Madagascar : Des agriculteurs utilisent de l’engrais à base de fientes de chauve-souris pour accroître leurs récoltes à long terme (RFI)

| septembre 11, 2017

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Sur les Hautes Terres de Madagascar, le maraîcher Jean-Baptiste Ramarison délaisse petit à petit les engrais chimiques pour le fumier organique, et pas n’importe quel fumier. Il utilise un produit fait à base de fientes de chauve-souris.

Monsieur Ramarison a commencé à utiliser l’engrais de chauve-souris, surnommé également guano, il y a 10 ans. Celui-ci coûte moins cher que l’engrais chimique, et monsieur Ramarison trouve que ses légumes restent frais plus longtemps lorsqu’il emploie des moyens biologiques. Cependant, il continue d’utiliser l’engrais chimique pour quelques-unes de ses cultures.

Il explique : « Pour les choux fleurs, je mets les deux types d‘engrais. Le chimique c’est pour aider à faire pousser la graine du légume et le guano, c’est pour les feuilles et la terre. Le chimique, ça fait pousser vite, mais c’est cher. Je dépense moins en achetant du guano. »

À Madagascar, plus de 60 % des terres se prêtent à l’agriculture, mais moins de 10 % sont cultivées. Les engrais chimiques y sont moins souvent utilisés qu’en Europe ou en Asie.

Erick Rajaonary est un entrepreneur qui a trouvé le moyen de gagner de l’argent en aidant les agriculteurs malgaches à accroître leurs profits tout en enrichissant leur sol. Il veut que son engrais organique soit le meilleur de l’île, et pourquoi pas du continent africain.

Monsieur Rajaonary est surnommé « Bat Man », car il doit sa réussite à ces petits mammifères volants. En 2006, il s’est lancé dans la production de l’engrais biologique avec des fientes de chauve-souris ramassées dans des grottes. Sa société, qui porte le nom de Guanomad, possède aujourd’hui 30 % des parts du marché de l’engrais à Madagascar.

Monsieur Rajaonary explique que son engrais guano est préparé à base de fientes de chauve-souris pourries mélangées avec de la terre acide. Il faut 20 à 30 ans à cette fiente pour se décomposer au point que les éléments nutritifs qu’elle contient puissent profiter entièrement aux plantes.

La société exploite environ 120 grottes, situées principalement au sud-ouest et au centre-ouest de pays. Elle produit actuellement près de 20 tonnes par jour. Durant les années record, comme ce fut le cas en 2008-2009, la production atteignait 80 à 100 tonnes par jour.

Au vu du taux de production actuel, ces grottes contiennent assez de fientes de chauve-souris pour approvisionner la société pendant plus de 130 ans. Mais il se peut que la demande pour le guano ne soit pas en adéquation avec l’offre, car certains agriculteurs peinent à faire la transition vers l’agriculture biologique.

Monsieur Rajaonary affirme que, même si le guano est beaucoup moins coûteux que l’engrais chimique, il vous faut une plus grande quantité pour fertiliser vos cultures, et, par conséquent, le montant à dépenser finit par être le même. À ses dires, le changement le plus important observé par les agriculteurs lorsqu’ils adoptent le guano, c’est la productivité à long terme : « La différence, c’est que, la première année, le rendement est meilleur pour le chimique. Alors que le guano, c’est l’inverse. Et au fur et à mesure des années, et bien le rendement, il augmente. Mais malheureusement, les paysans ne raisonnent pas comme ça. Eux raisonnent en termes de rentabilité immédiate. »

Monsieur Rajaonary veut développer le secteur de l’agriculture biologique malgache, et s’il doit commencer à conquérir les marchés étrangers, qu’il en soit ainsi. Il fait déjà la moitié de ses affaires à l’étranger, et il se prépare à proposer un engrais destiné particulièrement au secteur de la production de cacao biologique ivoirien.

Monsieur Ramarison compte poursuivre sa transition vers l’agriculture biologique, et ce, aussi longtemps que ses clients souhaiteront également effectuer ce changement.

Il ajoute : « À l’avenir, je pense n’utiliser que de l’engrais biologique parce que je sais que c’est meilleur pour la santé. En plus, les légumes se conservent mieux. Mais il faudrait trouver des acheteurs. Le chimique rend les légumes plus beaux en apparence. Et au marché, les gens sont donc plus attirés. »

Le présent article est adapté d’un reportage intitulé « Madagascar: de l’engrais biologique à partir des déjections de chauves-souris » diffusé par RFI. Pour lire l’intégralité de l’article (en français), cliquez sur : http://www.rfi.fr/emission/20170905-madagascar-engrais-biologique-partir-dejections-chauves-souris

Photo credit: RFI / Sarah Tétaud