participer aux consultations de leurs enfants.

Le jeune papa affirme être satisfait de voir d’autres hommes amener leurs femmes et leurs enfants au centre de santé. Monsieur Ouédraogo espère que son modèle inspirera d’autres hommes pour un meilleur épanouissement des familles de sa communauté.

La présente ressource a été produite pour le projet VIMPlus. VIMPlus fait partie du programme de renforcement de la résilience au Sahel de l’USAID (RISE) qui aide les communautés vulnérables au Burkina Faso et au Niger à se préparer et à gérer efficacement les crises récurrentes et trouver des moyens durables pour sortir de la pauvreté.

Photo : Issouf Ouédraogo avec son bébé au centre médical urbain de Dano. Crédit : Bakouan Ouaboué.

Cette Nouvelle a été publiée à l’origine en juillet 2022.