Éthiopie : Les jardins-forêts renforcent la résilience des communautés du sud de l’Éthiopie (Mongabay)

| janvier 21, 2019

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Bule est un petit village situé à 370 kilomètres de la capitale, Addis Abeba. Il serait le berceau du système traditionnel de jardins-forêts en Éthiopie.

Les agriculteurs de Bule continuent de pratiquer le système agroforestier multiétagé qui consiste à cultiver des arbres, des arbustes et des cultures annuelles ensemble dans un système qui reproduit un cadre forestier autour de leurs propriétés. Les jardins-forêts de Bule sont essentiellement constitués de deux cultures vivaces indigènes : le bananier d’Abyssinie et le caféier. Ces plantes poussent sous les avocatiers et les bananiers, avec les légumes à l’étage inférieur. Ce système offre aux familles des avantages sur les plans nutritionnel, économique, social et environnemental.

Endashaw Solomon est un agronome local selon qui la population locale Gedeo bénéficie largement de ce système indigène. Il ajoute que la préservation du système est une tradition au sein des communautés, et qu’elle leur permet de préserver leur sécurité alimentaire. Connu localement sous le nom de kara miemite boga, les jardins contribuent à améliorer le sol et atténuer les effets du changement climatique en absorbant le dioxyde de carbone présent dans l’atmosphère.

Sali Biftu est un expert local en fertilité des sols. Il déclare : « Les arbres servent de combustible, de fourrage, de matériaux de construction locaux, mais sont également vendus comme bois d’œuvre ou bois de chauffage. Le revenu provenant de ces systèmes traditionnels n’est pas élevé, mais ils procurent une plus grande sécurité alimentaire aux familles. »

Ces arbres produisent également des fruits comestibles, contribuent à la reconstitution du sol, et procurent de l’ombre aux caféiers situés en dessous.

Les exploitations agricoles des régions voisines pratiquent de plus en plus la monoculture de la célèbre drogue appelée khat. Comparés à ces exploitations, les jardins-forêts sont plus complexes et jouent un rôle majeur dans la lutte contre l’érosion du sol et l’amélioration des niveaux de fertilité et de la diversité biologique, selon monsieur Biftu.

Les populations indigènes Gedeo ont une culture traditionnelle de la plantation d’arbres. L’agriculteur Mengesha Tero explique : « Chez les Gedeo, la première chose qu’un père lègue en héritage à son enfant, c’est la culture de la plantation d’arbres, et non la terre. Par conséquent, nos enfants grandissent avec cette culture et la transmettent à la génération suivante. »

Monsieur Tero, âgé de 58 ans et père de 10 enfants, affirme que sa famille jouit de meilleures conditions grâce au système de jardins-forêts, car il récolte différentes denrées pendant toute l’année.

Il ajoute : « Ma famille n’est plus exposée à l’insécurité alimentaire. Je cultive des bananes d’Abyssinie, des cultures racines, du maïs, du café, des patates douces et des avocats. Je gagne 400 $ à 500 $ par an en vendant le surplus de produits provenant des jardins. »

Beyene Teklu est chercheur et professeur à l’Université d’Hawassa. Selon lui, un ménage doit avoir au moins un hectare de terre agricole pour pouvoir se nourrir. Mais cela ne semble pas s’appliquer au système agroforestier de Bule.

À Bule, la superficie moyenne d’une exploitation qui mesure deux tiers d’un hectare dépasse légèrement la moyenne nationale, mais les agriculteurs locaux soutiennent qu’ils gagnent bien leur vie avec les jardins. Meseret Bunee possède moins d’un demi-hectare. Elle affirme cependant que son mari, elle et leurs six enfants effectuent des récoltes pendant toute l’année et jouissent d’une sécurité alimentaire.

Même si la réduction de la taille des exploitations incite généralement les jeunes ruraux à migrer vers d’autres lieux, les régions qui pratiquent largement l’agroforesterie constituent une exception. « Autrefois, les jeunes migraient, mais maintenant, les gens s’implantent dans leur région d’origine grâce à l’introduction de l’agroforesterie modifiée, » déclare l’agriculteur Birhanu Birara.

Outre ses avantages économiques et environnementaux, l’agroforesterie comporte également des avantages sociaux. Le fait d’avoir une source de ravitaillement fiable pour la nourriture et le bois de chauffage permet aux femmes d’utiliser leur temps efficacement, tandis que la diversification des revenus contribue à améliorer leurs moyens de subsistance et leur bien-être, ainsi que ceux de leurs familles.

Teshoma Tesema est le directeur de la recherche en plantations forestières de l’Institut éthiopien de recherches en environnement et en foresterie. Il déclare : « La raison pour laquelle vous voyez encore des potagers multiétagés à gauche et à droite lorsque vous traversez Gedeo, c’est parce que les gens aiment ce système et qu’ils en [tirent profit]. »

Pendant que les recherches se poursuivent et que de nouvelles technologies sont introduites en Éthiopie, des systèmes agroforestiers modifiés sont apparus ces dernières années. Mais, quelles que soient les espèces qui y sont produites, les jardins et les autres formes d’agroforesterie resteront prisés à Gedeo et domineront toujours le paysage, car ils existent depuis des siècles.

La présente nouvelle est adaptée d’un article intitulé « Agroforestry ‘home gardens’ build community resilience in southern Ethiopia, » écrit par Tesfa-Alem Tekle pour Mongabay. Pour lire l’article original, cliquez sur : https://news.mongabay.com/2018/12/agroforestry-home-gardens-build-community-resilience-in-n-ethiopia/?utm_source=EHN&utm_campaign=0dbbe565b3-Science_saturday&utm_medium=email&utm_term=0_8573f35474-0dbbe565b3-99062341.