2. Cameroun – À la sueur de son front, une agricultrice opère sa plantation avec fierté et sacrifice (écrit par Lilianne Nyatcha, pour Agro Radio Hebdo, à Douala, au Cameroun)

| mars 8, 2010

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Elise Dibabo ne ressemble pas à une agricultrice typique. Ses lunettes rondes à monture plaqué or lui donnent des allures d’intellectuelle nouvellement embourgeoisée. Et pourtant, voilà déjà 8 ans qu’Élise Dibabo, 53 ans, a décidé, de quitter la ville et déposer ses valises dans le petit village de Nkol-Ngock. Son mari, un cadre dans le secteur maritime, n’était pas content avec sa décision. Son mari avait acquis 127 hectares de forêt vierge à Nkol-Ngock, qui se situe à une soixantaine de kilomètre de Douala. Laborieusement et courageusement, Élise Dibabo, a défriché et mis en valeur ce terrain.

Mme Dibabo a auparavant travaillé comme domestique. Mais, depuis son arrivée à Nkol-Ngock, elle emploie une vingtaine d’ouvriers pour l’aider à travailler la terre. C’est avec un brin de fierté qu’ elle parle des cultures exploitées dans son immense champ. Elle a: 65 hectares de palmeraie dont, 10 hectares de pistaches, 3 hectares d’ignames, 2 hectares de cacao, 2 hectares d’ananas, 2 hectares de pastèques, 5 hectares de bananes plantains et 15 hectares de maïs, essentiellement pour nourrir son cheptel de 1 300 poulets de chair.

La construction d’une usine de transformation d’huile de palme à marquer son succès. Ça lui a permis d’agrandir sa plantation.

Son dynamisme ne lui a pas valu que des amis dans cette petite localité où tout le monde se connait. Venue de Douala, ville surpeuplée et bruyante, Élise Dibabo a dû surmonter cette intimité subite et subie, pour s’adapter et s’intégrer.

Mme Dibabo emploie actuellement 8 travailleurs venus du village. Aujourd’hui, elle plaisante avec ses ouvriers. Son rire contagieux éclate de temps à autre. Lorsqu’on demande au gérant des employés de Mme Dibabo de nommer les fautes sa patronne, il répond qu’il ne peut penser à un seul défaut. Il dit que Mme Dibabo prend soin de tous ses employés comme une mère prend soin de ses enfants. En effet, ses employés sont nourris et logés sur la plantation.

Mais, une opération à grande échelle en milieu rural apporte aussi beaucoup de défis. Mme Dibabo dit que le plus dur c’est d’être dans un village non électrifié et enclavé. C’est particulièrement dur durant la saison des pluies, notamment lorsque sa petite voiture de transport à quatre roues motrices est en panne. Résultat: Élise Dibabo, bien qu’agricultrice passionnée, a dû abandonner une bonne partie de sa palmeraie et de sa bananeraie.

En dépit de ces infortunes, Élise Dibabo garde le moral. La chaleureuse femme, sans enfant, trouve du réconfort auprès de son mari et complice depuis 30 ans.

Elle l’appelle affectueusement « Papa » et, en retour, il l’appelle « Maman », de quoi faire pâlir d’envie même les jeunes couples! Et pour garder la flamme d’amour toujours vive, son mari, qui reste à Douala pour raisons professionnelles, lui rend visite tous les week-ends. Quand il n’est pas avec elle à Nkol-Ngock, Papa appelle son épouse ou lui envoie des sms.

Aujourd’hui, Élise, aspire à un peu de repos. Elle aimerait se retrouver à un endroit où elle ne doit pas se soucier des virus qui attaquent les cultures. À 53 ans, le fardeau physique et moral qui pèse sur elle, l’épuise. Elle ne sait pas pour combien de temps elle sera en mesure de continuer à utiliser un coutelas. Elle espère surtout un coup de pouce des autorités pour mécaniser son exploitation.