Une discussion de Barza examine la place du genre dans les émissions radiophoniques interactives

| mars 27, 2017

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Durant quatre semaines, des radiodiffuseurs et des radiodiffuseuses se sont retrouvés sur la plateforme de Discussion de Barza, où ils ont posé des questions, partagé des témoignages et examiné le thème des émissions radiophoniques interactives. Durant la troisième semaine, la question a été posée aux participant(e)s de savoir comment ils pouvaient aider les femmes, ou même d’autres collectivités mal desservies, que l’on entend rarement, à s’exprimer à l’antenne. Le présent article propose quelques commentaires évoqués pendant la discussion en ligne.

Pourquoi est-il difficile d’obtenir des voix féminines à l’antenne?

Hope Mafaranga, de Vision Group, en Ouganda, note deux obstacles à une participation accrue des femmes aux émissions radiophoniques : certaines femmes manquent souvent « d’argent pour acheter du temps d’antenne afin d’effectuer des appels et apporter leurs contributions, tandis que d’autres doivent obtenir l’autorisation de leur mari pour participer à un débat. »

Souvent, ce sont les hommes qui gèrent l’argent ou les technologies telles que les téléphones cellulaires et les radios.

Plusieurs radiodiffuseurs et radiodiffuseuses ont également mentionné un problème culturel important : dans leurs sociétés, on recommande aux femmes de se faire discrètes, rester à l’écart et de s’en remettre à leurs époux lorsqu’il est question d’exprimer un avis. Cependant, certains participant(e)s ont souligné que le fait d’entendre la voix d’une radiodiffuseuse ou de diffuser des interviews réalisées avec des femmes peut encourager un plus grand nombre de femmes à prendre part aux discussions.

Toutefois, certaines stations de radio ont fait part de leur difficulté à trouver des radiodiffuseuses. David Munyaga travaille à Radio Ondese FM, en République démocratique du Congo. Il affirme qu’il est difficile de trouver une femme réalisatrice, radiodiffuseuse ou journaliste. La station emploie trois femmes qui dans le cadre de leur travail accomplissent ces tâches, mais ce n’est pas le fait d’entendre leurs voix à l’antenne qui encouragera à coup sûr plus de femmes à participer. Il soutient que les femmes qui s’expriment à la radio sont souvent considérées comme des travailleuses du sexe « [ou] des gens dont il faut avoir peur dans la société. » Cette perception négative fait que de nombreuses femmes hésitent à participer aux émissions ou à devenir radiodiffuseuses.

Selon Ebenezer Amankwa, l’heure à laquelle une émission est diffusée est importante. M. Amankwa est radiodiffuseur à OTEC FM, au Ghana. Il affirme tenter de toucher les femmes, mais sait que la majeure partie de son auditoire est composée d’hommes. Il pense que cette situation pourrait être liée à l’horaire des émissions. En effet, le fait est que durant ces émissions, plus de femmes se trouvent soit au champ, soit sont occupées aux travaux ménagers ou autres choses [et seraient ainsi incapables d’écouter]. »

La solution pour lui serait que les radiodiffuseurs et les radiodiffuseuses effectuent des recherches pour savoir à quel moment les femmes sont plus libres afin de diffuser durant ces heures. Ainsi, peut-être que les femmes pourront interagir plus dans les émissions radiophoniques.

Comment les radiodiffuseurs encouragent-ils plus de femmes à s’exprimer à l’antenne?

À Radio Fatou, au Mali, les radiodiffuseuses animent des émissions consacrées aux auditrices, y compris une émission intitulée Sènè (« Agriculture » en langue bambara). Aux dires d’Adama Coulibaly, l’émission parle des préoccupations des femmes, dont l’agriculture, et est diffusée à une heure où les femmes peuvent écouter, à savoir : de 9 h à 11 h du matin. Cependant, M. Coulibaly affirme que certaines femmes ont de la difficulté à participer, car elles n’ont ni téléphone ni accès à Internet, mais qu’elles envoient par contre des lettres à la station.

Pour régler le problème de crédits d’appel, Lamine Togola, l’agent chargé des TIC de Radios Rurales Internationales, au Mali, suggère aux radiodiffuseurs d’encourager les femmes à « biper » la station de radio, laisser un appel manqué sous forme de bip et attendre que le radiodiffuseur ou la radiodiffuseuse les rappelle.

Il soutient qu’il est même possible au Mali de biper quelqu’un lorsque vous ne disposez d’aucun crédit sur votre téléphone, et que cette pratique est assez répandue chez les jeunes femmes.

Mark Kudafa est agent de programmes chez Radios Ruales en Ghana. Il propose aux radiodiffuseurs d’appeler simplement les femmes pour leur demander de se joindre à la discussion.

Amankwa conseille aux radiodiffuseurs d’interviewer plus de femmes sur le terrain, surtout dans les régions n’ayant aucun accès à Internet ou aux téléphones. « Cela pourrait susciter l’intérêt des [femmes] à participer, » note-t-il.

Kudafa est du même avis, et suggère aux radiodiffuseurs de prêter attention à l’équilibre des genres lorsqu’ils réalisent des interviews pour leurs émissions. C’est le moment idéal pour recueillir des voix féminines, et peut-être les numéros de téléphone des femmes pouvant appeler par la suite pour contribuer.

Amankwa propose également d’utiliser une ligne téléphonique séparée pour les correspondants téléphoniques de sexe féminin. Radios Rurales Internationales aide certaines stations à appliquer cette stratégie.

Au niveau de plusieurs stations de radio, ce sont les hommes qui appellent le plus souvent. Cependant, en annonçant une ligne téléphonique séparée pour les femmes, les radiodiffuseurs peuvent être sûrs de diffuser plus de voix féminines, en alternant entre les lignes consacrées aux appels du public en général et celles réservées aux femmes uniquement. Si un homme appelle sur la ligne réservée aux femmes, le radiodiffuseur ou la radiodiffuseuse peut lui communiquer le numéro de la ligne générale et raccrocher, libérant ainsi la première ligne pour les femmes qui appellent.

Non seulement ces stratégies encouragent les femmes à participer, mais elles motivent également les habitants des collectivités mal desservies à participer, y compris les personnes handicapées, les albinos ou les habitants des villages isolés.