Afrique de l’Ouest : Réponses paysannes à l’absence de financements (par Inoussa Maïga pour Agro Radio Hebdo)

| août 11, 2014

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Soumaïla Sanou  savoure une victoire avec les productrices et les producteurs  du Comité interprofessionnel des céréaliers du Burkina (CICB). Alors que plusieurs groupements agricoles trouvent difficile, voire impossible, de financer leurs activités agricoles,  M. Sanou et les membres de son association ont réussi a amassé 52 millions de francs CFA (107 000 dollars américains) dans un compte commun qui appartient à tous les membres.

C’est lors d’une conférence internationale sur le financement de l’agriculture qui s’est tenu à Nairobi au Kenya que M. Sanou, président du CICB, a expliqué comment le groupement avait réussi. Le CICB amasse des fonds en vendant en gros  une partie de la production céréalière contribué par chaque membre individuel du groupement. L’argent ainsi obtenu permet de financer l’achat en gros des engrais pour les productrices et les producteurs qui sont membres.

M. Sanou explique: « L’engrais que chaque producteur reçoit est l’équivalent de la quantité des céréales qu’il a cédé à l’organisation ». Le CICB verse dans le compte commun l’argent qui reste après l’achat d’engrais  et chaque producteur et chaque productrice reçoit un carnet précisant le montant qui lui revient.

Mais le succès du groupement vient des agricultrices et des agriculteurs qui ont eux-mêmes pris l’initiative de ce regroupé.  Le CICB a été créé parce ce que les banques locales refusaient d’accorder des prêts aux membres individuels. Selon les banques, les agriculteurs et agricultrices ne pouvaient pas fournir de preuves suffisantes démontrant leur capacité de remboursement.

Bassiaka Dao est administrateur du Réseau des organisations paysannes et des professionnels agricoles d’Afrique de l’Ouest (ROPPA). M. Dao dit que les gouvernements ont créé des banques agricoles et que les agriculteurs ont mis sur pieds des caisses de crédits. Il explique que ces derniers étaient mal structurés. Il rajoute : «  leur capacité de financement est restée très faible et beaucoup ont fini par se détourner du financement de l’agriculture ».

Laissés à eux-mêmes, les agriculteurs et les agricultrices ont été forcés de trouver d’autres solutions. Un peu partout en Afrique de l’Ouest, plusieurs organisations d’agriculteurs et d’agricultrices ont développé des mécanismes pour permettre à leurs membres d’accéder à des services agricoles de base tels que  les engrais, le matériel et de petits crédits. Ils ont même développé des marchés pour l’écoulement de produits.

Un autre exemple à succès nous vient du Niger. La Fédération des Unions des Coopératives de Producteurs de Riz (FUCOPRI) organise la vente groupée du riz paddy dans le pays.  Ayouba Hassane est le directeur technique du groupe. Il dit que la fédération a été créée « pour faire face à l’épineuse question de commercialisation ».

M. Hassane ajoute : « Les leaders de la fédération ont réussi à convaincre le gouvernement nigérien à acheter le riz paddy local pour la constitution du stock de sécurité alimentaire ».  Il explique que cela a permis de résoudre un problème crucial qui est celui de la mobilisation de financement des coopératives afin de les aider à mieux fonctionner.

Ce sont autant d’initiatives qui permettent aux organisations de répondre aux besoins les plus pressants des agricultrices et des agriculteurs, notamment les plus démuni(e)s.

Les choses commencent à changer tout doucement, et la situation financière des producteurs et des productrices s’améliore. M. Sanou dit: « Hier nous courions après les banques, aujourd’hui ce sont les banques qui courent après nous pour nous proposer des crédits ».