2. Sénégal: les agriculteurs questionnent le plan gouvernemental pour la « relance de l’agriculture » (par Idy Sy Diop, pour Agro Radio Hebdo, à Dakar, Sénégal)

| mai 5, 2008

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La hausse généralisée des prix des céréales qui touche la planète entière affecte plus durement certains pays africains comme le Sénégal, où cette hausse est combinée à une sérieuse crise du secteur agricole.Cette année, la production de céréales connaît d’importants déficits. Par exemple, la production de riz, aliment de base des Sénégalais, n’a été que de 195 000 tonnes au lieu des 215 000 tonnes prévues. Toutes céréales confondues, le déficit entre les prévisions et les quantités récoltées est de 13% . Il faudra donc importer des céréales pour couvrir les besoins et rien que pour le riz, il faudra plus de 600 000 tonnes.

C’est dans ce contexte que le chef de l’Etat sénégalais, Abdoulaye Wade, a annoncé un ambitieux programme de relance du secteur de l’agriculture, la Grande Offensive Agricole pour la Nourriture et l’Abondance (GOANA), qui vise à assurer l’autosuffisance alimentaire dès cette année. Ce programme prévoit booster sérieusement la production agricole. Par exemple, l’objectif est d’arriver à 500 000 tonnes par an pour le riz, 2 millions de tonnes pour le maïs et 2 millions de tonnes pour les autres céréales. On estime que le coût de ce plan d’autosuffisance alimentaire est de 390 milliards de francs CFA (environ 920 millions dollars américains ou 590 millions d’euros).

Les producteurs à la base, se plaignent de ne pas avoir été consultés, ce qui les laisse perplexes quant aux chances de réussite de la GOANA. Cheikhou Seck est le premier producteur de maïs du Sénégal et président du Comité interprofessionnel pour les céréales locales.

Pour arriver aux résultats annoncés dans ce plan, il explique qu’il faudrait que tous les producteurs disposent d’engrais et de semences en quantités suffisantes d’ici la fin mai.

Aujourd’hui, il estime qu’aucun paysan – y compris lui-même – n’a les moyens d’obtenir les intrants nécessaires. M. Seck explique que la plupart des agriculteurs sont déjà endettés,suite à la dernière saison. Il suggère que le plan aurait mieux marché s’il avait été annoncé dès janvier et si sa mise en œuvre avait commencé plus tôt.

Samba Ka est le président du Cadre de concertation des ruraux dans la région de Kaolack au centre du Sénégal. Il souligne que les récoltes de l’année dernière n’ont pas été bonnes et les paysans sont plus préoccupés par la période de soudure. M. Ka ajoute que les petites réserves personnelles qu’il a ne peuvent pas servir de semences pour accroître la production.

Hormis cela, les paysans sénégalais estiment qu’il leur faudrait aussi de gros équipements comme des tracteurs, ce dont les paysans sénégalais ne disposent pas.

Reste enfin le problème de l’écoulement : là aussi il y a une grande crainte, car moins d’une semaine après avoir annoncé la GOANA, le président Wade a aussi annoncé un accord passé avec l’Inde pour importer 600 000 tonnes de riz de ce pays pendant six ans, ce qui laisse peu de place à la production locale.

Le gouvernement Sénégalais insiste qu’il n’y a pas de contradiction entre le plan de promouvoir l’autosuffisance alimentaire en augmentant la production local et son plan d’importer du riz à partir de l’Inde.